Le président IBK est apparu, au cours de ce premier mandat, loin de l’ « homme à poigne » que les Maliens ont connu sous le régime d’Alpha Oumar Konaré. Et pour lequel, les électeurs lui ont fait confiance en l’élisant à la tête du pays en 2013.
Voilà à peu près trois ans qu’IBK est au pouvoir. Elu avec un large score (76,66%) président de la République en 2013, le « kan kelein tigui » (homme de parole) se trouve à mi-parcours de son mandat. Et déjà, les critiques ne manquent pas. Très souvent pris à partie par l’opposition qui lui reproche trop de passivité dans la lutte contre la corruption, IBK apparaît limité, parfois hésitant dans ses décisions. L’homme lui-même trouve qu’il a su maintenir le cap. Mieux, IBK affirme qu’il garde une main ferme sur le gouvernail.
Alors, pour certains, il est et reste l’homme de la situation. Mais, pour d’autres, le « Prince de Sébénikoro » n’est plus l’homme qu’il fut du temps de l’ADEMA PASJ. A l’époque, il était Premier ministre d’un certain Alpha Oumar Konaré. Pour certains analystes, c’est lui qui a sauvé le pouvoir d’Alpha Oumar Konaré en proie aux rivalités internes ; à une opposition (COPPO) aussi bien organisée que pernicieuse ; à un mouvement estudiantin prêt à tout pour faire aboutir ses revendications.
En 2013, quand il a fallu élire le président de la République, après une période de transition due au coup d’Etat, nombreux sont celles et ceux qui avaient certainement en mémoire le passage de l’homme à la tête de la Primature, avant de choisir leur bulletin de vote. Convaincus que la question sécuritaire, la restauration de l’Etat de droit, le respect des valeurs, ne peuvent être résolus que par un homme de caractère, rigoureux, intransigeant sur les principes. Cet homme, c’est IBK. Du moins, selon les croyances.
Un gouvernement en deçà des attentes
Le premier gouvernement n’a pas reflété le changement voulu et attendu par les électeurs. On retrouve, en effet, dans ce gouvernement des gens issus du système dont on croyait leur temps révolu. IBK a –t-il voulu récompenser ceux qui se sont alliés à lui, à la veille des élections ?
Il se trouve que pour certains observateurs, ce ne sont pas les partis politiques encore moins le parti d’IBK, qui l’ont élu à la tête de l’Etat. Les électeurs ont élu l’homme et non son parti. Dès lors, il ne devrait pas se sentir lier dans ses choix des hommes ni dans ses décisions.
Même si le gouvernement a été remanié à cinquante pour cent, il demeure moins agressif, moins entreprenant, mal inspiré. Erreur de casting ou stratégie politique pour 2018 ?
Le vrai IBK au-delà de 2018 ?
Jusqu’ici, les Maliens cherchent le IBK qu’ils ont jadis connu mais qu’ils ne retrouvent pas. Et qui se fait tromper à longueur de journée. Au contraire, ils découvrent un IBK trop docile et trop conciliant face au problème du Nord même si son égo a resurgi contre un certain Hervé Ladsous au moment de la première signature de l’accord d’Alger à Bamako, au grand plaisir de milliers de Maliens ; un IBK qui menace plus qu’il ne fasse réprimer donnant l’impression qu’il protège ses proches. Perspectives électorales obligent ?
En tout cas, lors de son nouvel an, IBK a, une fois, réaffirmé que le meilleur était à venir pour les Maliens. Au-delà de 2018 ?
On est tenté d’affirmer que le président IBK est à la recherche d’un appareil politique qui peut le porter pour un second mandat. Le RPM n’étant pas cette force politique, IBK est obligé d’adopter une stratégie de rassemblement autour de sa personne. Une stratégie qui consiste à maintenir un certain contrôle sur l’Adema Pasj dont la machine électorale reste intacte bien qu’il ait perdu le pouvoir ; à garder l’estime des « petits » partis.
A côté de cette équation, il y a celle des « religieux » dont les lobbies musulmans qui, depuis les élections passées, ont montré qu’ils avaient leur mot à dire sur la scène politique. Si ces lobbies aiment à répéter qu’ils ont joué un rôle dans l’élection d’IBK en 2013, ce dernier demeure convaincu de leur capacité d’influencer l’issue d’un scrutin. Ses prétendues excuses présentées au leader d’Ançardine au lendemain de la célébration du Maouloud quand celui-ci accuse et menace de porter un iman à la tête du pays.
Gouverner avec en ligne de mire l’élection présidentielle n’est pas facile pour IBK. Mais a-t-il conscience de l’immense espoir placé en lui en 2013 et qui est capable de rivaliser avec n’importe laquelle pression fut-elle politique ou non ? Est- il en train de dilapider ce capital de confiance en se laissant emprisonner dans une stratégie politique dont les preneurs d’otages ne sont autres que les partis politiques ? Et ce divorce avec la région de Sikasso ?
D’aucuns auraient souhaité voir IBK sous son vrai visage durant ce premier mandat quitte à hypothéquer ses chances pour un second mandat plutôt que d’assister à l’impuissance de l’homme face aux dérives de la société. Car, c’est bien des dérives qu’il s’agit et non les grands chantiers de développement du genre construction de routes, d’usines…
Un développement durable nécessite au préalable, une restauration de l’autorité de l’Etat, une gestion efficace et cela passe par une soumission du religieux au politique et non ce que nous vivons en ce moment,une saine distribution de la justice, un respect de la chose publique et une sécurité à hauteur des attentes. C’est là le défi pour l’homme IBK, le kan kelein tigui.
Tiémoko Traoré
SONDAGE - Pensez-vous que IBK sera l’« homme à poigne » s’il est élu pour un second mandat ?