BAMAKO - "Les bombardements nous ont soulagés": à Gao, une des régions du nord du Mali occupées depuis plus de neuf mois par les
islamistes, les frappes françaises contre les jihadistes suscitaient dimanche l'espoir d'une libération rapide, selon des habitants.
Des bases jihadistes ont été détruites par des bombardements français à Gao, près de 1.200 km au nord-est de Bamako, et les combattants islamistes ont évacué la ville, ont indiqué à l'AFP des habitants et une source de sécurité régionale joints par téléphone.
De source sécuritaire, des frappes ont aussi visé dans l'après-midi une importante base islamiste près de Kidal, capitale d'une des trois régions administratives composant le Nord, avec Gao et Tombouctou, tombées aux mains des jihadistes entre fin mars et début avril 2012.
Un résident de Gao jubile: "Ici, c'est la fête! Les bombardements nous ont soulagés et nous allons faire le reste du boulot au sol". Sous couvert d'anonymat, il précise être un membre influent d'une milice d'auto-défense locale contrainte à la clandestinité depuis l'arrivée des jihadistes.
"Déjà, aujourd'hui (dimanche), nous avons détruit le commissariat de police installé par les islamistes. Les commerçants arabes essaient de mettre leurs marchandises à l'abri" par crainte de pillages, ajoute-t-il.
Un autre témoin confirme l'attaque du commissariat de "la police islamique", espérant que cela marque "le début du soulèvement" de la population contre les islamistes. Toutefois, aucune scène de panique n'était notée.
Un étudiant appelle à une rapide intervention terrestre de l'armée, "avant que les islamistes ne reviennent" à la faveur d'une accalmie dans les frappes de l'armée française, engagée dans les combats à la demande du Mali.
"Nous disons merci à la France. Il faut que les soldats français viennent par le sol pour nous libérer. Notre armée seule ne peut rien faire", juge un autre habitant.
"La machine doit continuer"
Ibrahim Touré, responsable à Gao de l'Association malienne des droits de l'Homme (AMDH), espère que c'est le début de la fin du calvaire des habitants du nord du Mali, où les jihadistes ont commis des exactions au nom de la charia (loi islamique): flagellations, amputations, lapidations, exécutions, notamment.
"Les populations du Nord ont assez souffert de cette guerre injustifiable.
La machine a commencé, elle doit continuer" pour mettre avec l'aide de l'armée
malienne les islamistes "hors du pays", déclare Ibrahim Touré.
A Tombouctou, cité historique à près de 430 km à l'ouest de Gao où aucun
mouvement aérien n'avait été signalé dimanche après-midi, la situation était
relativement calme, d'après des résidents, évoquant toutefois une peur
perceptible de représailles d'islamistes.
"Les populations sont terrées dans leurs maisons, le temps de comprendre la
situation. Nous avons entendu parler des bombardements à Gao, on ne sait pas
encore quand ce sera le tour de Tombouctou", affirme Aboubacar Mahalmoudou,
ouvrier.
Selon un professeur de lettres sous couvert d'anonymat, "les islamistes ont
mis beaucoup de forces vers Konna", localité à 650 km plus au sud d'où l'armée
malienne appuyée par les Français a délogé vendredi les islamistes qui y
étaient entrés la veille.
Avec les nouvelles de Konna, les familles des islamistes "restées à
Tombouctou ont eu un début de panique, il y en a beaucoup qui essayent de
partir plus loin dans le désert". Sur place, "la population est plus que
jamais coupée du Sud. On ne peut pas voyager, c'est trop risqué avec les obus
qui tombent un peu partout", poursuit l'enseignant.
Comme beaucoup dans le Nord, lui aussi souhaite une intervention similaire
à celle de Konna. C'est le point de vue de tout le monde, assure-t-il, même
avec ce que "ça peut générer comme dégâts collatéraux. On pense que c'est
l'occasion ou jamais" d'en finir "avec ces islamistes".