Depuis quelques jours, les tribus du nord du Mali sont à Anéfis, dans la région de Kidal, pour tenter de régler les différends qui les opposent. Il s’agit notamment des Ifoghas qui composent la majeur partie des groupes rebelles et des Imghads considérés comme proche de Bamako.
Le 10 octobre dernier, un protocole d’entente et de cohésion a été signé entre les deux parties. Cet accord vise à renforcer les liens entre les deux communautés touarègues du Nord.
Les rencontres se poursuivent et doivent être parachevées avec la signature d’un document final en présence de l’Etat malien et de la communauté internationale.
Moussa Ag Acharatoumane de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), et Algatak du GATIA (Plateforme) expliquent leur nouveau rapprochement dans une interview accordée à Sahelien.com, à Anéfis.
Sahelien.com : Où en êtes-vous avec les discussions à Bamako et à Anefis?
Moussa Ag Acharatoumane (CMA): A Bamako, les discussions continuent depuis pratiquement une semaine. On a des membres qui siègent dans les commissions du comité de suivi, notamment les commissions, politique, développement, sécurité, réconciliation. On a certains membres qui sont revenus à Anéfis, dans le cadre de la rencontre et qui doivent par la suite, rejoindre Bamako. A Anéfis, les discussions sont en bonne voie puisqu’on a déjà trouvé des solutions à certaines questions qui étaient sur la table, telles que le problème entre la Plateforme et la CMA. Déjà, il y a une feuille de route pour réconcilier les deux parties et qui est basée sur plusieurs points importants, comme la cessation des hostilités, la question des prisonniers, la question des communautés qui ont des problèmes entre elles et l’Azawad. Le quatrième point porte sur la mise en place d’une commission de sensibilisation regroupant les deux parties qui vont sillonner l’Azawad pour faire savoir à nos populations que désormais tous les Azawadiens de différents bords sont ensembles.
Algatak, (GATIA) : A Bamako, le Comité de suivi et les sous-comités thématiques ont repris les travaux sans aucune suspension. A Anéfis, depuis le 27 septembre, il y a eu une rencontre en présence de trois ministres maliens. Les questions ont porté d’abord sur la cessation des hostilités, la libération des prisonniers, et remettre sur les rails, le processus de paix. A partir de là, nous avons créé des commissions pour traiter les contentieux inter-communautaires. Les travaux ont commencé par la rencontre de la communauté Imghad et celle des Ifoghas dont les résultats ont été excellents et ont débouché sur un pacte d’honneur tenant lieu d’un pacte social entre les deux communautés. Ensuite, il y a eu la rencontre tripartite Arabe, Imghad et Chamanamasse qui s’est bien déroulée. Il n’a pas eu de document signé dans cette rencontre tripartite mais nous nous sommes entendus sur tous les aspects liés à la politique, au développement, au vivre ensemble. Il y a eu la rencontre Imghad-Dawshak. Là aussi nous nous sommes entendus sur l’arrêt immédiat des hostilités et prévu une rencontre technique dans la zone de Talata dans la région de Gao, où se seront présentes, toutes les communautés qui vivent dans ces zones pour trouver une solution définitive à ce conflit. Il nous reste à organiser d’autres rencontres, entre d’autres communautés notamment les Idnane et les Arabes pour discuter de l’épineux dossier d’Inhalil. Nous avons prévu d’organiser une rencontre entre les Arabes eux-mêmes, et si nécessaire une rencontre Imghad-Idnane et Imghad-Arabe, c’est ce qui nous reste à traiter.
Sahelien : Qu’est-ce qui motive le rapprochement entre la CMA et la Plateforme?
Moussa Ag Acharatoumane (CMA): Je pense que les problèmes qui existent entre la Plateforme et la CMA ne sont pas nouveaux, tout le monde sait que la CMA n’est pas en guerre contre le gouvernement ou l’armée malienne directement mais en guerre contre ce qu’on appelle les milices pro-gouvernementales qui sont originaires de l’Azawad. Ces affrontements sont un handicap, dans le cadre de l’application de l’accord. Pour toutes ces raisons là et étant donné que c’est des fils du terroir, nous avons jugé nécessaire de travailler pour que toutes ces populations ou bords politiques puissent se retrouver et se donner la main, d’abord, dans l’intérêt supérieur des Azawadiens et, ensuite dans l’intérêt de l’application de l’accord. C’est pour toutes ces raisons que ces réunions ont lieu à Anéfis.
Algatak, (GATIA) : Du côté de la Platerforme, nous avons la volonté en venant ici de faire la paix avec nos frères de la CMA. Nous sommes disponibles à rester ici le temps qu’il faut pour vider tous les contentieux. La motivation est qu’il faut rapprocher les communautés, parce que le fond du problème, c’est entre les communautés. Nous pensons aussi que l’accord d’Alger, a besoin de notre cohésion pour mieux avancer.
Est-ce qu’il y a d’autres prisonniers à libérer?
Moussa Ag Acharatoumane (CMA) : Sept prisonniers ont été libérés hier (12 octobre, ndlr) dans le cadre des discussions actuelles entre la CMA et la Plateforme. D’autres prisonniers manquent. Des discussions sont en cours dans la journée d’aujourd’hui (13 octobre) par rapport au sort de ces derniers, s’ils sont vivants ou morts ou quelle est leur situation. Nous n’avons pas fini avec ce point.
Algatak, (GATIA) : Je ne suis pas autorisé à parler de cet aspect, il y a des personnes plus indiquées.
Sahelien.com : Que pensez-vous du report des communales?
Moussa Ag Acharatoumane (CMA) : Nous avons jugé nécessaire pour qu’on reporte les élections par rapport au calendrier de l’accord, puisque l’accord prévoit que certaines choses doivent être faites d’abord sur le territoire de l’Azawad, dans le cadre de l’application de l’accord avant d’en arriver aux élections. Nous avons malheureusement constaté que ce n’est pas encore le cas, raison pour laquelle nous avons demandé au gouvernement malien, ainsi qu’à la médiation internationale de faire en sorte que les clauses de l’accord qui précèdent les élections soient respectées. Deuxièmement aussi c’est à cause de l’insécurité grandissante, d’abord le conflit entre la Plateforme et la CMA, ensuite le fait que la majorité de nos populations sont toujours refugiées dans les pays voisins, donc il faudra travailler sur tous ces aspects là pour que les gens puissent revenir chez eux avant de pouvoir organiser les élections. Nous nous conformons au cadre qui nous lie au gouvernement malien à avoir l’accord qu’on a signé à Alger qui prévoit qu’on organise des élections, mais après certaines étapes.
Algatak, (GATIA) : Nous pensons que les élections et les autres aspects de l’accord seront traités par le comité de suivi dans l’esprit de l’accord.
Sahelien.com : Avez-vous un calendrier ?
Algatak, (GATIA) : Non ! C’est le comité de suivi qui se charge de tous les points de l’accord.
Moussa Ag Acharatoumane (CMA) : On n’a pas une date précise, mais dans le calendrier qui a été fait par la médiation internationale, la question d’élection qui est posée. Comme nous l’avons dit, il y a des préalables avant qu’on arrive à l’organisation de ces élections.
Sahelien.com : Où en êtes-vous avec le projet de cantonnement et de désarmement des combattants?
Moussa Ag Acharatoumane (CMA) : Le cantonnement aussi revient au calendrier de l’accord qu’on a signé à Alger. Jusqu’à l’heure où je vous parle, ça n’a pas encore commencé pour des raisons très simples : l’accord n’a pas encore commencé à être appliqué parce que les sous-commissions qui sont à Bamako. C’est la commission défense et sécurité qui doit se pencher sur cette question, définir le calendrier, les modalités et comment est-ce que ce cantonnement sera fait. Pour le moment ce n’est pas encore le cas, mais normalement, ça doit pouvoir se faire rapidement.
Algatak, (GATIA : La Plateforme est fin prête. Nous avons proposé des sites de cantonnement et je pense que l’étude de ces sites a déjà commencé et la validation sera bientôt faite.
Sahelien.com : Quelle solution avez-vous trouvé pour le COMPIS 15 ?
Moussa Ag Acharatoumane (CMA) : Je pense que la CMA et même la Plateforme ont adopté la même position par rapport à l’existence de ces micro-mouvements qui n’ont pas lieu d’être et, qui sont en réalité, un handicap dans le cadre du processus actuellement. Nous l’avons fait savoir à la médiation internationale. Je pense que c’est une question qui est en train d’être traité au plus haut niveau. Normalement, des réponses doivent être dégagées très rapidement
Souleymane Ag Anara, Augustin K. Fodou