L`Unesco a envoyé à Bamako une mission de protection du patrimoine, menacé par la rébellion dans le nord du pays, et espère faire de même en Syrie, a indiqué vendredi un haut responsable de l`Organisation des Nations unies pour l`éducation, la science et la culture.
La situation est "très, très inquiétante" au Mali, notamment à Tombouctou (nord) où la profanation d`un des 16 mausolées de la ville début mai a "ouvert une nouvelle phase particulièrement préoccupante", a expliqué à la presse Francesco Bandarin, sous-directeur général chargé de la culture.
Une équipe de l`Unesco a entamé vendredi des discussions avec le gouvernement malien au sujet de la préservation des sites de Tombouctou et Gao.
L`Unesco n`a cependant pas de contact direct avec les rebelles qui contrôlent Tombouctou et ne peut pas s`y rendre. La situation sur place "a empiré à partir de la mi-avril", a expliqué M. Bandarin, qui déplore des pillages et des destructions de manuscrits "difficiles à quantifier pour l`instant".
L`Unesco a averti les pays voisins, tous signataires, avec le Mali, d`une convention de 1954 sur la protection du patrimoine. L`agence de l`ONU, qui coopère avec Interpol et les grandes maisons de commerce d`art, n`a pas constaté pour l`instant d`accroissement sensible du trafic en provenance de Syrie ou du Mali. Mais "cela prend généralement quelques mois", a noté M. Bandarin, précisant que le trafic des objets culturels était "une des principales industries criminelles", évaluée à six milliards de dollars par an.
Tombouctou, grand centre intellectuel de l`islam, surnommée "la perle du désert", récèle trois grandes mosquées, mais surtout des dizaines de milliers de manuscrits, dont certains datent de l`ère pré-islamique.
Le Nord malien est depuis plusieurs semaines sous la coupe des rebelles touareg, des islamistes armés d`Ansar Dine et d`Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ainsi que de divers groupes criminels.
En Syrie, peu de dégâts ont été constatés mais l`inquiétude est venue surtout de l`occupation par l`armée de sites classés par l`Unesco tels le Krak des Chevaliers, Qalaat Salah El-Din (deux châteaux croisés) et la ville romaine de Palmyre.
L`Unesco envisage d`envoyer des experts en Syrie "dans le cadre du plan Annan dans les semaines à venir", si la situation le permet. Mais M. Bandarin a reconnu que cet aspect de la crise syrienne n`était pas prioritaire.
Plus généralement, le Printemps arabe a constitué un défi pour l`Unesco, avec "une crise par mois" dont beaucoup ne sont pas closes. Il a cité le Yémen, la Libye ou encore l`Egypte, où la construction illégale de logements au Caire "a augmenté de manière dramatique depuis un an", menaçant des sites classés. Pour le patrimoine, "l`après-conflit est souvent la pire période" car le pouvoir central est affaibli, a expliqué M. Bandarin.