BAMAKO - Des jihadistes basés dans le nord du Mali ont menacé lundi de "frapper le coeur de la France", qui bombarde depuis quatre jours leurs colonnes et leurs positions, leur occasionnant de lourdes pertes.
Le Conseil de sécurité de l`ONU doit se réunir lundi après-midi, à
l`initiative de la France, qui souhaite informer ses partenaires sur la
situation au Mali et son intervention militaire.
"La France a attaqué l`islam. Nous allons frapper le coeur de la France. Au
nom d`Allah, nous allons frapper le coeur de la France. Partout. A Bamako, en
Afrique et en Europe", a déclaré à l`AFP Abou Dardar, l`un des responsables du
Mouvement pour l`unicité et le jihad en Afrique de l`Ouest (Mujao).
La France, "en guerre contre le terrorisme" au Mali selon l`expression du
ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian, a bloqué vendredi la
progression vers le centre du pays des groupes armés islamistes, Al-Qaïda au
Maghreb islamique (Aqmi), Ansar Dine (Défenseurs de l`islam) et Mujao, qui
contrôlent depuis neuf mois le nord du Mali.
Dimanche, elle a bombardé pour la première fois leurs positions dans le
nord, à Gao et à Kidal, au coeur des territoires jihadistes, visant des camps
d`entraînement et des dépôts logistiques.
Jihadistes "au paradis"
Le porte-parole d`Ansar Dine Abou Dardar a refusé de donner un bilan des
raids français, se contentant d`affirmer que "tous les moudjahidine qui sont
morts sont allés au paradis".
Mais plus de soixante jihadistes ont été tués dimanche dans la seule ville
de Gao et sa périphérie, au cours de bombardements intenses, selon des
habitants de la région.
"Plus de soixante islamistes ont été tués dans leurs bases à Gao et aux
environs. La nuit, les islamistes qui sont restés cachés dans les maisons sont
sortis pour prendre les corps de leurs camarades", a déclaré à l`AFP un
habitant de Gao, joint par téléphone depuis Bamako, dont le témoignage a été
recoupé.
"Le bilan est lourd dans le camp des islamistes. Ils ont perdu énormément
en logistique et des hommes. Le chiffre de 60 victimes n`est pas du tout
exagéré à Gao. Le bilan est même certainement plus élevé", a indiqué à l`AFP
une source régionale sécuritaire.
Gao, Kidal, et la ville historique de Tombouctou sont les trois principales
villes du Nord malien, en majorité désertique, sous la coupe des islamistes
depuis près de neuf mois.
A Tombouctou, où les jihadistes ont mené ces derniers mois lapidations et
amputations, un enseignant a fait état d`un "début de panique" parmi les
familles des islamistes partis au combat, assurant que "beaucoup essayent de
partir dans le désert".
"Bloquer les terroristes, c`est fait. Ce qui a commencé à être fait
aujourd`hui, c`est s`occuper des bases arrière des terroristes", a expliqué
dimanche le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, qui a
jugé que l`intervention française en première ligne était "une question de
semaines".
"Il y a des raids en permanence. Il y en a en ce moment (dimanche, ndlr),
il y en a eu cette nuit, il y en aura demain (lundi, ndlr)", avait également
prévenu M. Le Drian.
Mais les familles des sept otages français détenus par des groupes
islamistes au Sahel craignent que l`intervention française mette leur vie en
danger.
"Nous allons faire aujourd`hui un communiqué sur les otages. A partir
d`aujourd`hui, tous les moudjahidine sont ensemble", a souligné le responsable
du Mujao, joint par téléphone par l`AFP depuis Bamako.
Aqmi détient depuis le 16 septembre 2010 quatre Français enlevés au Niger,
et depuis novembre 2011 deux autres capturés dans le nord du Mali. Une
septième personne a été enlevée le 20 novembre dans l`ouest du Mali par le
Mujao.
Les premiers vols d`avions de transport militaires britanniques pour
appuyer l`opération française devraient débuter lundi à partir d`une base du
nord-ouest de la France, a-t-on appris auprès de l`armée de l`air française.
La Grande-Bretagne fournira une assistance militaire logistique à la France
pendant son intervention, mais ne déploiera pas de personnel en situation de
combat.
Les préparatifs s`accélèrent également pour le déploiement d`une force
ouest-africaine chargée, avec l`aval de l`ONU, de déloger les groupes liés à
Al-Qaïda.
Les premiers éléments de la Communauté économique des Etats de l`Afrique de
l`ouest (Cédéao) se mettent en place, sous la direction d`un général nigérian,
Shehu Abdulkadir.
Le Nigeria doit fournir 600 hommes. Le Niger, le Burkina Faso, le Togo, et
le Sénégal ont également annoncé l`envoi chacun d`environ 500 hommes, et le
Bénin 300.
bur-thm/stb