Au Mali, Journée africaine de la jeunesse (Jaj, le 1er novembre de chaque année a été marquée par de nombreuses activités, dont une conférence débats sur le thème, «Leadership de la jeunesse face aux enjeux de développement du Mali et de l’Afrique». Sur ce plan, une association commence à s’illustrer par son dynamisme. Il s’agit de Youth for Change Mali (Yfcm) ou «Jeunesse pour le changement au Mali» fondée par des jeunes étudiants Maliens de la diaspora américaine.
Quatre jours après l’attaque meurtrière qui a visé l’un des symboles de la reprise économique du Mali, l’Hôtel Radisson Blu avec son luxe et son prestige, nous sommes encore partagés entre douleur et colère. Notre douleur est intense, mais curieusement, nous ne sommes pas surpris que cette fureur inhumaine de tuer des innocents nous frappe si près.
Parce qu’il y avait déjà eu La Terrasse, en mars dernier, puis Le Byblos de Sévaré le 7 août 2015. Et curieusement tous ces actes criminels ont été commis un vendredi, un jour Saint où les Maliens rivalisent d’ardeur pour manifester leur fidélité au Tout Puissant.
Et les victimes sont de plus en plus nombreuses. Si on a déploré 5 morts à La Terrasse, elles étaient 12 à 13 victimes au Byblos et aux moins 22 morts au Radisson Blu. Ces trois attaques totalisent à elles-seules environ 55 morts. Des vies innocentes sacrifiées sur l’autel d’une fausse Jihad, une présumée guerre sainte qui n’en est pas une car aucun précepte de l’islam n’autorise un humain à ôter la vie d’un autre. Comme on ne peut pas imposer la religion à des musulmans.
Nous sommes touchés dans notre âme et blessés dans la chair et dans le cœur. Mais, pas surpris car nous sommes de ceux qui sont convaincus qu’aucun pays, quelle que soit sa supposée puissance, n’est à l’abri du terrorisme. Un fléau que nous devons désormais «intégrer notre dans notre quotidien».
«Nulle part dans le monde aujourd’hui, on est à l’abri de ces barbares d’un autre temps. Ces hommes qui ne méritent pas le nom d’hommes, qui ont décidé de rompre avec l’humanité telle que nous la connaissons et telle que nous la chérissons. Nos valeurs ne sont pas les leurs, la valeur vie leur est inconnue», a d’ailleurs déclaré le président Ibrahim Boubacar Kéita, à la fin de sa visite au Radisson dévasté le samedi dernier.
Intégrer le terrorisme, un phénomène transnationale, dans notre quotidien nous permettra de faire échec à ces égarés dont le dessein est d’éteindre en nous la foi, de tuer en nous l’espoir d’un monde meilleur émancipé de la violence, de la terreur et de la barbarie d’une autre époque.
Déjà, en attaquant le Radisson Blu, ils ont essuyé un premier échec. Certes, cet attentat terroriste est une très mauvaise publicité pour un pays qui tente de tourner la page de la crise contre vents et marées, un coup dur pour l'économie et le tourisme.
Mais, comme l’écrit si pertinemment notre ami Jean-Louis Sagot-Duvauroux (intellectuel bloggeur), «les furieux qui ont attaqué l'hôtel Radisson ont tué aveuglément. Mais, ils ont rencontré en face d'eux des hommes intrépides, efficaces, porteurs des valeurs qui font la grandeur du Mali et qui honorent l'Islam. Une religion pratiquée par la plupart des gendarmes et des militaires maliens impliqués : la solidarité avec les personnes menacées, la protection des étrangers, le courage…».
Difficile souvent d’apercevoir un rayon de soleil dans la grisaille du malheur. Mais, ce que les Maliens voire le monde entier ont retenu de cette triste actualité, c’est la farouche opposition que nos forces armées et de sécurités ont opposé aux preneurs d’otages.
Ces derniers, avant de rejoindre l’enfer, ont sans doute été les premiers à avoir été surpris par cette détermination d’en découdre avec ceux qui sont animés de la soif de verser le sang d’innocents et ternir davantage l’image de leur pays. Ceux qui sont tapis dans l’ombre, savent que désormais, le seul avantage qu’ils auront en s’attaquant à ce pays, c’est juste le temps de l’effet de surprise.
Un professionnalisme qui n’a pas échappé aux otages terrifiés
On n’avait noté la même détermination lors de l’attaque du Byblos à Sévaré en août dernier. Des témoignages des otages libérés des assaillants du Radisson, on retient donc une chose essentielle : la fierté et la reconnaissance vis-à-vis des forces spéciales maliennes dont ils ont tous salué l’engagement et le professionnalisme !
Nous sommes fiers de nos forces armées et de sécurité parce qu’elles ont été à la hauteur de la mission qui leur est confiée, de la confiance placée en elles par toute une nation pour la défendre de l’ennemi, quel que soit son visage du jour.
Nos forces de défense et de sécurité ont tourné la page du «replis stratégique». Oui, Jean-Louis, «cet épisode dramatique clôt aussi une longue période de doute et de frustration enfantée par la défaite de l'armée malienne devant la tentative de conquête des narco-jihadistes et de leurs alliés».
Et rassures-toi, cher ami, «la vaillance des forces de l'ordre va souder les Maliens et leur rendre le goût de la grandeur». Si aujourd’hui les Bamakois vaquent tranquillement à leurs occupations, c’est parce qu’ils ont maintenant confiance en la capacité de réaction de ceux qui sont chargés de leur protection.
Au lieu de fuir s’abriter, la foule est restée toute la journée aux alentours du Radisson pour être les témoins des exploits et prouesses de nos forces de l’ordre ovationnées chaque fois qu’un groupe d’otages était libéré au prix de leur vie. Nous avons vu beaucoup de témoins émus aux larmes par la détermination de ces hommes et femmes à soustraire le maximum de personnes de cette violence aveugle, barbare, inhumaine.
«C’est une noble mission que ces gens accomplissent. Ils se servent de leurs corps comme boucliers pour protéger les otages sans se soucier de leur vie. Je ne voyais cela que dans les films. J’étais loin d’imaginer que j’allais vivre cela un jour dans mon propre pays et de façons si dramatique», nous a déclaré une jeune dame émue aux larmes.
«Dans ces moments d'extrême violence, les forces maliennes ont reçu le secours de combattants amis, Français notamment. Mais cette fois-ci, les Français, durement éprouvés par le même ennemi, se sont joints à une action victorieuse engagée par des Maliens pour le Mali. Les choses se remettent dans le bon ordre», rappelle Jean-Louis Sagot-Duvauroux.
Le dernier sera à l’humanité
Et naturellement que «Tout ça construit une force d'humanité contre une barbarie qui reste menaçante, qui fera encore beaucoup de mal, mais qui ne vaincra pas».
Nous faisons confiance à nos forces de défense et de sécurité. Mais comme le recommande si pertinemment notre doyen AbdourhamaneDicko de la Fondation Friedrich Ebert (FES), il est aussi indispensable que nos dirigeants accordent «plus d’importance à l’éducation civique et démocratique des citoyens».
Tout comme il est temps qu’ils posent des actes concrets dans le sens de «promouvoir la justice sociale dont le manque dans nos sociétés constitue le véritable terreau du salafisme et du jihadisme».
Cela d’autant nécessaire qu’il est clair que «tant qu’il n’y a pas de justice sociale, les jeunes ne peuvent avoir un travail décent leur permettant de résister à la tentation jihadiste».
Et plus, pour paraphraser SoumeylouBoubèyeMaïga (ancien responsable de la DGSE et ancien ministre de la Défense), il faut que les Etats (Mali, Niger, Nigéria, Tchad, Cameroun, Kenya, Somalie…) se décident enfin à «gérer le champ religieux», c’est-à-dire avoir «un œil sur les infrastructures, sur l’exercice des différentes fonctions dans les lieux de culte et aussi sur les financements et leur traçabilité».
C’est l’une des conditions sine qua non pour venir à bout de ceux qui ont volontairement choisi de se mettre au banc de l’humanité en semant la mort pour récolter l’enfer !
Moussa Bolly