Depuis son retour de Paris (France), le président de la République Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK), s’en est pris à l’opposant Tiébilé Dramé du Parena, le traitant de «petit homme». Du coup, la réplique de ce dernier ne s’est pas fait attendre. Comme de petits rappeurs maliens qui se claschent incessamment, ces deux hommes se livrent désormais à une guerre sans merci.
Le Rap dérape, soulignons-le, en violence. En effet, l’animosité entre plusieurs rappeurs maliens, Gaspi, Iba one et Talbi, Oxbi, Moobjek, a viré à une confrontation physique dont le jeune rappeur Snipper (Saïbou Coulibaly) a fait les frais. Les dérapages se sont installés dans le monde du rap malien. Dans les ‘’morceaux clash’’ dont raffolent les jeunes, les rappeurs se taclent sans cesse verbalement, mais aussi poussent l’outrecuidance jusqu’à insulter père et mère de façon obscène. Ils se lancent des piques, qui nourrissent une haine réciproque qui durera avant de s’éteindre. C’est cette rivalité entre les rappeurs Gaspi, Iba one et Talbi, Moobjek qui anime aujourd’hui la polémique chez les férus de rap.
Tels des rappeurs donc, c’est la haine et la méfiance qui se sont installées au sommet de l’Etat. IBK, de retour de Paris, où, dit-on, il a fait une bonne récolte de milliards de nos francs, tellement requinqué à travers un «accueil triomphal jusqu’à sa résidence privée de Sébénincoro», n’a trouvé mieux que de s’attaquer à l’emblématique opposant du parti Parena, Tiébilé Dramé. Il l’a traité de «petit homme», après que ce dernier s’est attaqué à sa «mauvaise gouvernance», notamment dans l’affaire d’achat des tracteurs «subventionnés».
Dans la foulée, comme une réponse du berger à la bergère, M. Dramé a vigoureusement réagi. «Le musulman, le bon musulman, doit avoir peur de proférer des accusations gratuites contre son prochain. Car, Allah Soub’hana watalla ne dort pas. La vérité (Allah est témoin) est que je n’ai rien fait de tout ce que le président de la République a malencontreusement affirmé à Bamako-Sénou…
Si j’avais voulu ‘’saboter’’ votre ‘’visite’’, M. le président, je ne me serais pas limité à la diffusion d’un tract, je me serais organisé autrement. Je suis désolé et triste de constater que le président de mon pays ait pu faire des déclarations aussi légères sans se donner la peine de vérifier ses informations alors qu’il a tous les moyens de le faire. Les raisons de la colère du grand IBK, tout au long de sa visite en France sont ailleurs ! Il ne peut s’en prendre qu’à lui-même, à sa gouvernance patrimoine, à sa confusion entre l’Etat et sa famille, entre l’Etat et sa propriété privée», a rétorqué M. Tiébilé avec véhémence.
Se mêlant dans la danse, le gouvernement Modibo Kéïta II a pondu un communiqué dans lequel il déclare en substance: «Des esprits mal intentionnés tentent par les temps qui courent de saboter le succès palpables et vérifiable des actions du gouvernement sous la conduite du président Ibrahim Boubacar Kéïta. Ils sont allés jusqu’à proférer des propos malveillants à l’adresse du président de la République. Ce qui apparaît, au vu de notre culture, de notre éducation comme indigne de ceux qui ont appris à se respecter. Ceux qui s’aventurent sur ce terrain juste pour nier les faits, sont de mauvaise foi…».
Pour sa part, comme pour défendre le président du Parena, Tiébilé Dramé, l’opposition démocratique et républicaine, sous la houlette de son chef de file, Soumaïla Cissé, président de l’Urd, estime qu’avec le président de la République et son gouvernement profèrent, il y a un réel péril «sur la liberté d’expression des Maliens». «Cette visite (en France) qui a honoré notre pays, a été malheureusement ternie par la sortie du président de la République qui s’est livré à une attaque personnelle à l’attaque personnelle de M. Tiébilé Dramé, président du Parena…
L’opposition démocratique et républicaine refuse de se laisser distraire et continue d’exiger du gouvernement de faire la lumière sur la tragédie de Mina (Arabie Saoudite) ; de prendre des dispositions appropriées en vue d’organiser la solidarité nationale autour des familles endeuillées plutôt que de conduire le pays dans une polémique stérile…».
Polémique stérile. Bien dit ! Notre pays qui tente de sortir la tête de la crise multidimensionnelle qu’il traverse et qui est actuellement presque sous tutelle occidentale, a-t-il besoin de tout cela ? Notre ambition ici n’est pas de chercher à savoir qui a raison ou qui a tort. Loin s’en faut ! Si Tiébilé Dramé peut se targuer de jouer pleinement son rôle d’opposant et de «veilleur» sur l’action gouvernementale, le président IBK, au lieu de s’adonner à une attaque frontale, aurait dû, en tant que chef suprême du Mali, réagir par l’intermédiaire de son parti, le Rpm.
Et d’ailleurs, cette affaire de tracteurs, elle était posée avant son départ pour la France. Pourquoi n’avait-il pas alors réagi et attendre qu’il revienne de Paris, comme ayant bouffé du lion, pour se livrer en spectacle ? Quelle image ces hommes politiques veulent donner à notre pays aux yeux de nos partenaires techniques et financiers ? Comment peuvent-ils tomber dans une telle bassesse, comme de petits rappeurs-clascheurs de notre pays, alors que le pays est assailli par une montagne de problèmes ?
Non, il est temps que nous nous prenions au sérieux et l’exemple doit venir d’en haut, au risque de conduire notre pays, le Grand Maliba, vers le chaos !
Samba KEÏTA