Bamako, 20 nov 2015 (AFP) - Les forces spéciales maliennes ont donné
vendredi l'assaut à l'hôtel Radisson Blu de Bamako, théâtre d'une prise
d'otages sanglante, où au moins trois personnes étaient mortes et une centaine
encore retenues dans la capitale de ce pays régulièrement frappé par les
jihadistes.
"Trois otages ont été tués", a indiqué le ministère de la Sécurité
intérieure, sans révéler leur nationalité, ni les circonstances de leur mort,
mais le ministre de la Sécurité, le colonel Salif Traoré, a ensuite précisé à
l'AFP qu'il s'agissait d'étrangers.
Selon le ministère, les assaillants sont au nombre de "deux ou trois", des
témoins faisant état d'une "dizaine d'assaillants" armés. "Ca se passe au 7e
étage, des +jihadistes+ sont en train de tirer dans le couloir", a déclaré par
ailleurs une source de sécurité à l'AFP.
Le président français François Hollande a appelé vendredi ses compatriotes
"dans des pays sensibles" à prendre "leurs précautions", et une quarantaine de
membres du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) sont
partis pour le Mali, où la France intervient militairement depuis 2013.
L'attaque du Radisson Blu, prisé de la clientèle internationale, vers 07H00
(locale et GMT), survient une semaine exactement après les attaques
meurtrières revendiquées par le groupe Etat islamique qui ont fait 130 morts à
Paris et plus de 350 blessés.
Selon le groupe hôtelier Rezidor, qui gère le Radisson Blu, situé à l'ouest
du centre-ville de Bamako, "125 clients et 13 employés" étaient "toujours dans
l'immeuble" de 190 chambres peu avant 14H00.
A la mi-journée, la télévision publique malienne a annoncé la libération
d'"environ 80 otages". "Nos forces spéciales ont libéré une trentaine d'otages
et d'autres ont pu s'échapper tout seuls", a déclaré de son côté le colonel
Traoré. Le ministère a ensuite fait état de "72 personnes libérées".
Compte tenu de la dimension du lieu, une bonne partie des personnes
présentes s'étaient enfermées et n'étaient donc pas sous la menace directe des
ravisseurs, a souligné le ministère.
Cette attaque rappelle la prise d'otages du 7 août dans un hôtel à Sévaré
(centre), qui avait fait au total 13 morts, dont quatre parmi le personnel
d'une société sous-traitante de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma) et
quatre assaillants.
Le 7 mars, le premier attentat anti-occidental meurtrier à Bamako, visant
un bar-restaurant, avait coûté la vie à cinq personnes, dont un Français et un
Belge.
- Nationalités diverses -
Les assaillants sont entrés dans l'enceinte de l'hôtel au même moment
qu'une voiture munie d'une plaque diplomatique, selon le ministère. Des tirs
d'armes automatiques ont ensuite été entendus.
Outre des policiers et militaires maliens, des forces spéciales de la
gendarmerie étaient déployées, ainsi que des membres de la Minusma et de la
force française Barkhane. "Les Américains également sont en train de nous
apporter un appui à l'intérieur de l'hôtel", a précisé le colonel Salif Traoré.
Parmi les clients évacués, un journaliste de l'AFP a vu trois personnes,
dont deux femmes, une Turque et une Ivoirienne, qui ont déclaré avoir vu le
corps d'un homme à la peau claire gisant au sol, puis une quatrième, un
Chinois.
Au moins trois gardiens de l'établissement ont été blessés, dont l'un
grièvement, selon un secouriste. Un journaliste de l'AFP a également vu un
policier touché par balle.
Six blessés ont été admis aux urgences de l'hôpital Gabriel, selon la
ministre malienne de la Santé, le Dr Marie Madeleine Togo.
Parmi les étrangers séjournant dans l'hôtel figuraient notamment 20 Indiens
(tous évacués), 12 employés d'Air France (désormais "en lieu sûr", selon la
compagnie), sept de Turkish Airlines, dont cinq évacués, sept Algériens, (tous
exfiltrés, selon Alger), deux Allemands (évacués) et enfin "au moins six
citoyens américains" mis à l'abri selon des sources militaires américaines.
Sept Chinois et quatre Belges séjournaient également dans l'établissement au
moment des faits mais on ignorait leur sort.
Selon un touriste chinois cité par l'agence officielle Chine nouvelle,
après les premiers coups de feu vers 06H30 GMT, suivis de "fusillades
sporadiques", une odeur de brûlé "s'est répandue dans les couloirs et les
chambres, l'Internet a été coupé et la réception de l'hôtel ne répondait plus
aux appels téléphoniques".
Le président Ibrahim Boubacar Keïta, a écourté son séjour au Tchad, pour un
sommet des cinq pays du Sahel, afin de rentrer à Bamako.
Début 2012, le nord du Mali est tombé sous la coupe de groupes jihadistes
liés à Al-Qaïda. Ils en ont été en grande partie chassés à la suite du
lancement en janvier 2013, à l'initiative de la France, d'une intervention
militaire internationale. Mais des zones entières échappent encore au contrôle
des forces maliennes et étrangères. Les attaques jihadistes se sont étendues
depuis le début de l'année vers le centre, puis le sud du pays.
Dans un enregistrement remontant à octobre et récemment authentifié, le
chef du groupe jihadiste Ansar Dine, allié d'Al-Qaïda au Maghreb islamique
(Aqmi), Iyad Ag Ghaly, dénonçait l'accord de paix signé en mai-juin entre le
camp gouvernemental et la rébellion et appelait à frapper la France "croisée".
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