Avec la décrispation, on s’attendait à la composition de la Commission vérité, justice et réconciliation (CVJR). Elle est effective depuis mercredi puisque le conseil des ministres a publié la liste des membres de cette structure importante pour le retour.
Les ex-rebelles de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) seront représentés par une dame assez sulfureuse en la personne Nina Walett Intalou désigné comme 1re vice-présidente de la Commission vérité, justice et réconciliation. Nina Walett Intalou, âgée de 51 ans, fait partie des membres fondateurs du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) dont elle est membre du bureau exécutif.
Fille d’un infirmier-major de la gendarmerie réputé, issue de la puissante tribu des Idnane, cette militante élevée entre Kidal, sa ville d’origine, Gao et Mopti, part dès 1984 en Côte d’Ivoire avec pour mission de sensibiliser à la cause touareg les frères africains. Elle y épouse un riche homme d’affaires, dont elle aura trois enfants, reprend ses études et, une licence en droit public en poche, fonde, à 26 ans, sa société de construction, avec 250 salariés, qui lui assure le monopole de nettoyage des cabines téléphoniques d’Abidjan.
Divorcée, elle revient au nord du Mali. Mais, bien qu’élue maire de Kidal en 1997, Nina Walett Intalou n’a jamais pu exercer ses fonctions. “Les islamistes, qui commençaient à s’installer dans la région, ne voulaient pas d’une femme. A l’époque, ils venaient surtout du Pakistan et créaient les prémices des katiba [unités combattantes] ; les Algériens ne sont arrivés qu’en 2003, explique-t-elle. J’ai attendu huit mois. Tous les cadis et marabouts traditionnels avaient tranché en ma faveur. Mais finalement, c’est un homme qui a été nommé à ma place.” En guise de consolation, Alpha Oumar Konaré, alors président du Mali, lui offre un poste de conseiller territorial.
“Une grande haine contre Kadhafi”
On prête à la gracieuse et ambitieuse Nina, divorcée une deuxième fois et distinguée par un prix d’excellence américain, des amants célèbres, de Félix Houphouët-Boigny, son beau-frère, à Mouammar Kadhafi, alors qu’elle prend plusieurs fois la route de Tripoli à partir de 1998, pour rencontrer les Touareg maliens au service de l’ancien Guide libyen.
“Ah ça, je n’ai jamais été sa maîtresse !, s’offusque-t-elle. J’avais une grande haine contre cet homme quand je voyais comment il utilisait les Touareg pour combattre au Tchad ou ailleurs. Kadhafi les trompait en leur disant qu’ils faisaient partie de l’armée libyenne, mais en réalité, ils étaient maltraités”.
Proche du chef militaire du MNLA, Mohamed Ag Najim, elle voue une haine toute aussi tenace au Touareg malien Iyad ag Ghali, devenu chef du groupe islamiste radical Ançar Eddine, allié à Aqmi.
“En 1990, [lors de la première révolte touareg], il était notre leader, raconte-t-elle. Ensuite, il a voulu être le secrétaire général du MNLA, mais nous avons refusé, car il avait déjà des liens avec Aqmi, je ne sais pas si c’est par conviction ou par opportunisme, sans doute les deux”.
Maliki Diallo avec Le Monde
La titraille est de la rédaction