Selon toute évidence, l’Imam Mahamoud Dicko a plutôt péché par l’inopportunité du moment que par le contenu de ses propos lesquels sont bien inspirés du Saint Coran et auxquels le Procureur Général Daniel Téssougué adhère parfaitement à en croire ses confidences à nos confères de la Radio Nyeta Diossé Traoré
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En assimilant les récents attentats à une «une punition divine», le Président du Haut Conseil Islamique, l’Imam Mahamoud Dicko s’est attiré la foudre de nombre de ses concitoyens et surtout, du Procureur Général Daniel Téssougué lequel a perçu en lui un apôtre du diable.
«Nous devons tirer les leçons des attentats à Paris, comme à Bamako, à Tunis ou ailleurs dans le monde […] Dieu est en colère. Les hommes ont provoqué Dieu», a ainsi jugé, l’Imam. De «l’apologie au terrorisme» a répliqué le Procureur Général.
Bien entendu, la question n’est ici, de distribuer le tort ou la raison sur le fond. Nous n’en avons pas la prétention. Signalons cependant que l’Imam a bien précisé ceci dans les mêmes déclarations: «l’être humain est sacré et la religion musulmane ne dit à personne de tuer en son nom». Une précision visiblement noyée par «la punition divine». Il paraît que l’esprit humain procède inconsciemment à un tri sélectif selon… Et pourtant !
La punition divine selon le Coran
Dans le Livre sacré des Musulmans, Dieu menace les hommes de plusieurs maux dont les cataclysmes naturels (les tremblements de terre, le déluge, la foudre, le feu, la fumée, etc. Et dans l’histoire de toutes les religions monothéistes, Il a plusieurs fois mis ses menaces à exécution suite à la perversion et la défiance dont les humains se sont rendus coupables sur terre (Sodome et Gomorrhe, le déluge universel, etc.).
Mais ces menaces ne font pas seulement allusion aux forces de la nature. Il y a aussi les hommes. Dans le Livre sacré, Dieu dit en effet se servir des «tyrans» et des «injustes» pour sévir contre d’autres injustes. La sourate Al-An’âm, est très explicite sur la question. «Et ainsi, Nous accordons à certains injustes l’autorité sur d’autres (injustes) à cause de ce qu’ils ont acquis» (verset 129).
La même sourate précise : « Il (Dieu) est capable, Lui, de susciter des tourments contre vous, d’en haut, ou d’en dessous de vos pieds ou de vous confondre dans le sectarisme, et Il vous fait goûter l’ardeur (au combat) les uns aux autres» (verset 65).
Selon les érudits que nous avions consultés, les tyrans, injustes et autres extrémistes sévissant sur terre s’avèrent entre autres instruments de vengeance de Dieu contre la dérive et la perversion de l’espèce humaine. Le verset 50 (sourate Al-An’âm) le confirme bien : «Et (rappelez- vous) lorsque Nous vous avons délivrés des gens de Pharaon; qui vous infligeaient le pire châtiment: en égorgeant vos fils et épargnant vos femmes. C’était là une grande épreuve de la part de votre Seigneur».
Il n’en demeure pas moins que ces «instruments de vengeance» soient eux-mêmes jugés et condamnés pour ce qu’ils ont fait: «Et (rappelez- vous) lorsque Nous avons fendu la mer pour vous donner passage!… Nous vous avons donc délivrés, et noyé les gens de Pharaon, tandis que vous regardiez» (versets 49 – 50 – Al-An’âm).
Il est évident que la logique de Dieu dépasse l’entendement humain. Elle s’explique, cependant, en partie par cet autre passage du Livre : «Tout malheur qui vous atteint est dû à ce que vos mains ont acquis. Et Il (Dieu) pardonne beaucoup (Ach-Choûrâ: 30).
Le péché de l’Imam
Les terroristes et/ou jihadistes qui écument désormais le monde seraient-ils une réponse de Dieu à la perversion qui s’est installée sur terre, tout comme le SIDA a jadis été assimilé à une punition divine pas seulement par les religieux? Les croyants, de toutes les époques, ont toujours fait un parallèle entre les catastrophes du moment, qu’ils soient naturels ou artificiels avec la colère divine.
C’est bien à cela que l’Imam Dicko fait allusion. Et il préconise de revoir le mode de gouvernance mondial, de revenir à nos valeurs et à Dieu, entre autres mesures correctives. Venant d’un leader religieux, les propos sont parfaitement compréhensibles. Mais était-ce le lieu et moment ? Là est la question quand-on sait que l’environnement et surtout le contexte ne se prêtent guère à l’exercice. Et pour cause. Des fanatiques peuvent bien percevoir dans son discours une Fatwa, c’est-à-dire un mot d’ordre. Pis, des jihadistes du monde entier sont susceptibles d’y voir une invite puisque percevant là, un terreau déjà fertile.
Le sage, dit-on, c’est bien celui-là qui fait sien cet adage : «Si la parole que tu vas dire n’est pas plus belle que le silence, alors ne la dis pas». Bref, le silence n’est pas un péché.
Cela, le Procureur Général aurait également dû faire sien. Puisque rien ne l’oppose au Leader religieux en question, il pouvait adopter une démarche beaucoup plus pédagogique. Les deux hommes s’avèrent en effet sur la même longueur d’onde. Tous deux sont croyants et convaincus de la nécessité de recourir à la sagesse, à l’union sacrée et non à la confrontation stérile et contreproductive. M. Daniel Téssougué a justement fait part de cette vision des choses à nos confrères de la Radio «Nyeta» présumée proche de Mahamoud Dicko. C’était, nous rapporte M. Djossé Traoré, à la faveur du conflit ayant opposé Magistrats et Parlementaires à la suite de l’arrestation du député de Ouéléssebougou pour agression présumée du Juge de ladite localité. «M. Daniel Téssougué, indique Djossé Traoré, était bien dans la logique de l’apaisement et de la sagesse. Il a convenu de la nécessité de revoir nos comportements, de revenir à Dieu pour le bonheur de ce pays».
Nous ne pensons pas que Mahamoud Dicko, et même le Malien lambda veuillent le contraire de cette exhortation. La nécessité, voire l’impératif du changement nous incombe tous, au nom de Dieu et de la République et…, soit dit en passant, quel était donc l’état des lieux dans les contrées aujourd’hui occupées, ou en en tout cas, théâtres d’intenses activités terroristes, à l’image de la Syrie, de l’Irak, de la Libye, entre autres ? Eh bien, les hommes y étaient auparavant divisés et leurs sociétés respectives, complètement désarticulées. Alors, la tâche n’en fut qu’aisée pour les assaillants. Bref, si nous ne nous entendons pas sur l’essentiel, ils viendront le faire à notre place. Simple !
B.S. Diarra