Un mouvement politique dénommé Front malien patriotique pour le salut (Fmps) vient d’être porté sur les fonts baptismaux. Dans cette interview, le président de ce Front, Boubacar Mintou Koné, dit vouloir mener le combat contre la mauvaise gouvernance, les dérives autoritaires et totalitaires du régime en place.
On peut savoir les raisons de la création du Front malien patriotique pour le salut ?
Boubacar Mintou Koné : Conscient que notre pays : après avoir accédé à la souveraineté nationale, il y a 55 ans, au terme d’une lutte héroïque menée par les pères de l’indépendance ; les acquis démocratiques de la révolution du 26 mars 1991 et les dérives ayant jalonné l’histoire moderne de notre pays ; la remise en cause rampante des valeurs morales et l’effritement des valeurs sociétales de notre pays ; la banalisation des repères sociaux et intellectuels de notre pays au profit de la démagogie et de la servilité mercantile ; la nécessité de valoriser les vertus de la vérité et du travail bien accompli pour une vraie justice sociale. C’est au regard de tout cela que nous, citoyens d’horizons divers, de culture plurielle, de profession différente et de toutes les couches socio-professionnelles, nous avons décidé de créer un mouvement politique. Et ce mouvement politique est dénommé «le Front malien patriotique pour le salut(Fmps)», avec pour emblème l’hippopotame sortant de l’eau.
Comment votre «Front» entend jouer sa partition dans le cadre du développement socio-économique du pays ?
Ce Front entend mener un vrai combat politique, car il y a urgence, parce que depuis 2012, notre pays traverse une profonde crise multidimensionnelle, qui a été marquée par l’occupation des 2/3 de son territoire par des narco-djihadistes, avec la complicité des mouvements armés de l’Azawad. Nous avons fait appel à l’intervention française que nous avons saluée. Le président IBK a bénéficié d’un plébiscite. Mais aujourd’hui, le désespoir, la mélancolie se trouvent beaucoup plus dans le cœur et dans l’esprit des Maliens. Ensuite, il nous a été imposé cet accord dit de paix qui n’est que là pour consacrer la partition de notre pays en 8 micro-Etats. À chaque que les Maliens font une avancée pour recouvrer l’intégralité de notre territoire, la Minusma nous frappe et agir en force d’interposition… Nous demandons à la France qu’elle s’investisse auprès de la milice internationale, c'est-à-dire la Coordination des mouvements armés de l’Azawad, afin qu’elle admette qu’il est temps que le drapeau malien flotte sur l’ensemble du territoire national. Le Front combattra, dénoncera toutes les mauvaises gouvernances ; toutes les dérives autoritaires, totalitaires. Le Front dénoncera les spéculations foncières, la mauvaise gestion de nos hôpitaux. Le Front sera cette sentinelle, cet organe de veille pour l’ensemble du peuple malien.
Vous militez au sein de la majorité ou de l’opposition ?
Le Front est ouvert à tous les courants idéologiques, à tous les individus appartenant à des confusions religieuses et à toutes les couches socio-professionnelles. Le Front n’est pas un parti politique parce qu’il n’a pas vocation, pour le moment, à conquérir le pouvoir. Il y aura des hommes et des femmes dans ce Front qui n’ont pas de mains pour applaudir. Nous avons plutôt des mains pour applaudir des gestes et des actes concrets, allant dans le sens du développement économique et social du pays.
Quelle va être la différence entre votre Front et les autres mouvements ?
Nous n’avons pas vocation à juger d’autres acteurs politiques sur la scène politique. Nous ne saurons nous arroger ce droit en disant que nous sommes différents d’un tel…Nous avons des objectifs bien précis qui restent le Mali, le développement économique et la bonne gouvernance. Nous n’avons pas vocation à noter les autres formations ou regroupements politiques.
Vous venez de dénoncer l’accord d’Alger, selon vous, qu’est-ce qui n’est pas bon ?
Dans l’accord d’Alger, nulle part on ne parle pas du président de la République. Il est dit dans cet accord qu’au niveau des Assemblées régionales, celui qui doit gérer, est élu au suffrage universel direct. Il a un pouvoir exécutif et législatif, et toutes les décisions que cet exécutif et législatif prendra ne pourront être contrôlées par le pouvoir central qu’à posteriori. Ce chef de l’Assemblée régionale, élu au suffrage universel direct, ne sera pas un jour en droit de dire qu’il a le même pouvoir que le président de la République ? Dans l’accord, il est dit que dans les régions du Nord, la justice sera faite par les cadis. Cela n’existe pas dans nos textes actuels. Il y aura une justice pour le Nord et une justice pour le Sud. Dans cet accord, il y a les germes de la partition de notre pays, de l’émiettement de notre pays en 8 micro-Etats. Cet accord constitue un danger pour l’homogénéité de la nation malienne.
Quelle appréciation faites-vous de l’accueil réservé par les Maliens au président IBK, qui revenait de sa visite d’Etat en France ?
Notre appréciation, c’est que nous avons applaudi Modibo Keïta. Le jour de son renversement, ce sont les mêmes Maliens, aux dires des acteurs, qui ont plus d’un mois soutenu les tombeurs de Modibo Keïta. Ce sont les mêmes Maliens qui ont applaudi la chute de Moussa Traoré. Ça a été le cas avec ATT. Voilà l’une des raisons de la naissance de ce Front. Il faut éviter le culte de la personnalité. Il faut mettre un terme à ça. Il faut que notre Etat soit un véritable Etat démocratique où les institutions fonctionnent normalement. Nous voulons un Etat démocratique. Nous n’en voulons plus de laudateurs, nous n’en voulons plus de pères de l’indépendance, nous n’en voulons plus de présidents providentiels. Nous voulons un président qui soit à l’écoute et qui réponde aux aspirations profondes des populations !
Diango COULIBALY