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Le couple : Retrouvailles après 7 ans de vie séparée
Publié le mercredi 2 decembre 2015  |  L’Informateur




Les longs cheveux d’ébène de Fati n’ont d’égal que l’amour dont elle paraît faire preuve à l’égard des artifices dont se parent les belles femmes du Mali : rouge à lèvres incendiaire, vernis sur les ongles, rimmel sur les cils, crème de beauté. Pendant sa minutieuse observation, Madou sent monter en lui le désir d’avoir à nouveau sa femme sous son toit, avec ses quatre enfants de père différent.

La seule voix au téléphone lui remplit de surprise. C’est à peine croyable ! Aucune visite ne peut lui être agréable en ce moment. Moins d’une heure plus tard, Fati frappe à la porte d’entrée de l’unique chambre de Madou qui piaffe d’impatience. Il a tout le temps pour détailler l’élégante visiteuse qui s’arrête juste devant lui. Fati n’a pas changé après sept ans de vie séparée : même silhouette avec sa voix sensuelle, même parfum. Un étonnement grandissant se lit dans son regard. Après un moment qui parut un siècle ses lèvres s’ouvrent pour dire : Qu’as-tu de si important à me dire ? Et l’argent promis ?

Madou se sent très solitaire dans sa chambre avec, pour unique compagnon, un vieux poste radio. Les longs cheveux d’ébène de Fati n’ont d’égal que l’amour dont elle paraît faire preuve à l’égard des artifices dont se parent les belles femmes du Mali : rouge à lèvres incendiaire, vernis sur les ongles, rimmel sur les cils, crème de beauté. Pendant sa minutieuse observation, Madou sent monter en lui le désir, l’envie inégalée d’avoir à nouveau sa femme sous son toit. Ses nombreuses maternités post-séparation ne l’ont pas trop affectée. La perspective de vivre flanqué de trois enfants –deux filles et un garçon- dont il ne connaît ni d’Adam ni de Eve leurs pères en plus du sien ne l’effrayait point. Ses revenus ont pris l’ascenseur depuis qu’il s’est autoproclamé maçon, lui qui fut berger, gardien, manœuvre.

Madou continue à n’avoir d’yeux que pour la noire d’ébène. Et Fati, faute de trouver un autre, est suspendu aux flots de paroles intarissables qui sortent de la bouche du nouveau maçon. Le miracle se produit. La résistance de Fati est vaincue. Ses inquiétudes semblent disparaître comme par enchantement. Le maçon dispose de revenus confortables pour nourrir la maisonnée. Assorti de gage de tourner définitivement le dos aux querelles intempestives se terminant par des coups poings. Le sang et les larmes ont été jusque-là les moyens de gouvernance de Madou. L’éponge passe sur la dernière scène pénible. Scène de rupture qui aurait pu être banale si les paroles échangées n’avaient pas été des plus cruelles et les coups et blessures si durs. Madou traitait de pute sa femme. Et promettait d’en trouver une autre dans les prochaines semaines. Après tout, les femmes courent la rue. Madame voyait en son époux un bon à rien, pauvre comme un rat d’église et qui s’en prend à elle pour masquer son incapacité de subvenir aux besoins de sa famille. La nuit de l’affrontement, Fati a mis au monde un joli garçon, passablement affecté. Enfin, plus question de jeter les affaires de sa douce moitié en cas d’éventuel conflit dont le mode de règlement sera désormais axé sur le dialogue. En retour, elle promet de reprendre sa place dans le foyer conjugal très bientôt.



L’oncle se tient à distance

Le couple était abonné aux querelles. Pas un jour où il ne s’offrait en pâture aux voisins ou simples passants. Elles redoublaient d’intensité en dépit des interventions multiples, notamment des notables dont l’oncle du mari. Madou a découvert avec une foudroyante rapidité les qualités et les défauts de son épouse. Qui ne rechigne guère à accomplir les plus rudes besognes et de faire tous les métiers depuis la lessive, en passant par la collecte des sachets et bidons plastiques, jusqu’à la vente saisonnière des mangues, oranges ou autres avocats. Cependant, elle ne passait pas inaperçue. Son charme auquel peu d’ouvriers –maçons, ferrailleurs, plombiers, que sais-je encore – résistaient, procurait des ressources à même de bouillir la marmite. Surtout que son époux avait régulièrement le gousset dégarni.

Fati tient promesse. Deux jours après la longue entrevue, elle reprend sa place, armée d’ustensiles de cuisine et de sacs de voyage contenant les vêtements. Seul l’unique fils de Madou a fait avec elle le voyage. L’odeur de la bonne cuisine envahit tout le voisinage. Elle n’oublie point de faire une bonne assiette pour son beau, l’oncle du mari. Une façon de prendre le pouls de sa réaction. La veille, Madou a soutenu devant ce dernier une version des plus tarabiscotées. Son « ex-femme » serait venue d’elle-même, tenaillée par la faim et le besoin. Qu’elle ne devait pas s’attendre à ce qu’il lui tend la main. En fait, il espère du fond du cœur que l’oncle prenne le contrepied de son point de vue, en lui enjoignant de la garder. Rien n’y fit. L’oncle se tient à distance. Sa fierté lui interdit de faire marche arrière. Ou plutôt le respect de la parole donnée. A la demande de son aîné frère, décédé par la suite, Coulou et lui avaient accompagné la dame chez elle. Tout en mettant en garde celle-ci de se remettre avec leur neveu qu’ils ont chassé.

Fati ignore tout de l’explication donnée par son mari à son oncle. Le repas servi, elle passe à l’offensive. Guettant d’un œil les réactions des épouses de l’oncle à l’annonce de chaque point de l’accord. Tous se murent dans un silence pesant. Elle retourne, sans obtenir le paraphe recherché. Première déception qui sera suivie de bien d’autres.

A suivre. . .

Georges François Traoré
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