En plus des nombreuses incertitudes qui l’entourent, la résolution 2085 de l’ONU sur le Mali ressemble à une trouvaille hâtive des dirigeants du monde. Dans sa forme et dans son fond, elle mettra du temps pour produire les effets escomptés. Un éléphant blanc ?
L’adoption, à l’unanimité, de la résolution 2085 par le Conseil de sécurité de l’ONU, le jeudi 20 décembre 2012, a été accueillie par un ouf de soulagement au Mali et à travers le monde. Et pour cause : le dossier malien avait longtemps traîné sur la table des décideurs du monde sans motifs valables.
La consolation des uns et des autres est cependant teintée d’inquiétudes et d’interrogations, car la résolution sur la crise malienne a sonné comme un « bon débarras » pour l’ONU. Comme si tout avait été colmaté à la hâte, beaucoup de zones d’ombre entourent ce projet. Et même l’euphorie qui a suivi son adoption a eu du mal à cacher les incertitudes sur l’engagement indispensable de certains partenaires de notre pays dans le dénouement de l’une des plus graves crises de l’Histoire du Mali.
L’un des points clés de la résolution 2085 est l’engagement par le gouvernement malien de transition de négociations « crédibles » avec les groupes présents dans le Nord et qui ont pris leurs distances avec les organisations terroristes telles que le Mujao et Aqmi. Ce qui implique une collaboration sincère entre le Mali et ses « amis sérieux » l’aidant à rétablir son intégrité territoriale et la dignité de ses fils dans un pays laïc et démocratique.
Cependant, en dépit de son rôle déterminant dans la crise malienne, Alger continue de fouler au pied les règles élémentaires de la diplomatie. En engageant unilatéralement le dialogue avec les rebelles du MNLA et d’Ançar Eddine, Abdelaziz Bouteflika a superbement méprisé la Cédéao dont le médiateur dans la crise malienne, le président Blaise Compaoré, n’a pas été associé aux échanges alors que ce dernier avait déjà engagé des négociations avec les deux groupes. L’Algérie veut tout simplement imprimer sa marque aux efforts de paix au Mali avec un brin de recettes colorées à sa propre saveur.
Une longue attente en vue !
Un procédé contre lequel le secrétaire d’Etat sortant des Etats-Unis, Hillary Rodham Clinton l’avait avertie tout en l’invitant à contribuer efficacement et ostensiblement à la lutte contre les terroristes et les bandits armés au lieu de les renforcer dans l’ombre. A peine l’ancienne sénatrice de New York a tourné le dos, le régime algérien a commencé à appliquer ses propres plans, qui ne rappellent que les « accords bâclés d’Alger » en 2005.
L’instauration d’un « dialogue politique pour rétablir pleinement l’ordre constitutionnel » et l’organisation des élections avant « avril 2013″ constituent d’autres détails importants de la résolution 2080. L’ONU a certainement lancé une pierre dans le jardin des ex-mutins de Kati, surtout après l’atterrissage forcé de l’ex-Premier ministre Cheick Modibo Diarra.
Cet aspect de la résolution onusienne exige simplement le retrait définitif des militaires de la scène politique alors que le capitaine Amadou Haya Sanogo, s’expliquant sur les conditions du départ de l’ex-chef du gouvernement, a prouvé que son influence était inégalée dans l’évolution de la situation politique au Mali. Avec de nombreuses concessions, la médiation de la Cédéao, à travers l’accord-cadre, a mis sur orbite le président du Comité militaire de la reforme et de suivi des forces de défense et de sécurité (CMRSFDS).
Et l’exigence de la fin de l’ingérence des militaires dans les affaires politiques démontre également que l’ONU a pris le train en marche. Dès les premières heures de la chute d’ATT, elle aurait dû épauler la Cédéao dans sa quête de pistes pérennes. De la façon dont la fin de l’interférence politique des ex-putschistes est très peu probable, l’organisation d’élections avant avril 2013 relèverait du miracle. Le Mali n’est pas prêt à consacrer sa partition en organisant un scrutin sans ses régions occupées.
L’intervention militaire au Nord-Mali demeure le grand mystère de la résolution onusienne. Pendant que nos compatriotes vivant sous occupation souffrent des pires formes d’exactions, les décideurs du monde ne prévoient pas une opération militaire dans un futur proche.
L’ONU souhaiterait prendre tout son temps pour préparer l’armée malienne ainsi que les forces de la future Mission internationale de soutien au Mali (Misma), qui devront montrer des signes de satisfaction avant l’assaut contre les envahisseurs. Une course de longue haleine dont l’issue reste des plus incertaines.
Selon le schéma de l’ONU, le chemin menant à la libération du Nord-Mali est d’autant plus long que des sources concordantes indiquent que seulement une infime partie des 200 millions de dollars requis annuellement pour le financement de l’opération militaire au Mali est disponible à ce jour.