N’Golo, c’est toujours depuis le champ coton de mon voisin (10 ha) que je t’appelle ce matin pour te donner les nouvelles de la famille, du village de Dèssèbougou et du pays des hommes Allah ka tinyèdèmèn et au-delà m’enquérir de tes nouvelles, depuis Barcelone (Espagne).
Mon frère je suis très content de t’avoir comme d’habitude au bout du fil pour partager avec toi un temps soit peu les soucis du village. Mon très cher frère, je commence par te dire que grand-mère après sa guérison ne souhaite plus manger du to. Elle ne réclame que de la viande rouge et du riz. Or ici, nos moyens sont limités dans ce sens.
Malheureusement elle refuse de comprendre ça. Et N’golo tu es la seule personne qui peut nous aider en quoi faisant. C’est simple envoi nous un sac de riz et 25 000 F CFA. Comme ce n’est pas simple de nous envoyer du riz à partir de Barcelone. Donc tu peux nous envoyer 50 000 F CFA en tout. Sinon grand-mère va nous rendre fous avec son histoire de viande et de riz.
En outre, je t’informe que je suis dans le champ de mon voisin avec mes deux épouses, notre frère et deux de tes neveux pour simplement l’aider à finir avec ses premières récoltes. Il est trop en retard. Donc par solidarité nous venons lui donner un coup de mains.
Ah oui c’est ça la vie à Dèssèbougou, aider ses voisins dans les moments difficiles. Pour la cause, il nous a égorgé deux gros coqs. Et au moment où je te parle, on est en train de déguster cette viande blanche.
Mon frère voilà en quelques mots les soucis que je voulais partager avec toi concernant le village et la famille.
Par ailleurs, en ce qui concerne le pays des hommes Allah ka tiyèndèmèn, il n’y a pas grand-chose à se mettre sous la dent à part que nos députés ont failli se donner des coups de points lors du renouvellement du bureau et des commissions de l’Assemblée Nationale, la semaine dernière. Tout cela pour défendre quoi, leurs ventres. Sinon les intérêts de nous d’en bas ne sont pas des préoccupations pour ces députés.
Tu vas t’étonner de cette analyse venant d’un paysan de Dèssèbougou, mais à force d’écouter la radio Kibaru et d’échanger avec le médecin et le directeur d’école de Dèssèbougou, je suis presque devenu un politologue.
Ah oui N’Golo, j’ai jamais été à l’école, j’ai jamais quitté le pays des hommes allah ka tiyèndèmèn, mais je ne suis pas bête, car je m’informe beaucoup. Et qui va aux informations se cultive. Donc je suis illettré, mais intellectuel. Mieux mon frère, j’écoute à partir de midi le journal en bamanakan de la radio de la France. Cela aussi me permet de tenir tête à notre directeur d’école lors des débats.
Ah oui N’golo être dans un village ne veut pas dire vivre comme un animal. Ici, nous sommes des humains et nous n’avons rien à envier de nos semblables de la ville.
A bientôt mon frère, mais n’oublie pas de nous envoyer de l’argent pour grand-mère qui pense que manger du riz et de la viande rouge l’éloigne de la mort.
Qu’est-ce que les vielles personnes peuvent avoir peur de la mort qui n’est en réalité qu’un soulagement pour un pauvre qui ne mange qu’une seule fois tous les deux jours.
A lundi prochain sans faute
Ton frère Zana de Dèssèbougou