Les membres de la Commission Vérité Justice et Réconciliation du Mali devraient être présentés à la presse malienne jeudi prochain. Composée de 15 commissaires, cette commission fait l'objet de nombreuses critiques de la part des organisations de défense des droits de l'homme. Selon elles, « sa composition accorde une place de choix aux groupes armés, au détriment des victimes ».
Actuellement les membres de la commission, qui ont été nommés récemment, se préparent à leur mission en suivant des formations. C'est dans ce contexte que des organisations de défense des Droits de l'Homme ont sévèrement critiqué hier dans l'émission Grand Dialogue de Studio Tamani, la composition de cette commission estimant n'être pas en mesure « de lui faire confiance ».
« La composition de la commission devrait reposer sur des critères de confiance », estime Me Moctar Mariko, le président de l'Association Malienne des droits de l'Homme.
« Malheureusement », confesse-t-il, « ce n'est pas le cas au Mali ». L'avocat président de l'AMDH regrette que « cette commission ne comporte aucun représentant de victimes ou de leurs familles ». Selon lui, c'est une « volonté politique affichée ». Cela « nous fait un peu peur » s'inquiète Me Mariko, s'interrogeant sur la capacité de la commission à remplir sa mission.
Me Moctar Mariko met notamment en cause le choix de « personnes sur lesquelles pèsent des soupçons », tout en indiquant qu'aucune consultation n'a été faite du coté de la société civile et des organisations impliquées depuis longtemps dans la défense des victimes.
Les réserves de l'AMDH sont également partagées par Amnesty International Mali et son Directeur, Saloum D Traoré, qui constate une forme de surreprésentation « des belligérants » . Selon lui, il faut au contraire des personnes qui se soucient des victimes et de leurs droits à être dédommagés. Un rapport du Réseau des défenseurs des droits de l'homme a recensé 1000 victimes de la crise au Mali.
La composition de la commission est plus proche d'une commission de réconciliation que d'une commission vérité, justice et réconciliation. C'est la lecture faite par le directeur exécutif d'Amnesty international au Mali. Pour lui, « le choix des membres devrait s'appuyer sur des personnes qui ont le souci de la douleur des victimes ».
Saloum D Traoré est directeur exécutif d'Amnesty international au Mali. Il était invité de l'émission « Grand Dialogue » d'hier.
« Lorsque j'ai vu la commission, la première idée qui m'est venue en tête c'est la question de savoir si je suis en face d'une commission de réconciliation ou d'une commission vérité, justice et réconciliation ? Parce qu'il y a une nuance. Et qu'est-ce-que je vois, à part quelques éléments d'une société civile, tout le reste ce sont les belligérants, ceux-là mêmes qui étaient en train de combattre. C'est comme si on les mettait ensemble pour dire : écoutez, réconciliez-vous. Et puis on a emmené quelques personnes choisies, je ne sais comment, pour représenter la société civile. Mais il faut aussi reconnaître qu'il y a certaines personnes qui sont méritantes dans cette commission. Mais nous étions vraiment surpris, parce que pour nous il ne s'agit pas vraiment d'avoir seulement des gens qui viennent bavarder dans cette commission, il s'agit de prendre dans la société les gens qui se soucient des victimes ».