PARIS - François Hollande, qui a donné son feu vert aux opérations militaires françaises au Mali et en Somalie, est confronté pour la première fois à la situation périlleuse d`exposer la France à des pertes humaines, dans son rôle de chef des armées.
Huit mois après son accession au pouvoir, "c`est un baptême du feu de son
plein exercice de ses fonctions de chef des armées. C`est la première fois
qu`il décide d`une opération militaire majeure", souligne Bruno Tertrais,
maître de recherche à la fondation pour la recherche stratégique.
Pour le député socialiste Jean-Christophe Cambadélis, en "endossant le
costume régalien de celui qui décide la paix ou la guerre, M. Hollande modifie
l`image que l`on se faisait de lui".
Pour l`heure, à quelques bémols près, l`ensemble de la classe politique
approuve la décision du chef de l`Etat d`engager directement les troupes
françaises au Mali pour repousser les jihadistes armées qui progressaient vers
le sud du pays.
"On est dans une logique d`union sacrée", estime le politologue Frédéric
Dabi (Ifop). De ce point de vue, c`est une "rupture" dans le quinquennat où
jusqu`alors "chaque décision de François Hollande était systématiquement
critiquée, délégitimée par l`opposition".
Mais l`évolution de la situation - le sort des otages, d`éventuelles pertes
humaines importantes, un manque de résultats rapides et tangibles - peut faire
rapidement "basculer" l`opinion.
Autant celle-ci approuve généralement les opérations conduites de concert
avec des forces internationales, autant quand la France se lance en solo, elle
est "plus méfiante", ajoute M. Dabi.
Sur le plan intérieur, François Hollande marque pour l`instant un point
concernant son image. "Ceux qui critiquaient son incapacité supposée à décider
en sont pour leurs frais", estime ainsi Bruno Tertrais.
Pertes dans les rangs français
L`intervention au Mali peut certes atténuer l`effet de la manifestation
contre le mariage homosexuel, dimanche, ce qui avantage le président. Mais de
l`autre côté, elle éclipse le succès, pour l`exécutif, de la négociation sur
la sécurisation du marché du travail conclue vendredi soir.
Sur l`opération elle-même, qui a débuté avec la mort d`un pilote
d`hélicoptère en opération contre l`avancée d`une colonne ennemie, quelques
critiques ont commencé à poindre. D`autant que le même jour, une opération
commando de la DGSE pour tenter de libérer un otage français en Somalie a
échoué, se soldant par des pertes dans les rangs français.
"On se demande ce qu`a fait la diplomatie française pendant quatre mois
pour que nous soyons aujourd`hui obligés d`agir seuls", s`est interrogé
l`ancien ministre de la Défense, Hervé Morin (UDI), sur BFMTV, alors que, sur
la même chaîne, Noël Mamère (EELV) a pointé le risque que la France apparaisse
"isolée".
Alain Juppé, ex-ministre UMP de la Défense, a au contraire jugé sur son
blog que l`intervention française était "justifiée", compte tenu d`une menace
terroriste qui s`est "brutalement aggravée depuis quelques jours".
Sur le plan électoral, ces opérations extérieures, même réussies, n`ont pas
forcément d`effet.
Le prédécesseur de François Hollande à l`Elysée, Nicolas Sarkozy, a pu le
constater à ses dépens. Son leadership lors de l`intervention en Libye en 2011
salué par tous, n`a pas empêché sa chute dans les sondage et sa défaite en
2012.
"La politique étrangère, lorsque ça ne marche pas, on vous le reproche.
Mais lorsque ça marche, ça ne rapporte rien", confiait d`alleurs
l`ex-président quelques mois avant la présidentielle.
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