Le président de la République a mis à profit sa tournée en 4e région du Mali pour fixer un nouveau cap : une large ouverture à toutes les composantes politiques. Pour ce faire, IBK a eu recours à des méthodes qui, tout en traduisant la nature condescendante et le paternaliste de ses rapports avec la majorité présidentielle, frisent la discourtoisie et la déloyauté.
Longtemps annoncée et ajournée pour des contraintes de calendrier, la tournée tant attendue du chef de l’Etat en 4e région a finalement eu lieu, la semaine dernière, de la façon la plus pompeuse. Elle a donné lieu à une convergence massive de cadres et collaborateurs administratifs ou politiques vers la Cité du Balanzan. Et, le moins qu’on puisse dire, c’est que la mobilisation n’a guère fait défaut pour la circonstance.
A chaque coins et recoin où, le président était annoncé, la liesse a été au rendez-vous, exultant à coups de slogans et de youyous, quoique la taille de la délégation l’ait disputé par endroit à celle des masses.
Par ailleurs, le passage d’IBK dans la région de Ségou aura été une opportunité pour les ses hôtes d’égrener leurs chapelets de préoccupations et aspirations. Dans un contexte où elles sont surtout tributaires de la paix et de la stabilité dans l’ensemble du pays, les attentions se sont plus focalisés sur les besoins locaux en termes d’emplois, d’accès de la population locale aux services sociaux de base, aux conditions d’accroissement de la production locale et du développement des avantages comparatifs, entre autres.
Devant la kyrielle de sollicitations l’ayant assailli, le chef de l’Etat s’est souvent gardé de donner des gages. Il a toutefois manifesté ses bonnes intentions par la pose de première pierre de certaines infrastructures, en se donnant à cœur-joie à l’inauguration de nombreux autres ouvrages entamés sous la transition pour certaines, soit par le régime précédent pour d’autres. C’est le cas, par exemple, des centrales hybrides de la Coopération danoise ou encore des salles de classe inaugurées dans le Cercle de Tominian, tous présentés comme des acquis du mandat d’IBK à mi-parcours.
Au fait, les partisans du président, sa propre famille politique ainsi que leurs alliés, ont mis les bouchées doubles, coupé les cheveux en quatre pour donner de l’allure et du contenu à sa visite en 5e région. Pour ce faire, en plus d’assurer une mobilisation des grands jours, la tendance politique connue sous le vocable de «majorité présidentielle» a même versé dans ce qu’il convient de désigner comme une usurpation d’acquis. Ses bienveillantes intentions ne lui ont cependant pas épargné le courroux et la foudre du mentor. Comme à ses habitudes, depuis qu’il a accédé aux commandes de la nation, IBK a profité de sa rencontre avec la majorité présidentielle pour lui remonter les bretelles, briser ses ardeurs et la rabrouer.
A ce propos, le président de la République persiste et signe : la majorité présidentielle, sa majorité, est largement en deçà de ses attentes ainsi que des exigences du contexte politique. Et de laisser entendre qu’elle ne convaincra jamais de ses performances tant qu’elle va continuer à «raser les murs» en éprouvant de la gêne devant les malaises du régime.
Au porte-parole local de la Cmp ayant fait une présentation laudative de son bilan, IBK n’a eu d’autre réponse que l’amabilité de lui rétorquer que si ses partisans sont convaincus de la valeur des acquis, ils doivent les défendre «becs et ongles, faits contre dires» au lieu de raser les murs.
Il n’y a rien dans l’Accord pour la paix qui compromette la souveraineté nationale au point d’être indéfendable, a-t-il lancé en guise d’exemple.
Ce n’est pas tout. Poursuivant son réquisitoire très sévère contre la majorité, le président sortant du Rpm, a réprouvé dans des allures paternalistes les vaines querelles de place dans son camp avant de mettre en garde contre le grand trafic d’influences qui a lieu en son nom.
Dans la même veine, le chef de l’Etat a redit à qui veut l’entendre qu’il ne doit pas ses fonctions de président à une famille politique mais au peuple malien qui l’a choisi «pour des raisons qui lui appartiennent».
L’allusion, pour nombre d’observateurs avertis, s’adresse moins à la majorité présidentielle dans son ensemble qu’au Rpm, sa propre famille politique, lorsqu’il dénonce un certain repli et le refus d’ouverture aux autres. Pour IBK, en clair, il est inadmissible de chercher à exclure de la gestion du pays ceux qui désirent apporter leur pierre.
Car, ils demeurent des Maliens en dépit de leur passé politique.
Ce n’est pas la première fois qu’il tente de se démarquer de ses origines politiques, mais pour peu qu’on sache lire entre les lignes, il est loisible de comprendre que la démarche du président de la République, motivée selon toute évidence par une nette volonté d’ouverture, s’apparente à un appel du pied à toutes les tendances politiques sans exclusive, dans la perspective du nouveau gouvernement très imminent.
De là à s’y prendre avec une posture qui jure avec la courtoisie entre alliés politiques est une autre paire de manche et commence à faire jaser dans les rangs de ses soutiens politiques.
La Rédaction