Le scénario d’une Afrique changeant de partenaires : les nouveaux arrimages
Selon les tendances actuelles accentuées par la crise mondiale, l’Afrique peut diversifier ses partenaires et s’arrimer à de nouvelles puissances émergentes notamment la Chine. Ce scénario peut être décliné comme le maintien d’un pacte post colonial ou au contraire comme une opportunité de bénéficier de technologies adaptées, d’entrepreneurs en phase avec le milieu. Il peut en résulter alors une diversification du système productif et une montée en gamme des produits exportés.
Le scénario d’Afrique intégrées autour de pôles régionaux : l’ancrage régional
L’intégration régionale peut résulter de la combinaison de régionalisme porté par les règles et les institutions et de régionalisation portée par les acteurs et les projets de développement. De grandes puissances régionales telles l’Afrique du Sud ou le Nigéria émergeraient. Des reconfigurations se feront autour de ces pôles. Les insertions à l’économie mondiale seront fortement différenciées selon les pays et selon les régions. Des Afriques duales sont alors possibles, entre une Afrique «utile» et une Afrique «exclue» qui correspond à des différenciations spatiales et sociales croissantes. Ce scénario supposerait alors des mécanismes de compensation des asymétries territoriales et des forces centripètes allant des centres vers les périphéries.
Le scénario d’Afriques différenciées : les décalages
Les trajectoires diversifiées africaines partent des potentialités et capabilités propres aux différentes cultures, sociétés ou écosystèmes. Le processus de décentralisation, la mise en place de projets partant des acteurs du bas et localisés, la priorité donnée aux questions environnementales peuvent accroître le caractère bigarré de l’Afrique. Il y aura alors différenciation croissante des sociétés africaines. Les priorités agropastorales ne sont pas les mêmes pour les économies nomades des Touaregs, pour les cueilleurs de la forêt équatoriale ou pour les paysans des hautes terres malgaches. Le choix entre l’économie ouverte sur l’extérieur ou orientée vers le marché intérieur diffère entre les petits pays côtiers et les grands pays. La gestion de l’autosuffisance et de la sécurité alimentaire se pose dans des termes radicalement différents dans les petites îles surpeuplées et dans les grands pays où la terre est abondante. Les pays sahéliens enclavés et les pays en guerre risquent de se marginaliser. Les pays agro-exportateurs connaîtront une spécialisation appauvrissante s’ils ne diversifient pas leurs exportations. Les pays rentiers miniers ou pétroliers subiront les risques de malédiction et d’instabilités s’ils ne gèrent pas leurs rentes.
Il n’y a pas de sens de l’Histoire, il y a des histoires auxquelles les hommes donnent sens.
Source : Géopolitique de l’Afrique, Philippe Hugon