Dans le cadre de la préservation du patrimoine culturel malien, l’Ambassade des Etats-Unis au Mali vient de mettre à la disposition de l’Institut des Hautes Etudes et de Recherche Islamique Ahmed Baba de Tombouctou ((IHERIAB), une subvention de 100 millions de FCFA. L’annonce a été faite, le jeudi dernier, par l’Ambassadeur des Etats-Unis au Mali, Paul A. Fomsbee lors d’une conférence de presse qu’il a animée dans les locaux de l’Ambassade. Il avait à ses cotés, Cynthia Schneider du projet « Timbuktu renaissance Initiative », Drissa Diakité, représentant du ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, Andrew Lee, directeur des affaires publiques de l’Ambassade des Etats-Unis au Mali et Abdoulakadri Idrissa Maïga, directeur de l’Institut Ahmed Baba de Tombouctou.
Cette subvention tire son origine du Fonds des Ambassadeurs pour la préservation du patrimoine culturel, lancé par le congrès américain en 2001. Cette initiative réaffirme le respect qu’accordent les Etats-Unis aux autres cultures. Ce fonds sert à appuyer techniquement la restauration de bâtiments anciens, l’étude et la conservation de collections de musée, la préservation des sites archéologiques, l’amélioration des conditions de préservation des archives et des manuscrits anciens et la documentation sur des langues indigènes.
Dans son intervention, Drissa Diakité, représentant du ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique dira que cette subvention de l’Ambassade des Etats-Unis à l’endroit de l’Institut Ahmed Baba est le témoignage éloquent de l’importance que ce pays accorde à la préservation et la valorisation des biens culturels.
Selon lui, le prix des Ambassadeurs des Etats-Unis est sous-tendu par l’idée de faire de la culture un instrument de développement économique, social et culturel.
« En honorant l’IHERI-ABT parmi d’autres lauréats, vous avez compris que les manuscrits anciens peuvent être un outil fabuleux de promotion de la paix et de la cohésion sociale, car faisant le lien non seulement avec la culture, l’artisanat et le tourisme, mais aussi avec la recherche, l’éducation et la formation de haut niveau », a-t-il laissé entendre.
Les Etats-Unis conscients de l’importance historique de Tombouctou
Pour sa part, l’Ambassadeur des Etats-Unis au Mali Paul A. Folmsbee dira que son pays est conscient de l’importance historique de Tombouctou et veut aider à sa réhabilitation. D’où le projet « Timbuktu Renaissance » qui est une initiative non gouvernementale qui vise à aider le Mali à restaurer Tombouctou en tant que centre de culture et d’apprentissage. Selon lui, c’est dans ce même élan que le fonds des Ambassadeurs pour la préservation culturelle vient s’ajouter. Fruit de la coopération entre les gouvernements américain et malien dit-il, ce fonds constitue un effort visant à assurer aux générations futures l’accès à la sagesse trouvée dans les bibliothèques de Tombouctou.
« L’institut Ahmed Baba a été choisi comme récipiendaire du Fonds de l’Ambassadeur parce que les manuscrits de Tombouctou ne sont pas seulement un trésor malien, mais ils représentent un patrimoine pour toute l’humanité », a indiqué l’Ambassadeur Paul A. Folmsbee. Qui regrette que le patrimoine culturel du monde fasse malheureusement partout, l’objet d’attaque de la part d’extrémistes, partisans de la violence.
« Nous savons qu’à Tombouctou, en plus des mausolées des saints, les manuscrits ont fait l’objet d’actes criminels pendant l’occupation par les groupes extrémistes et n’ont été sauvés des flammes que grâce au courage de certains de leurs détenteurs. Cette destruction de la culture est une attaque contre l’histoire collective et notre avenir… » a ajouté l’Ambassadeur.
« La cité des 333 saints pour sa part révérée autrefois comme l’un des centres intellectuels les plus dynamiques du monde musulman est en passe de retrouver un peu de son lustre d’antan. Placée par l’UNESCO sur la liste des sites du patrimoine mondial en péril en juin 2012, Tombouctou se préoccupe aujourd’hui de la préservation d’un patrimoine considérable et encore mal connu. Transmettant des valeurs humanistes et un Islam tolérant, les manuscrits de Tombouctou ont encore et toujours beaucoup à nous apprendre. Comme patrimoine écrit de l’Afrique, ces manuscrits ont besoin de toute urgence d’être protégés, restaurés et digitalisés pour éviter leur détérioration et permettre leur étude par les générations d’aujourd’hui et de demain », a expliqué l’Ambassadeur des Etats-Unis au Mali. C’est pourquoi, selon lui, l’Ambassade des Etats-Unis au Mali a décidé de s’inscrire dans cet élan de solidarité internationale visant à préserver ces manuscrits, cela à travers une subvention de près de 100 millions FCFA.
« Beaucoup de gens perçoivent le rôle éminent des manuscrits de Tombouctou dans l’histoire de l’humanité. Ils constituent un pont incontestable entre les civilisations et des peuples qui ont besoin de dialoguer et d’échanger. Ils sont un point de passage, un carrefour, un espace pertinent de dialogue interculturel. Le savoir et la sagesse des manuscrits de Tombouctou sont là pour éclairer notre avenir, la route commune sur laquelle nous cheminons. Nous sommes donc fiers d’apporter notre contribution à cette œuvre utile », a conclu l’Ambassadeur.
Abdoulkadri Idrissa Maïga quant à lui dira que l’Institut Ahmed Baba dispose de 45.000 manuscrits anciens. Il regrette que lors de l’occupation des trois régions du nord par les djihadistes, l’institut ait perdu 4 203 manuscrits anciens, l’équivalent des 10% du total des manuscrits. Selon lui, ces manuscrits ont été, soit détruits, soit emportés à cause de leur valeur et des secrets qu’ils renferment. Il s’est par ailleurs réjoui que 11.000 manuscrits aient été retrouvés au sous-sol de l’institut après la libération et d’autres acheminés vers Bamako lorsque les fous de Dieu détruisaient les mausolées des saints et brulaient ces manuscrits.
M. Maïga ajoutera qu’en plus de son institut, des bibliothèques privées sont aussi détentrices de manuscrits anciens. Et lors de l’occupation djihadiste, au total 367.000 manuscrits ont été exfiltrés vers Bamako pour être sécurisés.
Mme Cynthia Schneider dira qu’à Tombouctou, c’est la culture qui a attiré le monde entier. Toute chose qui est facteur de développement économique et social pour cette ville. Selon elle, l’objectif final de ce projet est de faire renaitre Tombouctou avec des touristes étrangers, le festival sur le désert de Mani Ansar…..
A noter que le projet ‘’Timbuktu Renaissance’’ vise à préserver les manuscrits anciens de Tombouctou à travers la numérisation de 2250 documents anciens dans les bibliothèques, le renforcement de la capacité de conservation de l’Institut Ahmed Baba, le nettoyage des manuscrits et la mise en place d’un système de stockage amélioré.
D. Diama