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Ademacratie: Pourquoi Alpha Oumar Konaré est silencieux ?
Publié le mercredi 16 decembre 2015  |  L’Inter de Bamako
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© AFP

Photo: Alpha Omar Konare




Comment ne pas relever, durant toute la crise de 2012, le silence d’Alpha Oumar Konaré ? L’ancien président qui avait voulu construire un Mali «pluraliste et ouvert» ne pouvait qu’être atterré par la régression démocratique de son pays. Il y a plusieurs raisons à l’absence de toute prise de position de sa part, raisons à la fois personnelles (son propre fils, officier dans l’armée malienne, était exposé) et politiques : son parti, l’Adema, se trouvait au cœur des turbulences, tout particulièrement visé par la remise en cause de la IIIème République et de son héritage.
Première rencontre avec «Alpha», en 1990. Un homme légèrement voûté sort d’une Renault 12, outil de travail du syndicaliste (il anime le mouvement syndical des enseignants) et du journaliste qui, infatigablement, court de droite et de gauche.
Habillé d’un ensemble saharien resté quelque temps, une fois élu, son inusable uniforme au point de susciter les sarcasmes des Maliens, AOK est volubile et a le tutoiement facile. La force de conviction et l’optimisme sont caractéristiques du militant, qui ne s’est pas encore départi des formules et tics de langage propres à sa génération d’intellectuels frottés de marxisme.
Fils d’enseignant, né à Kayes (région occidentale du Mali) dans les années d’effervescence politique qui précèdent l’indépendance, Alpha Oumar Konaré choisit lui aussi la carrière de l’enseignement, tout en s’initiant très tôt au militantisme syndical. Après des études d’histoire à l’Ecole normale supérieure de Bamako, et s’étant marié à une condisciple, Adame Ba Konaré, qui deviendra elle aussi historienne, il part en 1971 pour la Pologne où il reçoit une formation d’archéologue. Rentré dans son pays en 1976, il travaille dans l’administration tout en militant comme de nombreux cadres maliens dans le principal parti clandestin, le Parti malien du travail.
En 1989, le paysage change, Jamana ose lancer le journal «Les Echos», qui devient l’un des relais principaux du mouvement démocratique en émergence. L’impact des «Echos», de même que d’autres publications, est considérable et la presse au Mali aura vraiment été une accoucheuse de la démocratie, acquérant ainsi un statut qui explique l’ouverture médiatique après le renversement de Moussa Traoré Alpha Oumar Konaré quitte officiellement la direction de Jamana et prend la tête du parti de l’Adema-Pasj (Parti africain pour la solidarité et la justice). Il en est le premier président et le délégué à la conférence nationale de 1991.
Entre l’intégration et la décentralisation se situe la démocratie. On ne peut nier à Alpha Oumar Konaré la sincérité de son engagement en faveur d’un système qu’il a contribué avec d’autres à instaurer au Mali, ce qui lui permet de dire et redire sa conviction que les peuples d’Afrique sont mûrs pour celle-ci, et qu’elle passe notamment par la libération totale de l’expression, et donc des médias :
«La liberté de la presse conditionne toutes les libertés, ici et ailleurs. La liberté de la presse crée les conditions d’une plus grande transparence, d’un plus grand contrôle des pouvoirs politiques et administratifs… [et] d’une plus grande participation de la population.»
Conscient des accusations visant les médias maliens, dont la contribution démocratique peut sembler à l’usage bien mince, il conserve le même optimisme que jadis, assurant que les choses iront s’améliorant quand les journalistes seront dotés d’un vrai statut, professionnel et matériel.
Ensuite il y a … la politique. Alpha Oumar Konaré sait que son bilan présidentiel a été très controversé au Mali. Alors il revient sur ses projets, ses espoirs, et ses déceptions. Du moins reconnaîtra-t-on à l’énoncé des réformes engagées que de nombreuses voies ont été ouvertes.
L’ancien président tient en particulier à s’expliquer sur son échec (relatif, tempère-t-il toutefois : «je n’ai pas fait ce que j’avais souhaité. J’aurais certainement pu mieux faire. Cependant les résultats… plaident en notre faveur») face à la réforme de l’éducation, les perspectives consignées dans un Programme décennal l’on met à part l’effort fourni en matière de recrutement de maîtres et de construction de lycées, le changement n’est guère palpable. La raison essentielle, selon lui : il n’y a pas eu de consensus.
Pire, l’école est devenue le champ clos des rivalités politiques, qui avaient trouvé ce relais pour s’épanouir. «Il existait une volonté délibérée de certains hommes politiques de nous conduire vers l’instabilité scolaire avec la recherche à tout prix d’affrontements», souligne ce leader doté d’un réel charisme, mais auquel ses adversaires reprocheront d’avoir surtout, une fois au pouvoir, «fait de la politique».
Depuis la période d’Alpha Oumar Konaré, les accusations de corruption des élites n’ont cessé. Sous ATT on entendra le même refrain, entonné par les Maliens comme par les ambassades étrangères : jamais on n’a autant «volé» dans ce pays !
Dans un livre à charge, Tahirou Bah écrit : «il n’y a plus de sociétés ou d’entreprises nationales qui marchent au Mali. Les Adémistes ont ouvert toutes les marmites fermées par le Dictateur. Ils se comportent comme de vulgaires voleurs affamés et assoiffés».
Ailleurs on parle de la «mainmise de la pieuvre Adema». Avec une anarchie caractéristique, consistant à ouvrir toutes les voies sans véritable cohérence, la République de 1991- celle d’Alpha Oumar Konaré et d’un parti, l’Adema, aussi connu comme le «parti des professeurs» avait toutefois accouché d’une agitation culturelle qu’il aurait indiqué de transformer en stratégie culturelle.
Devenu chef de l’Etat, Alpha Oumar Konaré a toujours considéré que la liberté de la presse faisait partie des «fondamentaux» de la IIIème République malienne. Créateur du premier périodique indépendant, il ne pouvait guère aller contre un mouvement qu’il avait lui-même enclenché, même si dans son entourage on pouvait avoir un point de vue différent. Si bien qu’à de très rares exceptions, il s’est refusé à réprimer-du moins ouvertement- les journaux qui s’attaquaient, souvent avec violence, à sa politique.
ATT, une fois élu, adoptera la même ligne de conduite, malgré quelques rares et retentissantes affaires de presse qui dissuadent de toute tentation de sanction. L’Etat malien, converti au «laisser-faire», n’a pas su favoriser la structuration du paysage médiatique.
Extrait de Mali : Une crise au Sahel (Thierry Perret)

N.B : Les titres sont de la Rédaction
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