Le Président de la République du Mali a été invité à effectuer une visite d’Etat en France par le Président de la République française Monsieur François Hollande, témoignant ainsi l’engagement français dans l’accompagnement de notre pays vers la sortie de crise.
Cette visite qui a honoré notre pays a été malheureusement ternie par les propos du président de la République Ibrahim Boubacar Keita qui s’est livré à une attaque personnelle, de façon gratuite, malencontreuse et injurieuse à l’encontre de M. Tiébilé Dramé, président du PARENA, parti politique membre de l’opposition démocratique et républicaine.
Dans un communiqué insipide, le Gouvernement de Monsieur Modibo Keita a continué à alimenter les invectives et proférer des menaces sur les libertés démocratiques, conduisant ainsi l’opinion nationale dans une polémique stérile et inopportune. Le collectif des partis de l’opposition démocratique et républicaine :
➢ condamne fermement le comportement du Président de la République et de son Gouvernement,
➢ considère que les injures de personnalités politiques sont indignes de la fonction présidentielle,
➢ considère que les termes du Communiqué du Gouvernement sont inacceptables en tant qu'ils constituent une remise en cause des libertés publiques et une attaque contre l’ensemble des patriotes et des forces démocratiques de notre pays.
➢ tient le président de la République et le Gouvernement pour responsables de la détérioration du climat politique du pays.
Il est important de rappeler que l'attaque injurieuse dirigée contre Monsieur Tiébilé Dramé a été précédée par d'autres dérives verbales du Président de la République durant son séjour parisien à travers lesquelles il traita l'opposition d'irresponsable pour avoir critiqué l'accord d'Alger pour la paix et la réconciliation. À Paris, nous l'avons vu agiter le doigt, se fâcher et dire, parlant de l'Opposition : " ces petits prétentieux" pour finir en bambara " a bora politiki la, a kera malobaliyayé", littéralement " ce n'est plus de la politique, c'est de l'impertinence, de l'impolitesse"
Oui c'est en France et au Mali que toutes ces atteintes aux libertés fondamentales se sont passées !
Faut-il rappeler au Président de la République qu'en France, le concept de liberté d'expression germa sous l'Ancien Régime. Il fut l'une des premières conquêtes de la Révolution française. Aujourd'hui, la liberté d'expression de ses opinions est une des premières libertés politiques et plus généralement des libertés fondamentales.
S'agissant du Mali, il convient de rappeler que dans le préambule de la constitution du 25 février 1992, " Le peuple Souverain du Mali, fort de ses traditions de lutte héroïque, engagé à rester fidèle aux idéaux des victimes de la répression et des martyrs tombés sur le champ d'honneur pour l'avènement d'un Etat de droit et de démocratie pluraliste :
Affirme sa volonté de préserver et de renforcer les acquis de la révolution démocratique du 26 Mars 1991..."
L'article 2 de notre constitution précise que : " tous les Maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs. Toute discrimination fondée sur l'origine sociale, la couleur, la langue, la race, le sexe, la religion et l'opinion politique est prohibée.
L'article 4 renchérit : " Toute personne a droit à la liberté́de pensée, de conscience, de religion, de culte, d'opinion, d'expression et de création dans le respect de la loi." La France et le Mali ont ratifié les principaux instruments juridiques internationaux relatifs aux droits de l’Homme, qui consacrent la liberté d’opinion et d’expression. La Déclaration universelle des droits de l’homme stipule, dans l’Article 19, le premier article, et le plus largement reconnu, sur le droit à la liberté d’expression, que :
«Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.» Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques contient un article plus détaillé mais très similaire sur la liberté d’expression:
"- Nul ne peut être inquiété pour ses opinions.
- Toute personne a droit à la liberté d’expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix." Faut-il rappeler au président de la République qu'il est le gardien de la Constitution. Il doit incarner l’unité nationale. Il est le garant de l'indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des Traités et Accords internationaux. En France aussi bien qu'au Mali, l'opposition politique constitue un élément fondamental de la démocratie pluraliste. C'est à ce titre qu'elle est politiquement reconnue, juridiquement protégée et a, en conséquence, des droits et des devoirs.
En effet, aux termes de l'article 12 de la loi n°007 du 04 mars 2015 portant statut de l'opposition au Mali : " L'opposition politique a le devoir de suivre l'action gouvernementale, de la critiquer de façon objective et constructive dans le sens du renforcement de l'idéal démocratique et du progrès."
C'est pourquoi l'opposition républicaine et démocratique refuse de se laisser distraire et continue à exiger du gouvernement que la lumière soit faite sur tous les scandales qui caractérisent le régime en place. L’opposition reste convaincue que la vie publique, dans son ensemble, doit être marquée du sceau de la morale et de la transparence. Nous ne lâchons rien, comme on le dit si bien au bord de La Seine: le Président de la République et son Gouvernement se sont énervés parce que l'opposition dénonce les détournements à la pelle, les surfacturations, les scandales et le pillage des ressources publiques.
L’opposition réaffirme sa détermination, toute sa détermination, à combattre les prédateurs et à défendre les libertés, toutes les libertés des Maliens au nombre desquelles la liberté d’expression et d'opinion acquise de haute lutte dans notre pays au prix de centaines de morts. Elle lance un appel à l’ensemble des forces patriotiques et démocratiques du Mali à se mobiliser pour la défense de la constitution.
L'opposition remercie et félicite particulièrement la presse malienne qui, dans sa quasi-totalité, a déploré l'attitude injustifiable du Président de la République. Assurément, notre conférence de ce jour participe du travail d'éveil de la conscience citoyenne si elle est portée au peuple sainement par les nombreux médias présents dans cette salle. Portée sainement, c'est-à-dire diffusée en tout ou en partie dans sa substance, non censurée comme l'a été par l'ORTM le communiqué que nous avons diffusé le 29 octobre dans l'après-midi. Ce communiqué a été interdit d'antenne au moment où le communiqué insipide et rabaissant du Gouvernement faisait le tour dans toutes nos langues. Nous avons toujours dénoncé cette attitude de l'ORTM qui viole le principe d'égal accès aux médias d'Etat contenu dans le statut de l'opposition.
Nos sincères remerciements vont également à l'endroit de toutes ces nombreuses Maliennes et de tous ces nombreux Maliens qui ont manifesté leur mécontentement et leur inquiétude face à ces dérives inacceptables du Président de la République et de son gouvernement à un moment où ils ont l'obligation de réconcilier les Maliens, de les sécuriser et de leur assurer le bien-être recherché.
Vive la Démocratie
Vive l'opposition républicaine et démocratique
Vive le Mali
Je vous remercie