Hama Amadou l’opposant nigérien a mis fin à son exil vendredi dernier. Il savait qu’il risquait la prison en revenant à Niamey, parce qu’il était sous le coup d’un mandat d’arrêt et n’avait pu en son temps éviter l’arrestation qu’en rasant les murs. Alors, a-t-il pu miser sur son intouchabilité ? Car l’enfant terrible de la politique nigérienne n’est pas rien : il a des députés, des militants, Niamey est son milieu, il a des sympathies certaines dans l’establishment bureaucratique et le président Issoufou Mahamadou est plutôt homme de conciliation que de rupture. Si tel était son calcul, alors Hama Amadou l’aura eu tout faux puisqu’aussitôt il a débarqué, aussitôt il a été écroué. Et manque de pot pour lui, dans les heures qui suivront l’interpellation de l’opposant, le monde avait les yeux rivés sur la tragédie bien plus médiatique et préoccupante de Paris. Par conséquent, suite et fin de l’odyssée de l’enfant terrible de la politique nigérienne, incubateur reconnu par le passé de nombre de blocages institutionnels qui ne sont dénoués que par des coups d’Etat ? Possible : le pouvoir en place à Niamey pour avoir pratiqué Hama Amadou le connaît, connaît ses méthodes et n’a pas pu ne pas cerner tous les enjeux de son retour suicidaire. Car une à une, les exigences de l’opposition qui pouvaient amener à l’impasse institutionnelle, donc la justification d’une intervention militaire, se sont tues d’elles mêmes, détruites par leur maximalisme ou leur incohérence. Ainsi, le dossier du fichier électoral. Ainsi, le dossier de la composition de la cour constitutionnelle. Il ne reste donc que l’épreuve de force. Elle était engagée depuis un moment entre un pouvoir qui ne rigole plus et l’opposition qui veut pousser à la faute. Le retour de Hama Amadou est un tournant dans le bras de fer. Un énorme gâchis cependant. Car le Niger ne doit pas être distrait de ce qu’il est en train de si bien faire : donner à manger à ses populations, mieux les éduquer, mieux les soigner. Il n’y a pas encore le feu mais de manière préventive la communauté internationale doit ouvrir les yeux et réaliser que le Niger reste le dernier verrou contre l’avancée occidentale en Afrique de l’ex Boko Haram aujourd’hui Etat Islamique en Afrique de l’Ouest et la possible jonction de ce mouvement avec les nébuleuses d’Aqmi et du Front de Libération du Macina.
Adam Thiam