Le réseau de microfinance Kafo Jiginew a dilapidé près d’un milliard de nos francs entre 2003-2010, et accumulait au même moment plus de 3 milliards de francs de crédits impayés dont le remboursement est totalement compromis à plus de 50 %.
Après Jemeni, Kafo Jiginew, le supposé leader qui détiendrait plus de 30 % du marché de la microfinance au Mali, se porte très mal et se bat pour sa survie. Les causes sont lointaines et connues : défaillance du système de contrôle interne ; croissance mal maîtrisée ; faible niveau de formation de la plupart des employés ; manque de professionnalisme ; corruption ; enrichissement illicite des dirigeants ; népotisme ; gabegie financière. En somme, une très mauvaise gestion de la Direction générale qui est passée maîtresse dans l’art de contourner les problèmes et de faire du pilotage à vue ; cela sous l’impulsion, au vu et au su d’un conseil d’administration corrompu, à la solde du directeur général. Lequel ne se soucie «que» de son image. La preuve, il a acheté le trophée d’argent du Cinquantenaire d’Or dans la catégorie Affaires de la décennie 2000-2010, pour plus d’une dizaine de millions de francs CFA.
Pour ainsi dire, le réseau Kafo Jiginew est le théâtre des maux en tout genre et c’est à croire qu’il s’est spécialisé dans le gaspillage des ressources financières des pauvres sociétaires dont l’épargne n’est plus sécurisée depuis belle lurette. Selon nos investigations, depuis près de 5 ans, Kafo Jiginew accumule les déficits. Son sport favori est devenu le tripatouillage des chiffres, afin de leur faire dire ce qu’ils ne disent pas (nous reviendrons sur le dernier rapport de la CIF). Malgré tout, le réseau continue à faire du tape-à-l’œil à coups de publicités et d’annonces mal à propos, de déclarations mensongères et d’apparitions publiques fallacieuses.
De fait, le siège du réseau, les véhicules de luxe, les tapages médiatiques, les constructions de caisse à l’emporte pièce, tout ceci n’est qu’une façade, un château de cartes : un luxe que Kafo ne doit pas se permettre. Selon plusieurs sources concordantes, le premier indicateur de la mauvaise gestion de l’institution est constitué par les crédits impayés qui se chiffraient à plus de 3 milliards de francs (entre 2003 et 2010). Cette somme colossale d’argent n’est autre que l’épargne des pauvres sociétaires, transformée en crédits dont le remboursement est totalement compromis à plus de 50 %.
Les causes en sont la violation des procédures, les mauvaises pratiques d’octroi de crédits, les malversations financières et autres détournements. Par exemple, la caisse a octroyé plus d’un demi-milliard à une seule personne, toute chose qui jure avec les règles en la matière. Quant aux détournements, ils sont perpétrés un peu partout dans le réseau, tant du fait des élus que des techniciens salariés ou prestataires dont les salaires sont dérisoires. L’idée répandue dans les esprits de ceux-ci est que l’élite se taille la part belle du gâteau et la grande majorité doit se contenter des miettes. C’est pourquoi, il y a eu plusieurs malversations financières et mauvaises pratiques d’octroi de crédits pour près de 1 milliard entre 2003 et 2010. En voici quelques exemples, en attendant de revenir (pour des impératifs de bouclage) sur les autres cas.
Ainsi, dans la zone de Dioila, plus de 240 millions ont été détournés entre 2003 et 2004 par des élus et techniciens. Les Koutialais (habitants de la ville de Koutiala) se souviennent encore de l’ex-inspecteur général du réseau et ses complices, qui ont réussi à soutirer plus de 200 millions à l’institution pendant six ans avec des pratiques simplistes et cela sous la direction de l’actuel directeur général, qui n’y a vu que du feu. En fait, le système informatique de la boîte était une passoire.
À ceux-ci s’ajoutent, l’affaire de la coopérative «Jama jigi» de Zangasso, zone de Koutiala, où de faux crédits ont été mis en place pour plus de 200 millions ; les cas des guichets de Falaco, Djoumanzana et Markacoungo où plus de 100 millions ont été dilapidés avec de faux crédits individuels accordés aux femmes. En outre, le gérant de la caisse de Fana a délesté en 2008 la caisse de plus de 27 millions. Celui de Massigui a marché sur ses brisées la même année en dérobant 18 millions de francs CFA.
La liste n’est pas complète. Il y a eu aussi l’affaire des mauvais crédits de Kléla, zone de Sikasso, où plus de 83 millions ont été dilapidés. Les auteurs n’ont nullement été inquiétés. Au contraire, ils ont même eu droit à un traitement de faveur, parce que les principaux instigateurs étaient le vice-président du conseil d’administration de l’Union et le fils du président du même conseil. Alors que deux agents avaient été remerciés à cause de 5 000 FCFA, dans la zone de Fana.
Ça fait déjà combien de millions ? Pourtant, le compte n’y est toujours pas. Affaire à suivre.