La CMA et la Plateforme, longtemps des groupes armés rivaux se disputant dans de nombreuses localités des régions nord du pays, viennent de conclure, jeudi dernier, dans un esprit bon enfant, un pacte d’honneur, qualifié de tel par tous les protagonistes, dans le but immédiat d’enterrer la hache de guerre et de pacifier plus durablement les enfants du pays entre eux. Un pacte d’honneur, scellé en faveur de la paix, fruit de plusieurs semaines de pourparlers directs, qui fera désormais que plus rien ne sera comme avant dans cette région du pays.
« La paix n’est pas un mot, c’est un comportement », selon la formule devenue célèbre du vieux Président ivoirien. C’est en cela que se sont attachés les responsables de la CMA et des forces patriotiques, deux groupes armés rivaux, qui viennent de signer le plus solennellement du monde un pacte d’honneur en faveur de la paix. C’était le jeudi dernier, à la suite de plusieurs jours de discussions, plus exactement on parle de trois semaines, entre les deux camps, qui se sont déroulées dans la localité d’Anéfis.
Cette annonce triomphante en faveur de la paix a été faite par les responsables des deux camps. Pour Ahmoudène Ag Iknass, député de Kidal, côté Plateforme, c’est désormais clair: «Nous avons organisé des négociations directes entre nous. Nous avons terminé la rencontre, tout le monde a fait la paix, à commencer par nous, de la Plateforme, et la CMA ». Côté CMA, c’est la même ambiance: «La guerre est derrière nous. La Plateforme et la CMA ont fait la paix, mais les autres tribus ou groupes qui avaient des problèmes entre eux ont aussi fait la paix », a affirmé Boubacar Ould Hamadi de la CMA.
Les deux groupes armés, qui se sont dernièrement affrontés à Anéfis, et qui a failli faire capoter le processus de paix, ont donc, par ce pacte d’honneur qu’ils viennent de signer, donné à la paix toutes ses chances de se réaliser durablement. Ce n’est donc par pur hasard que le Président IBK, on le sait, avait sollicité, il y a quelques semaines, des forces patriotiques de quitter la ville d’Anéfis, reprise aux mains de la CMA. Face à cette occupation, la CMA avait du coup décidé de suspendre sa participation aux travaux du Comité de suivi de l’accord, à peine débutés et peinaient d’ailleurs à se concrétiser.
Ayant ainsi pris le contrôle de la ville, le 17 août, pour obtenir une décrispation du climat, le Président IBK, devant les difficultés des médiateurs internationaux et la Minusma, avait réclamé le retrait de la Plateforme sans condition de cette ville. Après s’être refusé à tout compromis sur la question, en un premier temps, les forces patriotiques ont ensuite évacué la localité qui du reste à été de nouveau reprise par la CMA, le 18 septembre. Voilà la vision du Président IBK en faveur de la paix, lorsqu’il s’engageait auprès de la Plateforme, au plus fort de la crise à Anéfis, pendant qu’une certaine frange de l’opinion publique y était défavorable, qui s’est alors concrétisée en de véritables retrouvailles fraternelles entre les deux camps, dont les principaux ont décidé aujourd’hui de se retrouver entre eux pour faire la paix définitive.
A ces pourparlers d’Anéfis, comme l’ont rapporté de nombreux témoignages, ce sont quelques centaines de personnes de la société civile, des notables, des associations de jeunes et de femmes qui ont tenu ce rendez-vous de la paix. Tous les chefs militaires des deux côtés étaient également présents pour discuter et affronter les points de vue dans la perspective heureuse de signer un pacte d’honneur de cessez-le-feu et de paix.
Aucun doute là-dessus : qu’il s’agisse de l’un, ou de l’autre camp, au-delà des efforts déployés par les différents médiateurs internationaux, on reconnait que la paix définitive ; une résultante de ce pacte d’honneur, a été aujourd’hui possible grâce aux négociations directes, engagées par les groupes armés rivaux.
Le jeu en valait la chandelle, en ce sens qu’au cours de tout le processus de paix, symbolisé par la signature de l’accord de paix par les deux camps, le chef de la MInusma, Mongui Hamdi, a toujours déclaré que la paix définitive sera conclue par les Maliens eux-mêmes, lesquels feront leur paix dont le processus ne se fera qu’accompagner par les autres.
En définitive, c’est ce que les responsables de la CMA et des forces patriotiques viennent de démontrer dans un acte pur, en faveur de la paix durable dans le pays.
A en croire leurs propres estimations, la guerre est désormais derrière nous. Chacun des représentants des deux camps l’a dit en sa matière.
Pour Mamadou Djeri Maïga, au compte de la CMA, la « CMA et la Plateforme ont harmonisé leurs positions. Ils ont aussi accepté de faire des missions conjointes de sensibilisation sur le terrain. Ils ont accepté que la libre circulation des biens et des personnes soit une réalité.
De son côté, Fahad Ag Almahamoud de la Plateforme estime que « tous les dossiers ont été discutés dans leur grand ensemble et qu’il il y a eu une entente entre tous les fils du nord, voir tous les fils du Mali pour qu’on attaque les vrais défis du pays qui sont l’éducation, le développement et le bien-être du peuple Malien en général ».
Le résultat de ces négociations directes entre les deux camps est désormais là : les deux protagonistes de la crise malienne ont donc harmonisé leurs visions. Ce qui a abouti à un accord signé par les deux parties, depuis jeudi dernier à Anéfis.
Pour rendre crédible ce résultat, obtenu après plusieurs jours de pourparlers, à Anéfis, loin de Bamako, les responsables des deux parties ont tenu à faire, dès le matin du vendredi dernier, le bilan des échanges qu’ils ont jugés fructueux et positifs.
«L’objectif affiché ? Se mettre en accord pour que nous Maliens sachions ce qu’il faut défendre devant la communauté internationale qui est venue nous aider. Et que nous Maliens sachions la manière dont la communauté internationale va nous aider ». C’est ce qui ressort des propos des différents responsables des deux camps qui ont décidé d’harmoniser désormais leurs visions en vue de parler et d’agir d’une seule voix au nom de la paix retrouvée dans le pays.
La Minusma, qui suit toutes ces avancées en faveur de la paix, n’a pas trainé pour agir positivement en faveur de ce pacte d’honneur de la paix. Dans un communiqué, la mission onusienne a salué « la série de rencontres tenues à Anéfis, entre la CMA et la Plateforme» et en a conclu à un «développement qui constitue une étape qualitative dans le processus de paix inter-malien».
Même si le gouvernement n’a pas encore officiellement réagi à cela, il ne saurait tarder à le faire d’autant que cette volonté de paix, par les Maliens, et pour les Maliens, ainsi réalisée, à travers ce pacte d’honneur entre la CMA et les forces patriotiques, pour une paix définitive au pays, n’est pas un fait du hasard, car trouvant son fondement dans les ressorts culturels ancestrales de notre vivre ensemble.
Par Sékouba Samaké