Malgré les médiations à répétition, rien n’est réglé et la junte n’entend pas céder la place malgré les engagements souscrits. Les événements du 30 avril/1er mai 2012 ont ajouté à la confusion. Et les propos de Modibo Diarra, lors de son adresse à la Nation le mercredi 2 mai 2012, n’ont pas permis d’y voir plus clair.
« Nous avons assisté, a-t-il déclaré, à une tentative de déstabilisation du pays ces dernières 48 h qui se sont soldées par une victoire, en tout cas temporaire, pas complète encore, de notre armée et de nos forces de sécurité ». « Déstabilisation » dont le Premier ministre ne dit rien, si ce n’est qu’elle serait le fait « d’éléments en civil et armés ».
Ce discours qui laisse penser que Diarra et la junte sont sur la même longueur d’onde – il y a eu un « contre coup d’Etat » -, ce qui ne manque pas d’être… déstabilisant puisque, justement, la nomination d’un gouvernement très majoritairement civil et dans une configuration « Tout va très bien Madame la Marquise » résultait du retrait de la junte de la scène politique. Or, il n’en est rien.
La preuve en est qu’à l’occasion du premier conseil des ministres (30 avril 2012), Diango Cissoko a été chargé de « mener la discussion avec le Comité national de redressement de la démocratie et de la restauration de l’Etat (CNRDRE, junte militaire) sur le rôle qui doit être le sien pendant la transition ». Ce qui implique que le CNRDRE est toujours en place et qu’il ne veut pas la céder.
Le deuxième acte posé par le navigateur interplanétaire qui dénote de son assujettissement à la junte militaire a eu lieu le 7 mai 2012 quand le Premier ministre recevait les élus du Nord venus plaider la cause de leurs semblables actuellement soumis à toutes sortes de barbaries inhumaines. Cheick Modibo Diarra aurait dit que notre pays ne veut pas de la Cédéao parce que l’intervention de ses troupes au Nord pourrait entraîner des charges financières insupportables actuellement par le budget national.
Un argument bien maquillé qui se situe dans la même logique que le CNRDRE, lequel a vivement protesté contre l’envoi des troupes étrangères au Mali le 27 avril 2012, c’est-à-dire au lendemain du sommet des chefs d’Etat de la Cédéao, tenu à Abidjan où la décision fut prise d’envoyer des troupes dans notre pays non seulement pour sécuriser les institutions de la transition et participer à la reconquête de l’intégrité territoriale.
Ces propos n’ont pas manqué de mettre une bonne partie de l’opinion en colère, notamment les ressortissants du Nord-Mali à Bamako et le FDR qui trouvent que c’est une manière pour le PM de « se foutre des populations du Nord ». D’ailleurs celles-ci semblent avoir compris le message et s’organisent pour une auto-défense. Les échos des événements passés à Gao et Tombouctou en début de semaine en est une preuve.
Beaucoup de gens se posent la question de savoir si Cheick Modibo Diarra est bien informé quand il ne sait pas que les troupes de la Cédéao ne sauraient être à la charge financière du Mali ! L’intervention de ses troupes doit coûter 225 milliards de F CFA à la Cédéao qui pourrait bénéficier de l’appui de ses partenaires comme l’Union européenne, les USA. La Cédéao a ensuite décidé à Dakar que le déploiement de cette force sera conditionné à la demande des autorités maliennes. Mais si celui qui doit faire la demande est déjà dans un tel état d’esprit, inutile de dire que la venue des troupes libératrices de la Cédéao n’est pas pour demain.
Or, il est d’une évidence criarde que sans la Cédéao derrière laquelle est tapis tout le reste de la communauté internationale, la libération du Nord relèvera d’une utopie. Si le Premier ministre et son allié CNRDRE soutiennent que le Mali n’a pas besoin de troupes, mais de la logistique, pour chasser les bandes terroristes qui foisonnent notre septentrion, alors comment atteindre cet objectif sans l’appui de la communauté internationale ?