« Le Mali s’est retrouvé au fond de l’abîme et comment et à quel prix ce vieux pays peut-il se relever? Nous avons le devoir de conjuguer nos efforts, de créer les synergies nécessaires, de nous unir autour de cette grave question. C’est à cette question que nous pourrons apporter une contribution efficace à la résolution de la crise qui nous a fait perdre plus de 2/3 du territoire ». C’est par ce cri de cœur que le président du Parena, Tiebilé Dramé, a donné le ton de la journée d’échanges sur la situation au nord du Mali, le 17 mai 2012.
Cette journée qui se tient dans un contexte d’impasse politique et institutionnelle particulièrement grave pour notre pays a regroupé, en plus du bureau national du Parena, les élus locaux et nationaux, les organismes et institutions internationaux, les représentations diplomatiques accréditées au Mali, ainsi que les collectifs et associations des ressortissants des régions nord du Mali
Rappelons que depuis le 17 janvier 2012 a débuté la cinquième révolte armée menée par des bandits contre le pouvoir central au nom de la rébellion touareg et plus précisément du Mnla. Cette énième rébellion a mis à nu les faiblesses criardes de notre armée et de l’Etat. Elle est la suite logique des révoltes armées de 1917 contre l’Etat colonial français, de 1960 puis 1990 et enfin 2006 contre le pouvoir central de Bamako.
Le président du Parena, Tiebilé Dramé, a insisté sur la nécessité de la tenue d’une telle rencontre. Selon lui, elle participe de la volonté de trouver des solutions adéquates aux problèmes du pays. «La révolte de la jeunesse malienne des régions occupées doit être relayée et amplifiée dans chaque quartier, dans chaque village du pays. La question du Nord n’est pas une question du Nord, c’est la question de tout le pays, c’est la question du Mali» a-t-il martelé.
Au cours de cette journée d’échange, trois panélistes ont édifié les participants à travers trois thèmes. Le premier conférencier, l’inspecteur général de police Mamadou Diagouraga, a expliqué le processus de négociation des différents accords entre Bamako et les différents mouvements rebelles, de 1991 à 2006, à travers le thème «Analyse critique de l’accord de Tamanrasset (janvier 1991), du Pacte National (avril 1992) et de l’accord d’Alger (juillet 2006) ».
Parlant des revendications du Mnla et d’Ansar Eddine, Zeidane Ag Sidalamine a invité les mouvements au dialogue et à plus de retenue. Le conférencier a souligné les efforts de l’Etat dans la mise en œuvre du processus de décentralisation. Selon lui, l’engagement de l’Etat pour le développement des régions Nord du Mali s’est traduit par le vaste programme appelé Pspsdn. Malgré ces efforts, il a invité l’Etat à multiplier les stratégies pour le développement de ces différentes zones.
Le troisième conférencier, Zeïni Moulaye, expert en questions sécuritaires et paix, a expliqué la nécessité du soutien de la Communauté internationale pour une sortie de crise définitive. Selon lui, l’Etat malien ne peut à lui seul résoudre cette crise qui dépasse largement ses frontières avec l’amplification du terrorisme international.
Abondant dans le même sens, le représentant de l’Union Européenne au Mali, Richard Zink a invité les uns et les autres à faire preuve de sagesse et de tolérance pour la cause de la nation malienne. Selon lui, le Nord a toujours été une priorité pour la coopération européenne. «Nous souhaitons un Mali uni et prospère. Nous sommes confiants en la capacité du Mali à résoudre la crise du Nord et nous sommes persuadés que les partenaires (Cédéao, les Nations unies, l’Union africaine, les pays du champ et les autres partenaires techniques et financiers), tous comme nous-mêmes, sont prêts à appuyer les efforts du Mali» a-t-il conclu.
Le collectif des maires du Nord a estimé qu’il est illusoire de vouloir négocier avec les groupes armés. Sadou Diallo, maire de Gao, a rétorqué l’idée selon laquelle l’armée ne disposerait pas de moyens logistiques pour les bouter hors du territoire. Les fils du Nord n’ont pas manqué l’opportunité de se faire entendre et apporter leur modeste contribution dans la recherche de la paix, la stabilité et le développement durable. Mohamed Ag Erlaf, coordinateur du Pspsdn et Zeidane Ag Sidalamine, ont émis les vœux ardents d’un retour sans condition à la paix et de chercher une issue favorable à ce conflit qui perdure. « Vraiment, nous avons soif de la paix. La paix rien que la paix. Nous sommes fatigués de cette guerre fratricide avec des conséquences énormes sur le développement des régions nord du Mali» ont-ils déclaré.
Gérard DAKOUO