Il existe partout au Mali une pratique vieille de plusieurs siècles le « Korofurali » : Le neveu ou la nièce va saluer chez son oncle maternel, la famille de ses cousins et de ses cousines, il y reçoit après de petits travaux automatiquement et obligatoirement de nombreux cadeaux (moutons, poules, or, argents, bijoux ou autres.) Une pratique à la limite banale voire rocambolesque mais d’une immense portée sociale : elle rappelle la famille, permet de souder les liens de parenté, garantit la solidarité et l’amour entre les parents, les cousins d’une famille.
« Korofurali » ou dion mina kalo (Dion mina kalo est le premier mois de l’année musulmane.) est malheureusement entrain de disparaître de nos mœurs.
Le Korofurali Kalo précède le mois de la fête de tabaski. Le Prophète Mahomet (Paix et Salut sur Lui) a recommandé de jeuner le 10ème jour de ce mois (Dion mina kalo). « En jeunant ce jour, Dieu annulera les pêchés d’un an du musulman. » Korofurali fait partie de nos coutumes, il n’est pas prescrit par l’Islam, précise l’Imam Salim SACKO. Korofurali commence le 10ème jour du mois de Dion mina kalo.
Korofurali est un trait de notre identité culturelle, une pratique aimable qui rend la vie en société très agréable !
Selon Sounkalo TRAORE, Conseiller Communal de Dianguirdé (cercle de Diéma) la disparition du Korofurali sera une grande perte pour notre société. Dans le temps, poursuit le quadragénaire, si le Korofurali kalo ou Dion mina kalo commençait, on l’annonçait en battant le grand tabalé (tambour) du village. Actuellement, le Korofurali n’existe plus.
Mariam CAMARA, Ménagère, regrette la perte progressive de la coutume « Il n’y a plus de Korofurali, c’est fini. Quand tu pars chez ton oncle maternel, les jeunes ne semblent plus enchantés par la pratique, tu ne gagnes rien, tu te sens ridicule, on cesse d’y aller ! »
Avant, dit un autre, quand je partais chez mes oncles, je reviens bourré de cadeaux et comblé par l’enthousiasme de l’accueil, maintenant il n’y a plus d’ambiance ! C’est mort depuis la mort de mon oncle! »
Bintou DIANE, vendeuse de pomme à Diéma nostalgique rappelle : « Je restais souvent deux à trois jours chez mon oncle. la femme de mon cousin me faisait travailler dur. Elle disait que c’est normal, je suis leur ânesse entre deux éclats de rire. Je préparais le couscous, transportais de l’eau, lavais les ustensiles de cuisine, balayais la cour. Elle me faisait de petites scènes de jalousie, …ton cousin te mariera, tu me remplaceras dans le foyer, tu sauras en ce moment que ce n’est pas facile, ce n’est pas comme se promener, mais au moment de rentrer à la maison, mon oncle, son épouse et mes cousins me chargeaient les bras des bijoux ou objets précieux, de beaux vêtements, oui, je ne regrettais pas avoir été « l’ânesse » de la maison pendant ces quelques jours ! »
Lamine WAGUE, Président ASACO Tinkaré à son tour de regretter ce passé « C’est dommage, nous avons perdu ce qui nous était de plus cher, de plus valeureux : Le korofurali, une bonne pratique. C’était une manière de faire savoir à l’enfant qu’il appartenait à telle famille. Si le fils de ton oncle, ton kalimé (ton noble) se mariait, c’est toi qui l’accompagnais, tu étais traité comme une reine ou un roi. De nos jours tout cela a disparu. Si tu vas chez un oncle qui a les moyens, il peut lui même penser que tu es venu chercher quelque chose. » Par contre pour d’autres aller chez son oncle pour cela est une bassesse, c’est aller quémander seulement.
Korofurali commence le 10 ème jour du mois Dion mina kalo. Pour l’annoncer dans le village, les femmes renversaient leurs jarres de calebasses et les tapaient. Dès que le bruit kurubu kurubu retentissait, alors commençaient les randonnées dans le village. Les neveux et les nièces se précipitaient vers les maisons de leurs oncles maternels où les enfants de ceux-ci, leurs kalimés (leurs nobles). Dans certains milieux, la coutume voulait que l’enfant rende visite au frère de la coépouse de sa mère, plutôt que le frère de sa propre mère. Et inversement, le frère ou la sœur de la coépouse allait chez la coépouse de leur sœur. Korofurali permettait ainsi de montrer à l’enfant les parents de sa mère pour que ceux-ci aussi fassent la connaissance de leur neveu ou nièce.
Korofurali est une pratique ancestrale, très originale et très symbolique qui marque d’un sceau particulier notre riche culture. Nous nous devons de la ressusciter pour garder notre identité et souder nos liens de sang.