La paix, la sécurité et la réconciliation nationale demeurent les principales préoccupations exprimées par les forces vives maliennes (institutions, leaders religieux, notabilités) lors des cérémonies de présentation de vœux au président Ibrahim Boubacar Kéita, qui ont commencé lundi.
Les événements de ces derniers jours dans le septentrion malien où note une certaine radicalisation des mouvements armés ainsi qu’un retour en force des islamistes, justifient ces préoccupations.
L’événement le plus récent est l’enlèvement à Tombouctou de la religieuse suisse Béatrice Stockly le 8 janvier, qui n’est toujours pas revendiqué, même si les islamistes sont soupçonnés.
Cet enlèvement survient surtout après l’assassinat à la mi-décembre dans la même ville de trois personnes, dont un journaliste de la radio chrétienne "Tahanite".
La situation sécuritaire est très préoccupante. "Il ne se passe pas de jours sans que des forains soient attaqués et dépouillés ou que des véhicules soient enlevés jusque dans la ville", reconnait un responsable du gouvernorat de Tombouctou, joint au téléphone et qui a requis l’anonymat.
A Gao, on assiste également à une brusque radicalisation de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) qui, dimanche dernier, a empêché la tenue de la législative partielle dans la commune de Talataye (Ansongo).
Depuis quelques mois, les groupes armés s’impatientent et dénoncent le manque de volonté du gouvernement malien dans la mise en œuvre de l’accord de paix signé il y a six mois.
"Le processus de paix est grippé au Mali. La confiance s’effrite entre les différents acteurs. Ce qui profite bien naturellement aux islamistes, notamment Ançar Dine qui a publiquement déclaré son opposition à cet accord", analyse un diplomate africain en poste à Bamako.
"L’insécurité est aggravée parce que les forces armées et de sécurité sont cantonnées sur leur propre territoire et ne peuvent agir que sous tutelle de la Minusma ou de Barkhane (opération française)", dénonce le responsable du gouvernorat.
"La Minusma affirme qu’elle n’a pas pour vocation de lutter contre le terrorisme au Mali. Et Barkhane ne peut agir contre l’insécurité résiduelle. Il faut donc libérer les forces armées et de sécurité en encourageant les patrouilles mixtes avec les éléments des groupes armés", pense le diplomate.
Quant au cantonnement des combattants, il accuse un retard, les travaux de construction des deux premiers sites de cantonnement n’ayant démarré que la semaine dernière.
Devant le Conseil de sécurité de l’ONU, Hervé Ladsous, chef du Département de Maintien de la Paix, a souligné, lundi, que "les groupes extrémistes continuent à intimider les populations et à attaquer les forces armées maliennes, Barkhane et la MINUSMA".
Pour lui, "seule l’opérationnalisation des patrouilles mixtes et du cantonnement peuvent être à même d’inverser la dynamique sécuritaire".
La situation est si préoccupante que certains partis de l’opposition comme le Parena (Parti pour la Renaissance nationale), exhorte le gouvernement à négocier avec jihadistes.
"Nous encourageons le chef de l’Etat à explorer la possibilité d’engager le dialogue avec les jihadistes maliens pour stabiliser le pays. Un tel dialogue a donné des résultats sous d’autres cieux", a conseillé le président de ce parti, M. Tiébilé Dramé, lors de sa cérémonie de présentation de vœux à la presse.
Une option à laquelle adhèrent certains observateurs comme le diplomate africain pour qui, "il est possible d’élargir le dialogue à Ançar Dine qui se confond facilement aux groupes armés". Fin