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Edito : Nous sommes tous des « petits messieurs »
Publié le jeudi 29 octobre 2015  |  Le Républicain




Un certain vendredi noir, 22 mars 1991, alors que les manifestants avaient cette longue journée durant, essuyé les tirs de ses forces lancées dans la rue à la recherche des « petits récalcitrants », le peuple malien croyait encore, à ce qui n’était qu’un mirage : la capacité d’écoute du chef de la Magistrature suprême, et ses qualités intrinsèques de réaliser le sursaut demandé, à la satisfaction générale. Après de longues heures d’attentes et de vains espoirs, la déclaration attendue n’était que proportionnelle au courroux infernal du Général Moussa Traoré (Gmt), alors que tout un peuple était suspendu à ses lèvres : « je mettrai une couronne d’enfer sur vos têtes, si vous n’arrêtez pas… », disait le président Moussa Traoré aux opposants à son régime. Les démocrates revendiquaient le pluralisme au Mali, qui n’est qu’une reconnaissance de la diversité des opinions, la conquête pour le pouvoir, alors que le président voulait tout faire à sa seule guise. Samedi 24 Octobre, soit 24 années après, le président Ibrahim Boubacar Kéita, un produit du contexte démocratique, dit de ses opposants, et devant les Maliens de France, dans la salle de conférence de l’hôtel Westine : « ni tè politiki yé, malobaliya do ». Ces propos des présidents Ibk et de Moussa Traoré ont en commun de manquer de respect, de mépriser leurs opposants. Mais si cela pouvait se comprendre de la part de Moussa Traoré, qui n’était pas un démocrate, c’est incompréhensible de la part d’un homme qui prétend avoir mené « 50 années de combat démocratique » (Ibk à l’aéroport de Bamako Sénou).

Mépris et intolérance sont des caractéristiques de la gouvernance actuelle, et le président les a crachés à la face des Maliens à Paris et à l’aéroport de Senou. Traitant ses opposants de « Malobaliw », Ibk est allé trop loin, comme Moussa Traoré, son «grand républicain », qui était allé trop loin en promettant de descendre l’enfer sur la tête de ses manifestants.

Ibk n’a que transporté à Paris, sa bataille politique qui n’est qu’une réaction inappropriée aux demandes de clarifications des marchés douteux passés sur les tracteurs, pour mieux assujettir les masses paysannes ; d’explication des tripatouillages pour vendre la place du cinquantenaire ; ainsi que les concertations demandées par l’opposition autour de l’accord pour la paix. Cette diversité d’opinions, et cette liberté d’expression (lire article 19 de la déclaration universelle des droits de l’homme) usées de plein droit ont conduit à les traiter de « petits messieurs ». L’indignation est à son comble au Mali, aujourd’hui sur cette question, le président et son gouvernement sont isolés. Et nous sommes tous des « petits messieurs », tous ceux qui se sont sentis insultés par ce malheureux propos présidentiel. Tous les Maliens et tous les démocrates à travers le monde, qui ont été choqués par cette « dérive affligeante », comme l’a si bien souligné, Souleymane Koné, vice président des Fares Ankawili, nous sommes « des petits messieurs ».

B . Daou
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