Après la participation de la délégation malienne à la COP21, le Directeur Général de l’Agence des énergies renouvelables au Mali (AER-MALI), le Dr. Souleymane Berthé, est revenu sur cette rencontre internationale sur le climat, notamment sur les perspectives des énergies renouvelables dans les pays du Sud. Il a aussi fait l’état des lieux des énergies renouvelables au Mali, les projets exécutés et ceux qui sont en cours. Lisez notre interview exclusive.
Le Républicain : Que peut-on retenir globalement de la COP21, rencontre internationale sur le climat et spécifiquement sur les énergies renouvelables à laquelle vous-venez de participer ?
Dr. Souleymane Berthé : La COP21 est un sommet sur le climat. On peut dire que pour la première fois, les pays développés et les pays en voie de développement se sont assis autour de la même table afin de trouver un commun accord, un accord pour sauver notre planète. C’est-à dire limiter le réchauffement climatique à deux degrés. Et pour aboutir à ça, cela coûte trop cher, à peu près 100 milliards de dollars. Apparemment tous les pays se sont engagés dans cette direction. Aujourd’hui, pour atténuer les effets du réchauffement climatique, c’est les énergies renouvelables qu’on utilise. Les énergies renouvelables sont un moyen d’atténuation du changement climatique. Donc, une partie de ces financements sera allouée au développement des programmes des énergies renouvelables à travers le monde et surtout dans les pays émergents et en voie de développement qui subissent beaucoup l’effet du changement climatique. Donc, les pays comme le Mali ont beaucoup à gagner dans ce sommet.
Le Développement des énergies renouvelables est un des moyens les plus évidents pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, et l’énergie solaire est la plus abondante des énergies renouvelables dans les pays du Sud, mais les technologies et les financements y sont encore insuffisantes. Pourquoi ?
La ressource qui est le soleil est très abondante dans les pays du sud. Et comme toujours, les pays du sud n’ont pas pu, par faute de moyens peut être et de capacité, développer les technologies pour exploiter à fond cette ressource dont ils disposent en quantité et en qualité. Mais cela n’est pas une fin en soit. Je pense que les technologies sont matures aujourd’hui, et, aussi, il existe des financements. Il y a beaucoup de projets d’atténuation qui seront financés et les programmes d’énergies renouvelables vont en bénéficier. Il faut développer et financer la recherche dans le domaine des énergies renouvelables dans les pays du Sud. On peut mieux faire.
Quel est l’état des lieux dans le domaine des énergies renouvelables au Mali ?
Comme vous le savez, le Mali c’est un pays qui sait révéler très tôt dans le domaine des énergies renouvelables. Depuis 1964, il a été l’un des premiers pays à créer son laboratoire solaire après qu’il soit devenu le centre des énergies solaires pour ensuite devenir l’Agence des énergies renouvelables. Cela veut dire que le Mali veut développer cette forme d’énergie et est en train de développer les énergies renouvelables. On utilise les énergies renouvelables sous toutes ses formes au Mali, surtout l’énergie solaire photovoltaïque. Cette dernière est développée à petite échelle et à grande échelle. Pour l’énergie éolienne, on a fait des études et on sait là où on doit produire, comment on peut produire. L’atlas du vent existe déjà. C’est comme dans le solaire, on a l’atlas du rayonnement solaire qui est établi, donc on sait combien on peut produire, quand et où et à combien. Ça veut dire qu’on est en phase avec les recherches. Donc les technologies, on sait les utiliser. Aujourd’hui, dans le domaine des énergies renouvelables photovoltaïques, il y a beaucoup de projets qui sont déjà en cours. On a fait beaucoup de centrales hybrides maintenant. On a quitté le stade de centrale hybride, on se dirige vers la centrale solaire à grande échelle. Des centrales de quelque MW, c’est le cas de la centrale de Ségou (33 Mw) dont la première pierre a été posée. Une centrale dont le contrat a été signé est prévue à Kita (50 MW) avec une société française. Et en plus, on a lancé des appels d’offres pour la réalisation d’une centrale solaire de 50 MW à Sikasso, une autre de 25 MW à Koutiala, une petite centrale hybride de 5Mw à Nara. Donc, tout ça montre qu’on est dans le solaire. Aujourd’hui, la puissance installée est de l’ordre de 20 MW sans compter les centrales qui viennent d’être cités.
On voit que les énergies renouvelables sont moins utilisées. Comment renverser cette tendance, quand on sait que nous avons des ressources en abondance (le soleil, le vent, etc.) pour ça ?
Les ressources sont disponibles, maintenant c’est les aspects réglementaires qu’il faut voir pour renverser la tendance. Il faut essayer de créer des conditions attrayantes pour que les personnes qui produisent avec les énergies renouvelables puissent gagner leur compte. Donc il y a des aspects réglementaires qu’il faut revoir. Dans ce sens même, nous avons un projet qu’on nomme PAPERM (Projet d’appui aux énergies renouvelables) qui est chargé de voir ses aspects réglementaires, lois et autres pour pouvoir booster le secteur des énergies renouvelables, rendre le secteur de la production des énergies renouvelables le plus attrayants. Le projet est chargé de lever les barrières qui entravent le développement des énergies renouvelables au Mali.
Votre mot de la fin !
Nous sommes dans une lancée qu’on a commencé et je pense que nous allons partir, comme le Président de la République l’a dit, vers la production de l’énergie verte. C’est ça qui va sauver notre planète. C’est l’énergie du futur et nous allons toujours continuer dans ça. Les projets que je vous ai cités ne sont que le début. A la COP 21, on a eu des grands contacts avec des grandes sociétés qui viendront faire des études pour pouvoir produire à grande échelle. Par exemple 400 MW de l’énergie solaire au Mali et mettre les infrastructures pour que dans le futur même si le Mali arrive à produire plus, qu’il puisse exporter ses énergies renouvelables produites chez lui dans les pays voisins. De même, dans le domaine de la recherche pour faciliter le transfert de technique, il faut que nous nous attelions aussi à la recherche et nous sommes là-dessus. Nous sommes déjà en contact avec les Allemands pour mettre un laboratoire de classe internationale au Mali dans le domaine de l’énergie solaire.
Propos recueillis par Ousmane Baba Dramé