Hier, à l’Assemblée, c’était la passe d’armes entre le ministre des Domaines, Me Mohamed Ali Bathily, et des députés sur la problématique de la gestion foncière. Souleymanebougou, Kalabambougou et autres mesures de suspension de toute activité foncière ont été les maîtres mots d’un débat parlementaire qui a déchaîné tant de polémique.
C’était attendu : hier, à l’Assemblée nationale, les questions d’actualité auxquelles les ministres des Domaines, Me Bathily, et du Culte, Thierno Diallo, respectivement sur la crise foncière et le bilan de la tragédie de Mina, en Arabie Saoudite, ont focalisé tous les regards. En particulier, le dossier foncier, projeté au cœur de l’actualité brûlante, en raison des mesures de démolition ordonnées sur des sites d’habitation, a provoqué une véritable onde de choc au sein du parlement.
Le ministre des Domaines, qui a mis l’accent sur la nécessité du respect de la loi, apostrophé au vif par certains députés, a expliqué qu’il est pour la stricte application de la loi. Parlant du fond de certains dossiers fonciers, comme la démolition des concessions de Souleymanebougou ou de Kalabambougou, le ministre Bathily, face au feu roulant de ses interpellateurs, a déploré une certaine justice sélective, lorsqu’il s’agit, au niveau de la justice, de trancher plus rapidement des dossiers judiciaires liés aux mesures d’annulation ordonnées, au détriment d’autres, impliquant des agents publics. De fait, le ministre des Domaines a reconnu que la mesure de démolition de ce site a été ordonnée pour des raisons humanitaires, tout en déplorant, dans le cadre de la gestion de ce dossier brûlant, le manque de solidarité gouvernementale.
« On veut défendre des squats et non le droit », s’est indigné le ministre Bathily, lequel est convaincu que le titre de propriété de l’Aci a été vandalisé, en ce sens que jamais, dans ce pays, aucun maire, aucun préfet, ni aucune autorité n’ont aménagé des parcelles, en y construisant des bornes électriques, des bornes d’eau, des goudrons, des ponts, des fossés, avant de les céder, sous la forme d’une simple lettre d’attribution. En soutenant que les intéressés, en ce qui les concerne, pour le site de Soulemanebougou, savaient qu’il s’agissait d’une violation manifeste de la loi, le ministre interpellé, comme il s’en est défendu, était persuadé que les intéressés savaient à l’avance que le site, objet de la convoitise foncière, était bel et bien la propriété de l’Aci.
Le ministre des domaines, sur la responsabilité des agents fautifs, a clairement indiqué que les fonctionnaires de l’Etat, qui ont « pris sur eux la responsabilité de perverti l’application de la loi, ont été l’objet d’une plainte », même si celle-ci, a-t-il déploré, est en souffrance, y compris au niveau de la police judiciaire. D’où, la forte interpellation du ministre des Domaines à l’endroit des députés, face à qui il est persuadé qu’ils n’adoptent pas les lois pour qu’elles ne soient pas appliquées. « Je veux que mon pays soit un État de droit et non un État où on s’amuse à falsifier l’application de la loi », a-t-il martelé.
Démontrant son souci pour une meilleure application de la loi, le ministre de la Justice, au bénéfice de la sécurité judiciaire des citoyens, a expliqué que l’État ne peut pas être indifférent face à certains manquements à la loi, surtout lorsque celle-ci s’attache à la propriété privée et au respect de l’ordre public. C’est d’ailleurs ce qui l’a poussé à agir à Kalabambougou quand il a ordonné au procureur d’arrêter l’huissier, lequel, au moyen d’une grosse de justice, avait démoli, en son temps, près plus de 300 concessions, là où il n’en fallait que deux, tel qu’il lui avait ordonné par la justice. Si le ministre des Domaines, à l’époque ministre de la Justice, a intervenu pour l’arrestation de l’huissier, c’était, a-t-il assuré, pour des raisons liées à sa propre sécurité, en ce sens qu’il encourait la colère d’une foule compacte, prête à lui appliquer le châtiment populaire.
L’épineux problème lié aux cadastres a refait surface. Sur cette question, le ministre a déclaré que la France y a mis 150 ans à se le procurer, tandis qu’il s’agit là d’une procédure extrêmement couteuse pour l’État malien qui n’en a pas les moyens. En tout état de cause, le Mali s’y attèle, en récoltant des informations et des éléments contribuant à sa constitution, à travers la direction nationale des domaines qui veille au grain.
Autre conviction : aucun État ne peut assurer sa survie, en continuant à violer ses propres lois. À l’évidence, le Mali, pour la sécurité judiciaire, fera toujours, tel qu’il a été préconisé par le ministre des domaines, un point d’honneur à faire respecter la loi, dans toutes ses rigueurs.
Par Sékouba Samaké