Le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, poursuit sa visite d’Etat en France. Visite à pas de charge qu’il a entamée depuis le mardi 20 octobre 2015. Au cours d’une conférence de presse qu’il a co-animée avec son homologue français, François Hollande le mercredi 21 octobre, le président de la République, au détours d’une question portant sur ses éventuels liens avec l’homme d’affaires corse, Michel Tomi, a dégainé contre ses détracteurs, intérieurs comme extérieurs, qu’il accusent à mots couverts de ne pas aimer le Mali.
C’est une question du journaliste de RFI, Boniface Vignon, qui a donné l’occasion au chef de l’Etat de répondre à ces détracteurs extérieurs qui sont les journalistes de Médiapart et intérieurs que sont ses opposants. La question du confrère était la suivante : « Vous avez été écouté de façon incidente par la justice française dans le cadre de l’enquête visant l’un de vos amis, l’homme d’affaires Michel Tomi, mis en examen pour 17 chefs d’inculpations dont celui de corruption d’agents publics étrangers, d’après les révélations de notre confrère du Médiapart. Et vous avez déclaré : ‘’ je l’ai toujours dit, on peut essayer de déstabiliser un homme, mais si cet homme a la foi, si cet homme a le soutien de ceux qui le connaissent et qui croient en lui, c’est peine perdue’’. Pensez-vous encore M. le président que cette affaire a été ouverte pour vous déstabiliser et ensuite, l’avez-vous abordée avec le président Hollande ? ».
La réponse du chef de l’Etat a été d’abord d’apprécier le confrère. « Monsieur, vous êtes un grand journaliste ». Imperturbable, IBK a répondu d’un ton martial : « je reste droit dans mes bottes ». Il a ensuite expliqué comment il a fait la connaissance de l’homme d’affaires corse. « Ce monsieur dont vous avez parlé (Michel Tomi), nous a été présenté par un homme dont je respecte la mémoire, le président El Hadj Oumar Bongo. Ce jour à aujourd’hui, s’est tissé entre nous des relations d’amitié et de fraternité au-delà desquelles relations, il n’y a jamais eu des relations d’affaires. M. Tomi a un casino à Bamako qui a été ouvert dans les conditions absolument claires, transparentes, vérifiables. Et, IBK que je sache n’était pas pilote du Mali. J’ajoute également que vous pouvez vérifier, ce monsieur a beaucoup d’affaires en Afrique, mais au-delà du casino, il n’en a aucune au Mali. Et, aucune sous IBK, bien évidemment. Je n’en dirai pas plus. Quelqu’un a dit que certaines choses doivent mourir de leur propre venin. Ces choses-là sont connues, celle que vous avez évoquée est de celles-là ».
Fier du score obtenu à la présidentielle de 2013, le chef de l’Etat préfère opposer la confiance du peuple malien à ceux qui tentent de le noyer sous la souillure. « Cet homme-là est connu par son peuple. Pensez-vous qu’au sortir d’une crise de 3 ans, s’il avait été celui-là qu’on essaye de noyer sous la souillure, aurait été plébiscité par le peuple malien, qui est un peuple qui sait les vertus de l’honneur et la dignité, qui tient à l’intégrité de ses hommes d’Etat ! ».
La résidence de Sébénicoro construite par IBK et son épouse
Depuis son élection, les travaux de réhabilitation qui se tiennent dans sa concession privée ont aussi défrayé la chronique. Des voix ont laissé entendre que c’est avec les deniers publics que le président de la République s’est payé le luxe de réhabiliter cette résidence princière. A-t-il imité en la matière son homologue Sud Africain, Jacob Zuma, qui est aussi tourmenté par ce genre de scandale ? IBK ne porte pas là des gants face à ses détracteurs : « IBK, président du Mali, depuis deux ans, vit dans la maison de son père, et les Maliens le savent. Là aussi, il a été dit des choses monstrueuses. Cette maison a été construite denier par denier, par moi et mon épouse et par prêt bancaire vérifiable, traçable ! Je mets quiconque au défi de dire le contraire. Dès lors, dès lors, il est courant de dire chez nous que même le Prophète (PSL) n’a pas été à l’abri de la calomnie la plus odieuse. Qui suis-je moi ? Simple mortel ! »
N’en déplaise à ceux qui croient lui montrer le chemin et ceux qui lui ont même étalé avec preuves à l’appui qu’il a des liens avec une mafia corse, IBK affirme qu’il suit son chemin, après tout.
« J’ai mon cap, personne ne me fera dévier ! Et j’ai le bonheur de compter sur l’estime de mes amis, dont certains (que je ne citerai pour ne pas gêner) dès le lendemain, ce à quoi vous faites allusion, me l’ont dit avec la plus vive amitié, et j’en ai été vivement soulagé. Voilà pourquoi je suis à l’aise. Je continue mon vol. »
Dès mercredi, jour où il est reçu en grande pompe à l’Elysée, le site français Médiapart qui avait publié des conversations qu’IBK a eues avec Tomi, écrivait encore « que même intouchable par le fait de jouir d’une immunité internationale, IBK, le président malien est cerné par des juges anti-corruption et son nom s’est retrouvé dans plusieurs rapports d’enquêtes de la police de Paris ».
Et à ce propos IBK a vivement réagi : « ça continue d’ailleurs ! On a même essayé de saboter cette visite à Paris, mais peine perdue ! »
Et spécifiquement, comblé sur la chaleur de cet accueil et les honneurs rendus à lui et son pays, le président IBK interroge : « Qui au Mali, digne de la qualité de malien, n’est pas fier de ce qui a été réservé au Mali ? » A François Hollande, « je vous le dis, cher ami François, j’en suis le récipiendaire, mais c’est bien mon pays que vous avez fait l’honneur, qui est rare ici en France dans la hiérarchie du protocole d’Etat. C’est au Mali que vous avez fait cet honneur. Votre ami IBK de manière incidente… » IBK de conclure : « Je souffre qu’on n’aime pas IBK, je ne souffre pas qu’on n’aime pas le Mali… »
A. Diakité