«Un bienfait n’est jamais perdu». Cette assertion, le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK), semble l’avoir bien comprise. S’il est vrai qu’il n’a pas oublié ses anciens amis et proches depuis sa prise de pouvoir, comme d’aucuns l’indiquent à travers la «famillecratie» ou «ma famille d’abord» comme son mode de gouvernance, il n’a pas non plus rangé dans les tiroirs les noms des membres de l’ex-junte qui était dirigée par le capitaine-général Amadou Haya Sanogo. Dans le cadre d’éventuels remaniements à venir et de l’occupation des postes de responsabilité, il serait en train de penser à eux.
Le président IBK sait comment il est parvenu à la magistrature suprême de notre pays. En effet, juste après le coup d’Etat du 22 mars 2012 qui a renversé le général Amadou Toumani Touré, il était presque le seul homme politique à être dans les grâces des putschistes. Contrairement aux autres politiciens, il n’avait jamais été inquiété ou trimballé à Kati.
Et on se souvient encore que la connivence entre les milieux religieux de notre pays, Sanogo et ses acolytes a été pour quelque chose dans la brillante élection d’IBK à la magistrature suprême. En tout cas, après son arrestation, Sanogo clamait qu’il avait plaidé, à l’époque, auprès des familles fondatrices de Bamako pour qu’IBK soit élu président de la République du Mali.
Mais, ayant pris le pouvoir, IBK soutenait qu’il fera en sorte que «Kati ne fasse plus peur à Bamako». Dans la foulée, s’en suivirent les arrestations de Sanogo et de sa bande. En réalité, ce qu’il faut savoir, c’est qu’il y avait aussi plusieurs groupes de militaires qui, en complicité avec les putschistes de Kati, avaient aidé IBK à conquérir facilement le pouvoir.
Aujourd’hui, au regard de l’évolution de la situation sur le terrain et en raison du processus de paix et de réconciliation enclenché dans notre pays, IBK mène des manœuvres, dit-on, pour récupérer ces «amis» de Sanogo qui ne sont pas en taule. Pour ceux qui le sont déjà, il tente de faire en sorte qu’ils aient une liberté provisoire.
Et c’est la lenteur dans la gestion de ce sulfureux dossier, à lui confié pour parvenir à cette liberté provisoire, qui a coûté au ministre de la Justice, Mamadou Diarra, la perte de son poste dans le nouvel attelage gouvernement qui vient d’être formé. Mais toujours est-il que l’option d’une liberté provisoire demeure pour Amadou Haya Sanogo et ses acolytes.
Pour ce qui est du cas du colonel-major Diamou Kéïta, il lui avait été proposé qu’il remplace Sada Samaké au ministère la Sécurité intérieure et de la Protection civile. Mais au finish, on lui proposa d’être nommé ambassadeur du Mali en Angola ; chose qu’il accepta sans tourner en rond.
En signe d’apaisement en faveur du groupe de l’ex-junte, colonel Salif Traoré a été nommé à la place de Sada Samaké, alors que ce même Salif avait été gouverneur de Kayes grâce à son ami, le général Moussa Sinko Coulibaly, actuellement directeur de l’Ecole de maintien de la paix Aliou Blondin Bèye de Bamako.
Selon des sources proches de Koulouba, d’autres responsables de l’ex-junte non en détention pourraient être nommés lors d’un autre remaniement d’ici à fin décembre 2015-début 2016. Mais en attendant, le geste d’apaisement du président IBK semble être bien apprécié par les ex-putschistes de Kati. Dans la foulée, on nous apprend que le porte-parole de la Plate-forme, Me Harouna Touré, en sa qualité d’avocat des membres de l’ex-junte qui croupissent en prison, se bat pour leur libération provisoire, tout en lorgnant dans le rétroviseur de Koulouba en quête d’un portefeuille ministériel.
Par ailleurs, il est à signaler que c’est le coup d’Etat du 22 mars 2012 qui a rapproché ces différents groupes, autrefois antagonistes. Il s’agit de ceux d’Amadou Haya Sanogo, de Diamou Kéïta, de Moussa Sinko Coulibaly, de Siméon Kéïta et de Salif Traoré.
Bruno E. LOMA