La tenue du Conseil Supérieur de la Magistrature le mardi 22 décembre dernier s’est soldée par le départ de Daniel Amagoin Tessougué de son poste de Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako. Un départ a donné lieu à toutes sortes d’interprétations.
Pour bon nombre d’observateurs, Daniel Amagoin Tessougué, le désormais ex-puissant Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako a payé le prix de sa contradiction avec l’Imam Mahmoud Dicko, président du Haut Conseil Islamique du Mali, laquelle a soulevé beaucoup de réactions au niveau des religieux musulmans. Mais en réalité, c’est une pure coïncidence. Puisque le Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako était bien avant cet incident sur le projet de départ du Garde des Sceaux pour la session ordinaire du Conseil. Un conseil qui aurait pu se tenir bien longtemps n’eut été l’agenda du président de la République, président du Conseil Supérieur de la Magistrature. Déjà, sur ce projet initié par la ministre bien avant les attentats terroristes, le départ de Daniel Tessougué du parquet général de Bamako avait déjà sa logique pour des raisons évidentes que les magistrats du parquet sont sous la hiérarchie du Garde des Sceaux et sont amovibles à tout moment. Et à ce titre, chaque ministre de la justice est censé travailler avec des membres du parquet de son choix. Nommé à ce poste par un décret du président Dioncouda Traoré sur un projet du ministre Malick Coulibaly depuis 2012, Daniel Amagoin Tessougué n’a-t-il pas fait son temps ? Attribuer le départ du Procureur Général aux derniers événements, en occurrence l’incident sur « l’apologie au terrorisme » n’est qu’une fausse lecture et c’est méconnaitre le statut de la magistrature dont le président de la République est le garant de l’indépendance. Mieux, sur les propos de l’imam Dicko, le président de la République lui-même est allé dans la même logique que le Procureur Général dans « Jeune Afrique ».
Aperçu sur le Conseil Supérieur de la Magistrature
Rappelons qu’en vertu de la loi organique sur le Conseil Supérieur de la Magistrature, le conseil tient chaque année sa session ordinaire pour statuer sur les questions relatives à l’indépendance de la magistrature et les nominations (mutations, nouvelles affectations). Le Conseil est présidé par le président de la République, le ministre de la Justice en assure la vice-présidence. Sur la question des nominations, le conseil travaille avec deux formations, l’une compétente à l’égard des magistrats du siège, l’autre à l’égard des magistrats du parquet. S’agissant des nominations des magistrats du siège, celles-ci touchent en principe les magistrats ayant trois ans de service dans un poste sur la base d’un projet de nomination du Garde des Sceaux, qui sont ensuite soumises à la formation du Conseil Supérieur de la Magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège. Le président de la République procède ensuite à la nomination par un décret. Les magistrats du siège sont inamovibles, c’est à dire qu’ils ne peuvent être nommés à un nouveau poste sans leur accord avant trois ans. Pour les magistrats du Parquet, le ministre de la Justice formule les propositions, qui sont ensuite soumises à la formation du Conseil Supérieur de la Magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet. Le conseil est composé, outre le chef de l’Etat et le Garde des Sceaux, de magistrats élus par leurs pairs et des membres de droit comme le président de la Cour Suprême. Le Conseil propose ou donne un avis sur les nominations des magistrats.
Daniel KOURIBA