Après les rencontres d’échanges lors de la 21ème Conférences des Parties sur le Climat à Paris du 30 Novembre au 12 Décembre 2015, un protocole d’accord a été adopté. Mais qu’est-ce que le Mali gagne dans sa mise en œuvre ?
Juste, dynamique, différencié et juridiquement contraignant, voilà les appréciations faites par la majeure partie des spécialistes du climat. Ainsi, les discutions sur le dérèglement climatique ne sont plus l’affaire des universitaires ou des gouvernants. Il est à côté de nous, dans notre vie quotidienne :
- Il est dans la baisse du rendement des récoltes ;
- Il est dans le tarissement des fleuves et leur ensablement ;
- Il est dans l’insécurité alimentaire ;
- Il est dans la consommation de la viande ;
- Il est dans la consommation de l’électricité à base d’énergies fossiles ;
- Il est dans l’inondation de nos champs et habitats ;
- Il est dans la disparition de nos forêts ;
- Il est dans la disparition des banquises ;
- Il est dans la désorientation du paysan sur la durée des saisons des pluies ;
- Il pleut à Sikasso désormais comme à Mopti et un jour comme à Gao et Kidal ;
- Etc.
Alors, à la COP21 (Conférence des parties, 21èmeédition), lors de la grande messe sur le climat, petits et grands pays ont parlé et pris position sur deux aspects clés et compréhensibles pour le monde « non savant ». Il s’agit de :
- L’atténuation : c’est tout simplement diminuer, voire arrêter les émissions de gaz dits à effets de serre surtout du gaz carbonique(CO2) qui augmenteraient la température moyenne mondiale à cause de son effet de serre dans l’atmosphère. Un exemple : si vous faites fonctionner une usine pour transformer le coton du Mali avec du pétrole, vous émettez du CO2 même si les autres se sont « développés » grâce à ces industrialisations. Maintenant il s’agit d’arrêter d’émettre ces gaz et de les remplacer par des énergies dites propres comme le solaire, l’hydraulique, l’éolienne, même le nucléaire…
Comment les 196 parties veulent atténuer ?
Ils ont décidé de ne pas dépasser l’augmentation de la température de 2°c au-dessus duquel toutes les catastrophes citées ci haut seront des réalités et la vie sur terre disparaitrait. Pour être très ambitieux, il a été aussi décidé de se limiter à un maximum de 1, 5°C. Pour y arriver, tous les pays ‘’parties’’ doivent faire des efforts. Mais pour le moment, malgré l’accord à Paris le gap n’est pas comblé et est nuancé sous les différentes révisions tous les cinq ans, d’où un accord dynamique.
- L’adaptation : il s’agit des différentes stratégies pour faire face aux effets néfastes et aux risques liés aux changements climatiques déjà en cours dans les différents pays en voie de développement, surtout l’Afrique. Ça veut dire tout simplement de faire face à la diminution de la pluviométrie et ses conséquences, la pullulation de certaines maladies et ses conséquences, etc. à travers des projets efficaces. Mais comment l’Afrique pourrait avoir des moyens pour financer ces différents projets ? C’est là, la compensation par les plus grands pollueurs, les pays les plus riches qui polluent à plus de 95% à cause de leur industrialisation (charbon et pétrole). L’Afrique qui pollue moins de 3% demande des moyens conséquents pour son adaptation et le transfert des technologies. Un plancher de 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 a été déterminé à Paris et on revoit après 2020. Entre temps, les différents dirigeants ont changé aussi bien que les politiques. Dans ces conditions, qui reconnaitra ces engagements ? Pour le moment, on n’a pas une cour pénale internationale de la justice climatique. L’idée est en train d’émerger et les Africains vont signer encore le premier et seront victimes de leur engagement précité comme ce fut le cas avec la CPI –droit de l’homme.
Voilà de façon un peu caricaturé les deux concepts clés. Tous les autres viennent compléter ces deux sans être moins importants.
Dans tout ça, qu’est-ce le Mali à fait à Paris et qu’est- ce qu’il y gagne ?
Le Mali a été représenté à la COP 21 par une forte délégation diverses : Le gouvernement autour du Ministre en charge du développement durable par les chefs de directions des services rattachés, des conseillers techniques aguerris, des chargés de mission et même par plusieurs anciens ministres de l’environnement pour assurer la continuité des engagements et des stratégies en évitant des écueils des COP. La Société civile surtout des organisations des femmes était également de la partie. Le Mali occupe la présidence du groupe Afrique des négociateurs par la personne du jeune Seyni Nafo, bien compétent et rodé en la matière.
Une participation remarquable d’entrée de jeu par un projet innovateur : « Le fonds vert climat », mis en place depuis 2012, qui est déjà fonctionnel et qui a séduit les autres pays qui ne sont pas encore à ce niveau. A cette présentation, tous les participants maliens avec leurs partenaires techniques et financiers ont défendu ce projet qui été une référence pour les autres.
Une participation remarquable lors de la conduite du groupe Afrique des négociateurs qui produit en fait des lignes de discutions pour les parties politiques (présidents et ministres).
J’oubliai ! Il y avait même une dizaine de député à l’Assemblée Nationale du Mali. A sa tête son président était de la COP même si leur participation n’a pas été très visible. Ils ont quand même participé à la grande messe qui est de fait une formation en vue de faire évoluer les législations au niveau national, s’ils ont compris quelque chose dans ce grand bazar qui ne dit pas son nom.
L’accord est obtenu avec des engagements des différents pays. On peut dire que c’est une COP inédite dans la mesure où près de 140 chefs d’Etat et de gouvernements étaient là même les USA et la Chine, les ministres aussi en grand nombre. Pour la première fois, on parle d’une ambition de 1,5°C, le plancher de 100 milliards de Dollar est précisé….
Et après ?
Oui après c’est quoi ? Contraignant sur honneur ? Dans la pratique les financements seront-ils au rendez-vous ? Quels mécanismes de suivi ? Qui fait le transfert des technologies et le renforcement des capacités ? Entre temps, comment faire face à la disparition des pays insulaires ? Comment différencier l’aide publique au développement et ce financement dit additionnel ? A quand l’arrêt des exploitations du pétrole ? Le développement des énergies renouvelables sous quel rythme ? La bonne gouvernance des projets d’adaptation aux changements climatiques ? Autant de questions restent posées et la plupart reste sans réponse. C’est maintenant que le travail commence en réalité avec la mise en place d’un observatoire mondial sur le climat au niveau de l’ONU ?
Pour le Mali, les avantages suivants doivent être améliorés :
- Faire une réunion de restitution nationale en vue de tirer les leçons de la participation du Mali avec tant de monde. Comment les participants ont été utilisés à la COP21 ? la coordination de la participation ? la préparation de la participation ? Comment faire pour la COP 22 au Maroc, en Afrique, un pays très ami ?
- Faire du « fonds vert climat » un cheval de bataille pour l’adaptation en impliquant l’ensemble des acteurs surtout les collectivités locales ;
- Anticiper sur la coordination des différents projets d’adaptation en vue de capter de façon efficace les 100 milliards de dollar des pays riches ;
- Maintenir le collectif qui a préparé la COP 21 en vue de produire un plan global de mise en œuvre de la CPD (contribution prévue déterminée) du Mali.
Vivement la COP des paysans du Monde, un jour ! Je ne parle pas du forum social mondial.
SDF