Sous le regard indifférent des autorités, surtout sanitaires, l’abattoir frigorifique de Bamako, privatisé il y a quelques années, continue d’exercer dans des conditions d’hygiène catastrophiques, mettant en péril la santé des populations bamakoises qui consomment chaque jour de la viande provenant de cet abattoir digne d’un autre siècle. Face à cette indifférence totale des autorités, tous les regards sont désormais tournés vers les associations de consommateurs. Suite de notre enquête commencée en début décembre !
C’est un secret de polichinelle, la viande consommée à Bamako, en l’occurrence celle provenant de l’abattoir frigorifique situé au quartier ‘’Sans fil’’, est très sale, voir trop sale pour être consommée. Raison pour laquelle, après une enquête que nous avons menée au sein de l’abattoir en début décembre, nous avons mis en gros titre dans notre parution n° 217 du mardi 1er décembre 2015 : ‘’Abattoir Frigorifique de Bamako : Du ‘’poison’’ dans nos marmites’’. C’était peu dire, ou presque, pour qui connait les conditions dans lesquelles les animaux sont abattus dans ces lieux.
Des locaux vétustes, des instruments de travail moyenâgeux, à l’abattoir frigorifique, la bonne hygiène semble être le dernier souci du promoteur, M. Monékafo, qui depuis la privatisation de l’abattoir par l’Etat à son profit n’a presque rien investi pour améliorer la qualité des services.
A cause des mauvaises conditions d’hygiène de l’abattoir frigorifique de Bamako, la plupart des occidentaux, dont le personnel étranger de la mission des Nations Unies, celui de l’Union Européenne et d’autres représentations diplomatiques se gardent de consommer la viande rouge au Mali, qu’ils trouvent dangereux pour la santé.
Même scenario au niveau national où il ressort de nos investigations, que nombre des hauts cadres, ne consomment pas la viande provenant de l’abattoir frigorifique de Bamako, qui en réalité n’est qu’un nid de maladies. Nombreux sont ceux qui s’approvisionnent aux alentours de Bamako dont au village de Dialakoroba.
Interrogé sur le sujet, le responsable d’une des associations de consommateurs dénonce l’indifférence des autorités face à cette situation qui pose un véritable problème de santé publique. « Nous avons plusieurs fois dénoncé les mauvaises conditions d’hygiène de l’abattoir frigorifique de Bamako, ainsi que les conditions de transport de la viande par les bouchers. Mais sans succès », regrette-t-il. Avant de révéler que des Russes avaient l’intention d’importer la viande du Mali en Russie, mais après avoir fait un tour à l’abattoir, ils ont fini par changer de d’avis.
L’indifférence des autorités et l’incompétence avérée des services techniques
Un mois après la publication de notre enquête sur les mauvaises conditions d’hygiène à l’abattoir frigorifique de Bamako, rien n’a encore changé. Ni le promoteur de l’abattoir, ni les services techniques en charge du contrôle des abattoirs, encore moins le Ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique qui n’a rien entrepris pour mettre fin à cette situation.
A la Direction Nationale des Services Vétérinaires où nous avons réussi à rencontrer le chef de la division inspection et santé publique, Dr Drissa Coulibaly, la question semble être d’une extrême sensibilité.
Il nous a fallu faire trois jours de va-et-vient pour pouvoir entrer en contact avec notre interlocuteur, Dr. Drissa Coulibaly, sur instruction du directeur général adjoint des Services Vétérinaires, Dr Camara qui nous a recommandé de saisir d’abord le Ministère du Développement Rural. Sans quoi, dit-il, il ne pourra rien nous dire. Chose que nous avons faite dans l’espoir d’avoir des informations sur le rôle de la DNSV dans le contrôle des abattoirs.
Hélas ! Nous sommes restés sur notre faim. Car le chef de la division inspection et santé publique, Dr Drissa Coulibaly, avoue n’être au courant de rien de tout ce que nous avons constaté d’anormal à l’abattoir frigorifique de Bamako. A savoir « de la viande déposée à même le sol sur des bâches en plastique, de la présence d’un monde de curieux, des enfants, des vendeuses et autres dans la salle de la triperie qui dans des conditions normales ne doit être accessibles qu’à un nombre restreint du personnel de l’abattoir pour des raisons de sécurité sanitaire, des tables rouillées… de la viande lavée avec l’eau du fleuve non traitée…etc. ».
Visiblement surpris de tout ce que nous savons, notre interlocuteur avoue ignorer toutes ces immondices que nous avons-nous avons découvertes à l’abattoir frigorifique de Bamako, avec nos yeux de journaliste trop curieux. Nous sommes bien tentés de le dire ainsi, car le chef de la division inspection et santé publique de DNSV (Direction Nationale des Services Vétérinaires), Dr. Drissa Coulibaly comme s’il était embarrassé par notre démarche, nous demande « si nous faisons cette enquête de notre propre chef, où si nous avons été incité par quelqu’un ». Quelle question !
« Nous nous ne sommes pas à l’abattoir au jour le jour, c’est la direction régionale qui est chargée du contrôle des abattoirs et nous recevons leurs rapports. Mais nous allons nous y rendre, et tout ce que vous dites se vérifie, nous allons prendre des dispositions », nous-a-t-il, promis.
En attendant, les pauvres populations de Bamako, elles aussi semblent être inconscientes du danger de la viande sale qu’elles consomment tous les jours et qui est source de plusieurs maladies qui tuent en douce.
A suivre….
Lassina Niangaly