Premier acte : Bazoumana Fofana, opérateur économique malien installé à Dakar, avait une parcelle, objet du titre foncier n°11247 à la Cité du Niger. Une parcelle acquise dit-il, depuis 1979 avec son TF. A en croire Bazoumana Fofana, cette parcelle fait 60 lots dont la valeur s’élève à des milliards FCFA. Il l’a donnée en garantie à la Banque commerciale du Sahel (BCS), dont Me Abdoulaye Garba Tapo était son avocat, pour un financement de 600 millions FCFA en 1995. Sur les 600 millions, l’opérateur n’a pu obtenir de la BCS que 100 millions avec lesquels il devrait payer du riz paddy pour les usines de l’Office du Niger, lesquelles étaient à l’arrêt pour manque de matière première.
Mais à en croire l’opérateur, son riz a été finalement détourné par le directeur de l’Office à l’époque, un certain Fernand Traoré de l’Adéma/PASJ, au profit des militants de son parti. Toutes choses qui ont contribué à détériorer les relations de M. Fofana avec la BCS puisqu’il sera dans l’incapacité de s’acquitter de la créance de la banque.
A en croire Bazoumana Fofana, c’est sur ces entrefaites que Me Mountaga Tall (l’actuel ministre de l’Enseignement supérieur) l’a approché au nom d’une société qu’il partageait avec Dionké Yernagoré alias Babou Yara, Cheick Sadibou Cissé, la famille Niaré, en lui proposant de lui vendre le terrain déjà hypothéqué à la banque. Me Mountaga Tall et ses associés devraient réaliser un pont sur le terrain de Bazoumana Fofana afin de faciliter l’accès à leurs terrains. Bazoumana Fofana dit avoir refusé cette offre. Et c’est depuis là qu’ont commencé les malheurs de M. Fofana jusqu’à nos jours.
Face à ce refus de Fofana et profitant de ses démêlés avec la BCS, Me Tall et compagnies en tandem avec Abdoulaye Garba Tapo, avocat de la banque, vont pousser celle-ci à fermer unilatéralement le compte que l’opérateur y avait aux fins d’exercer immédiatement la procédure d’expropriation forcée sur son titre hypothéqué auprès d’elle. Suivront les chantages de Me Abdoulaye Garba Tapo.
« Par finir, pour me menacer, des sommations de payer avec des montants injustifiés de l’huissier commis par Me Tapo ne cessaient de me parvenir. Lesdites sommations portaient tantôt sur la somme de 85 millions FCFA, tantôt 170 millions. Or, le montant de mes retards de paiement était moins de 100 millions. J’ai contesté ces montants. Au cours d’une expertise ordonnée par le tribunal, mon compte a été arrêté à la somme de 113 millions FCFA en principal, frais et agios bancaires. J’ai approché la banque qui a consenti à m’accorder un moratoire de payement. Mais pour que cela soit effectif, Me Tapo m’a encore menacé et intimidé en exigeant le paiement pour lui tantôt de 5%, tantôt de 10% des sommes que je devais payer à la BCS, plus de 9 millions FCFA de frais d’huissier comme si la procédure avait continué. Finalement, il m’a méchamment obligé de payer 10%. C’est en ce moment que j’ai compris que leurs menaces étaient du brigandage et comme je ne voulais pas d’histoires, j’ai accepté malgré moi, la mort dans l’âme, sinon il n’y avait pas de raison que je lui paie cette somme », raconte l’opérateur Fofana.
Deuxième acte : Bazoumana Fofana dit avoir honoré son engagement avec la banque en lui payant le 1er novembre 1996 un premier payement à la banque de 10 millions de francs CFA et 1 million représentant les 10% de Me Tapo comme il avait demandé ; trois jours après (le 4 novembre 1996), un 2e paiement de 5 millions FCFA a été effectué à la banque qui a directement prélevé 500 000 FCFA sur son compte au profit de Me Tapo. Au total 16 millions FCFA ont été payés. « J’ai donc honoré mes engagements car, les deux paiements étaient faits dans la logique du règlement à l’amiable, et en ce moment toutes les poursuites judiciaires devraient normalement être arrêtées », explique M. Fofana.
Mais à sa grande surprise, sans l’accord de la banque, Me Abdoulaye Garba Tapo et son groupe vont mettre en vente ledit terrain au tribunal de la Commune II avec une mise à prix fixée à 130 millions et Cheick Sadibou Cissé, seul dans la salle d’audience (représentant la société des Mountaga Tall, Babou Yara et Niaré) n’a ajouté que 100 000 FCFA pour être déclaré adjudicataire suivant le jugement n°415. Nous étions en 1996. Tout cela malgré qu’il y avait un moratoire entre la banque et l’opérateur.
L’avocat de Babou Yara dément
Fort de ces irrégularités dans la procédure, Bazoumana Fofana a donc attaqué ce jugement devant la Cour d’Appel de Bamako laquelle a infirmé le jugement rendu par le tribunal de première instance de la Comme II. Ce qui annulait la mise en vente du TF de M. Fofana. L’affaire fut transportée à la Cour suprême où dans un premier temps la 2e chambre de la Cour civile a cassé l’arrêt de la Cour d’Appel, confirmant ainsi la vente aux enchères opérée par le tribunal de la Commune II. Mais Bazoumana Fofana ne s’est pas avoué vaincu et la procédure judiciaire était toujours en cours à la Cour suprême.
Mais ce qui va encore compliquer la tâche à l’opérateur économique de Quinzambougou, c’est le fait pour Cheick Sadibou Cissé de revendre le même TF n° 11 247 à Dionké Yernangoré alias Babou Yara le 7 octobre 2002 alors que l’affaire liée à la vente aux enchères était toujours pendante devant la justice.
Ayant estimé que cette vente a été opérée sur du faux à partir du moment où l’adjudication de Cheick Sadibou Cissé a été faite illégalement, M. Fofana a aussi attaqué ce transfert de titre à Babou Yara devant la Cour suprême. Mais il n’aura pas gain de cause. Le démêlé judiciaire au niveau de la Cour suprême a duré jusqu’en 2009 où Bazoumana Fofana n’a pas pu en sortir vainqueur.
Finalement l’homme en est venu à la conclusion qu’il a été spolié de son TF par des ‘’brigands fonciers’’ avec la complicité de la justice de son pays. Il s’est donc confié à plusieurs personnes en sollicitant leur intervention notamment l’ex-président Amadou Toumani Touré ; l’actuel président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita ; Mohamed Ali Bathily alors ministre de la Justice. Mais rien à faire.
Nos investigations nous ont conduits à rencontrer l’avocat de Dionké Yernangoré alias Babou Yara, Me Moussa Doumbia. L’avocat a bien voulu mettre à notre disposition tous les documents liés à cette affaire.
« Bazoumana a perdu la bataille judiciaire. La Cour suprême a définitivement tranché en sa défaveur malgré tout ce qu’il a entrepris. Aujourd’hui, nous considérons cette affaire comme définitivement close. Je ne sais pas ce que Bazoumana Fofana a avoir dans la vente entre Cheick Sadibou Cissé et Dionké Yernangoré dit Babou Yara (mon client). Il a attaqué cette vente en vain devant la Cour suprême. Après avoir échoué, il a commis les avocats Moustapha Cissé et Alima Diallo. Sans succès. L’affaire a été définitivement jugée », a expliqué Me Moussa Doumbia.
L’avocat a démenti les arguments de Bazoumana Fofana selon lesquelles ‘’Me Mountaga Tall et ses associés devraient réaliser un pont sur son terrain afin de faciliter l’accès à leurs terrains’’.
« Me Mountaga Tall est l’avocat de Cheick Sadibou Cissé. Comme il est aujourd’hui aux affaires, M. Fofana veut simplement lui nuire. L’affaire est claire : monsieur Fofana a pris de l’argent avec la BCS en hypothéquant son TF. Il n’a pas pu payer l’argent de la banque et celle-ci a fait vendre aux enchères le TF par la justice. Où est le problème ? S’il avait pu payer la banque, il y aurait eu la main levée et on n’en sera pas là aujourd’hui. Mais la banque a une créance avec vous que vous n’avez pas pu payer ! », a souligné Me Doumbia.
Faute de soutien, Bazoumana Fofana s’est finalement remis à Dieu en Lui demandant de trancher. « Je ne les pardonnerai jamais et Dieu ne va pas les pardonner aussi », prévient Bazoumana Fofana.
A.V.S. Diakité