Placée sous le thème : « Des PME pour l’éradication de la pauvreté et la création d’emplois pour les femmes et les jeunes », notre pays a célébré, le samedi dernier, au CICB, la 29e édition de la Journée de l’industrialisation de l’Afrique, dont l’éclat a été rehaussé par la présence du chef de l’État, Ibrahim Boubacar KEITA, qui a saisi l’occasion pour réaffirmer son ambition pour le pays, en général, et pour le secteur industriel en particulier.
A l’entame de la cérémonie d’ouverture, à la demande du Président IBK, une minute de silence a été observée à la mémoire des victimes des attentats.
C’était la première fois qu’un Président de la République participe à un tel événement dans notre pays. Ce qui a naturellement été considéré comme une grande partie de la solution aux problèmes qui se posent au secteur industriel malien.
L’on notait également la présence du Premier ministre, Modibo KEITA, et de plusieurs membres du Gouvernement ; du Président de l’Assemblée nationale, Issiaka SIDIBE, et d’autres chefs d’institution ; des autorités politiques et administratives de la capitale ; des officiers supérieurs de l’armée ; des membres du corps diplomatique et consulaire… Toutes choses qui faisaient de cette Journée un événement majeur.
L’objectif de la Journée
Le 20 novembre de chaque année, la communauté internationale célèbre la journée de l’industrialisation de l’Afrique décrétée par les Nations Unies, à travers la résolution 44/237 du 22 décembre 1989. Dans notre pays, la date a été décalée à cause de l’attentat perpétré le même jour à l’hôtel Radisson Blu.
L’objectif est d’inciter les pays africains à s’engager dans le processus industriel et à susciter une prise de conscience au niveau international en faveur du développement industriel de l’Afrique.
Chaque année, cette célébration permet de s’interroger sur les solutions à mettre en œuvre pour développer l’industrie et rattraper le faussé qui nous sépare des « pays développés » communément appelés « pays industrialisés ».
Dans notre pays, et pour la 4ème fois, l’Organisation patronale des industriels (OPI) co-organise la présente cérémonie en partenariat avec la Direction nationale des industries (DNI°).
Trois interventions ont marqué la cérémonie d’ouverture de la Journée, à savoir celles du représentant du maire de la commune III ; du président de l’OPI, Cyril ACHKAR, et du ministre du Commerce et de l’industrie, Abdel Karim KONATE.
Conformément à la tradition, il est revenu au maire de souhaiter la bienvenue aux participants à la Journée et de souhaiter que leurs travaux soient couronnés de succès.
Les trois axes de l’OPI
Succédant au maire, le président de l’OPI a fait une intervention centrée sur trois axes.
Pour lui, il était tout d’abord question de remercier le Président IBK pour sa volonté de promouvoir l’industrie dans le Mali Emergent ; remercier le ministre du Commerce et de l’industrie pour la poursuite des travaux du Comité ad hoc crée pour mettre en œuvre les 21 propositions de réformes de relance du PIB de la manufacture contenu dans le livre blanc.
Le deuxième axe de l’intervention a consisté à faire l’état des lieux du Livre blanc pour éclairer l’assemblée sur l’évolution de ces réformes proposées, en juin 2013, à l’occasion des élections présidentielles. À ce niveau, M. ACHKAR a expliqué que le Livre blanc de l’industrie était un recueille synthétisant la situation industrielle de notre pays : un PIB de la manufacture de 4-5 % contre 11 % pour la moyenne UEMOA, 15 % pour le Sénégal, 19 % pour la Cote d’Ivoire et 24 % pour le Maroc ; un nombre d’unités industrielles de quelques centaines quand les voisins sénégalais et ivoiriens sont à plusieurs milliers ; le 1er importateur net de produits industriels dans l’espace UEMOA ; un déficit de la balance commerciale de près de 400 milliards de FCFA par an équivalent au montant de l’aide publique au développement ; des politiques industrielles théoriques menées jusqu’ici sans réelles convictions que l’industrialisation de notre pays est la voie obligée de son développement.
Le président de l’OPI a ajouté que les 21 solutions de relance de l’industrie contenues dans le Livre blanc sont une réponse intuitive aux maux de l’industrie actuelle, à savoir : la mauvaise application des textes communautaires et nationaux ; la banalisation de l’industrie dans le fonctionnement quotidien de l’administration ; le déficit de la culture industrielle ; le manque d’audace dans les réformes à mener ; un arbitrage budgétaire défavorable à l’industrie. Aussi, a-t-il fait savoir que six études répondant à 8 mesures ont été validées par le Comité ad hoc et dont il a annoncé la remise du rapport des conclusions de l’atelier du 30 septembre 1er et 2 octobre 2015 au ministre du Commerce et de l’industrie assorti des projets de décret pour permettre une mise en œuvre la plus prompte.
En dernier lieu, le président de l’OPI a exhorté les industriels à faire preuve d’imagination pour être compétitif à un moment où les accords de libres échanges des produits manufacturés se sont élargis à la CEDEAO en plus de l’UEMOA.
Promesse d’engagement
Le ministre du Commerce et de l’industrie, très en verve pour la circonstance, a souligné la présence du chef de l’État à cette Journée de l’industrialisation de l’Afrique qui constitue une première dans les annales de l’histoire de notre pays. Ce qui est fortement encourageant. Aussi, a assuré M. KONATE, la grande famille des industriels reste mobilisée pour bâtir le Mali. Dans cette veine, elle accompagne le projet présidentiel « Le Mali d’abord » pour la création de 200 000 emplois à l’horizon 2018 ; la réalisation de 50 000 logements sociaux, grâce au secteur des BTP ; pour l’atteinte de l’objectif de croissance de 7 %.
Rappelant le thème de la Journée, à savoir « Des PME pour l’éradication de la pauvreté et la création d’emplois pour les femmes et les jeunes », le ministre KONATE a fait ressortir son adéquation avec la vision du Gouvernement, comme l’atteste sa prise en compte dans la Déclaration de politique générale (DPG) du Premier ministre Modibo KEITA. Les PME sont d’autant plus importantes, a-t-il fait savoir, qu’elles représentent 90 % du tissu industriel de notre pays.
En outre le ministre du Commerce a mis du doigt sur une autre plaie du secteur industriel qu’est la crise dont il a été affecté.
Le ministre du Commerce et de l’industrie a rappelé plusieurs mesures qui ont été prises pour donner des ailes au secteur industriel, dont le concours est inestimable au développement de notre pays : politique nationale de développement des industries ; création de la Direction nationale du commerce, de l’Agence nationale des normes (ANANORM), du Centre national de la propriété intellectuelle (CNPI) ; signature de contrats de performance entre l’État et certaines unités industrielles ; renforcement des actions de lutte contre la fraude… Toutes choses qui ont permis une contribution du secteur industriel de plus de 6 % à la formation du PIB.
Parlant franc, le ministre KONATE a martelé que la performance est liée à la qualité. Ce qui exige de corriger les imperfections.
Pour la consolidation des acquis, Abdel Karim KONATE préconise de travailler pour l’accès aux financements ; à corriger les déficits énergétiques ; à moderniser les industries.
Message aux travailleurs
En marge de son discours officiel, le ministre du Commerce s’est directement adressé aux travailleurs pour souligner deux points majeurs.
D’abord, il a parlé des terroristes qui frappent notre pays, semant mort et désolation et qui n’ont rien à voir avec l’islam. Il a invité à la vigilance et à dénoncer tout individu suspect. Ce d’autant plus, a-t-il souligné, qu’il s’agit souvent de gens qui vivent parmi nous, partagent notre quotidien.
Outre le fait d’altérer notre image de pays du « jatigiya », le ministre a mis en relief le coup économique que ces terroristes portent au Mali. À titre d’exemple, il a cité le cas de trois hauts responsables chinois d’entreprise, en mission de prise de contact avec le ministre de l’Équipement, dans le cadre de la rénovation de la voie ferroviaire reliant la capitale à Dakar, et qui ont tous trouvé la mort à l’hôtel Radisson, le 20 novembre dernier.
Le second point développé a porté sur les efforts du Gouvernement pour la satisfaction des attentes des travailleurs : augmentation des salaires de 10 % sur 3 ans ; réduction de l’impôt sur les traitements et les salaires (ITS) ; augmentation du SMIG… Ce qui a été considéré comme une révolution dans le monde même des travailleurs qui n’a jamais vu autant de réponses apportées aux revendications en même temps. C’est pourquoi le ministre, sans nier le droit de grève, a invité à en faire usage avec le plus grand discernement possible. Cela, pour éviter de faire fuir les investisseurs qui ont besoin d’un environnement apaisé.
La cérémonie a aussi été marquée par la diffusion du film documentaire sur l’état de l’industrie malienne ; la remise officielle du rapport de l’atelier de validation des études du Livre blanc au ministre du Commerce et de l’industrie qui l’a, à son tour, remis au Premier ministre Modibo KEITA.
Le credo présidentiel
Après la cérémonie d’ouverture, le chef de l’État a coupé le ruban et visité de nombreux stands des exposants. Au cours de l’interview accordée la presse nationale et internationale, à l’issue de cette visite guidée, IBK a déclaré que les données avancées par Monsieur ACHKAR sont encore dérisoires par rapport à ce qui se fait ailleurs, dans la sous-région, à nos frontières. Il a ajouté : « l’ambition pour ce pays, je l’ai. Il ne saurait en être autrement, si l’on veut que son pays soit respecté, un pays dont la présence au monde soit significative et non de tolérance. Il n’y a pas de choix ; travailler, travailler dur, travailler fort pour créer, pour innover et pour traduire cela concrètement dans le pays en passant par nos produits nationaux. Il n’est pas normal par exemple que le coton malien, dont tout le monde se plaît à dire la qualité, ne soit transformé au Mali qu’à hauteur de 2 %. Nous le disons depuis des années, mais il est temps que nous passions à la réalisation.
Nous avons également l’ambition d’offrir des emplois aux jeunes de ce pays. Ce n’est plus le temps de la Fonction publique qui pourrait le faire, en avoir la prétention. C’est l’affaire du privé, singulièrement industriel. Toutes ces raisons font que nous ne pourrons jamais mépriser ces secteurs-là. Nous avons pour le secteur industriel, les plus hautes ambitions et nous comptons avec le Patronat industriel, avec le Livre blanc qui nous a été soumis, aller le plus loin possible et faire en sorte de créer les conditions idoines pour l’émergence d’une véritable industrie au Mali. J’en prends l’engagement. C’est l’intérêt du pays, c’est l’intérêt des jeunes, surtout et nous irons vers cela inévitablement. Inch Allah !
Pour l’heure, je voudrais encore demander de rester confiant comme il a toujours su le faire, de songer que nos intérêts sont liés. Il ne saurait en être autrement. Nous avons besoin d’eux. Tout État dont les dirigeants sont responsables est obligé de compter sur l’entrepreneuriat privé, singulièrement sur l’industrie. Au Mali, dans tous les secteurs : BTP, la manufacture… nous ferons en sorte que les conditions soient réunies pour booster toujours plus haut, plus loin, plus fort notre secteur industriel. Nous avons eu aujourd’hui une journée inaugurale de haute tenue. Je souhaite à la journée pour l’industrialisation un bel avenir en tout cas, c’est une belle promesse pour le pays. Sachons tenir l’opportunité que nous offrent ces hommes et ces femmes de mérite, de courage et d’expérience ».
Les travaux de la Journée ont pris fin hier dimanche. Deux panels étaient à l’ordre du jour : « des PME pour l’éradication de la pauvreté et la création d’emplois pour les femmes et les jeunes » ; « l’apprentissage par alternance dans les entreprises industrielles ».
Par Bertin DAKOUO
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