” Manœuvres dangereuses “, ” blessures involontaires “, ” Opposition à autorité légitime “, tels étaient, entre autres, les griefs reprochés au prévenu. Yaya Sangaré, c’est son nom, Inspecteur Général de police, comparaissait le jeudi 10 décembre dernier à la barre. Vêtu d’une chemise blanche, manches longues, pantalon noir, et tête rasée, l’accusé avait dû batailler durant plus d’une heure pour faire face aux faits qui lui étaient reprochés. Mais de quoi s’agissait – il exactement ?
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Tout tourne autour d’une affaire foncière, ou du moins d’un litige lié à la terre. Pour des terrains situés à Baco-djicoroni ACI Extension, l’utilisation des servitudes pose souvent des problèmes entre les particuliers. Ils parviennent difficilement à accorder les violons. Surtout avec les puissants du jour, eux qui s’estiment au-dessus de la loi. Tel est le cas soumis à l’appréciation du Tribunal de la commune V, le jeudi 10 décembre 2015. A la barre, disions – nous, l’Inspecteur Général de Police Yaya Sangaré. Ses voisins lui reprochaient une obstruction de la voie. En fait, il aurait voulu utiliser la servitude commune.
Les voisins avaient donc saisi la justice. Cette dernière ordonna à l’Inspecteur Général l’arrêt des travaux sur l’espace querellé. Cela en vertu d’une Ordonnance rendue le 23 novembre 2015. L’ordonnance était assortie d’une astreinte de 500.000 F CFA par jour.
L’accusé, Yaya Sangaré, prétend que la notification de l’Ordonnance n’est intervenue que le soir du 23 novembre, aux environs de 18h 45, que l’on avait ignoré sa résidence. Il en aurait d’ailleurs deux. Toutefois, il indiqua à la barre avoir fait appel du jugement rendu dès le lendemain, 24 décembre 2015. Mieux, Yaya Sangaré nia tout droit aux plaignants dans l’affaire en question. Au passage, il nia aussi toute ” opposition à autorité légitime ” mais avoua ” l’irrespect ” dans l’arrêt des travaux. Yaya Sangaré a reconnu avoir voulu entamer les travaux pendant un seul jour où il fut stoppé par la gendarmerie.
Le public assista par la suite à des échanges houleux entre l’accusé et l’avocat de la partie civile. Les deux ” Robes noires ” ont eu des mots très durs entre eux.
L’attitude du défenseur de la partie civile était fort à saluer. D’un ton calme, poli, il démonta en pièces les propos avancés par l’accusé. Il s’est appesanti sur l’Ordonnance d’arrêt des travaux, du constat d’huissier, et des propos du prévenu reconnaissant ” l’irrespect ” de la mesure. ” Nous avons souffert de ses agissements, nous -nous constituons partie civile et réclamons le paiement de 20 millions de F CFA de dommages “, conclua- t – il en s’adressant à Yaya Sangaré.
Il sera réconforté dans sa plaidoirie par le Ministère Public qui décela dans les propos de l’accusé des incohérences.
Il s’est dit surpris de l’allure des débats du jour.
Selon le Ministère Public, ” la description faite par Yaya Sangaré ne collait pas à la réalité “.
Le prévenu lui – même, avança t – il, reconnaît les faits à travers ses propos. Conclusion du Ministère Public, que l’Article 4 du Code de Procédure Pénale soit activé. Autrement dit, il se dit favorable à la Constitution de partie civile avec les droits y afférant.
Rendez – vous est pris pour le 24 décembre, date du délibéré. Auparavant, l’histoire reconnaitra qu’un Officier supérieur de Police, eu l’occurrence Yaya Sangaré, assume ” l’irrespect ” d’une Ordonnance rendue par la justice de son pays, le Mali. N’est -ce pas un autre cas d’école ?
Koné