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Bras de fer au sommet : Comment et pourquoi Tereta a perdu la bataille
Publié le mardi 19 janvier 2016  |  Le Procès Verbal
Cérémonie
© aBamako.com par Androuicha
Cérémonie de Signature de convention de partenariat entre l`entreprise SLK et le Ministère du Développement Rural
Bamako, le 08 octobre 2015 au Cabinet du MDR. Le ministre du Développement Rural, Dr Bocary TRETA et le PDG de l`entreprise SLK, M. Yosi LAPID ont procédé à la signature de la convention de financement d`un complexe agro industriel.




Vendredi 15 janvier 2016, le ministre-Secrétaire Général de la présidence de la République, Mohamed Alhousseyni Touré, a lu, sous l’oeil des caméras de l’ORTM, le décret n°2016-0022 portant réaménagement de l’équipe gouvernementale. 3 départs sont à signaler: ceux de Bocary Téréta, ministre du Développement Rural; de Mamadou Igor Diarra, ministre de l’Economie et des Finances; et de Maître Mamadou Gaoussou Diarra, ministre chargé de la Promotion des Investissements et du Secteur Privé. Le départ de Téréta, quasi-patron du parti au pouvoir, ne surprend, en vérité, que ceux qui n’avaient pas pris la juste mesure du bras de fer qui l’opposait au chef de l’Etat.

Bocary Téréta, docteur en alimentation animale, fait partie des cadres qui, en 2001, suivent IBK lorsque celui-ci, mis en minorité au sein de l’ADEMA, démissionne de ce parti pour prendre la tête du RPM. Devant ses visiteurs, IBK aime vanter les talents d’organisateur de Téréta. Ex-Secrétaire Général de l’ADEMA, ce dernier effectue un travail de fourmi pour faire, en un temps record, du RPM le deuxième parti malien en termes de poids électoral. Accessoirement, Téréta, inamovible Secrétaire Général de RPM depuis 2001, consolide ses propres liens avec les structures de base d’un parti dont les militants ne jurent que par lui. C’est donc le plus naturellement du monde qu’il caresse le rêve d’occuper la primature quand son frère et ami IBK est élu à la magistrature suprême en 2013. Mais les choses ne sont pas si simples…

La joute contre Oumar Tatam Ly



Au lendemain de son élection, IBK annonce avec fracas qu’il n’y a pas deux commandants dans son bateau et que son pouvoir n’est pas un gâteau à partager. Au RPM, on pense que ces propos visent les ex-officiers putschistes dirigés par le général Sanogo. On se trompe. Et on ne tarde pas à s’en apercevoir: le chef de l’Etat, loin de confier la primature à un cacique du parti, sort de son chapeau un personnage inconnu du sérail: Oumar Tatam Ly. IBK ne se contente pas de nommer Ly; il ne tarit pas non plus d’éloges sur l’intéressé, répétant à cor et cri: “Monsieur le Premier Ministre, vous Vous avez ma confiance, toute ma confiance !”.

Les choses se corsent quand le bruit court, de sources crédibles, que le président mijote une vaste mouvance politique dont il confierait les rênes à Oumar Tatam Ly, lequel serait, plus tard, appelé à lui succéder. Le sang de Téréta ne fait qu’un tour. Il redoute comme la peste la concurrence du nouveau Premier Ministre en lequel il voit un intrus venu ramasser les fruits de dix ans de lutte contre les systèmes ADEMA et ATT. Téréta est conforté dans ses craintes par le fait qu’IBK lui-même déclare à tout venant qu’il ne doit son élection à aucun parti. Au fond, le président n’a pas tort: il a fallu un concours exceptionnel de circonstances, notamment un putsch militaire et une invasion rebelle, pour qu’IBK, dont le parti ne comptait que 11 députés, batte dans les urnes le candidat de l’URD (36 députés) auquel s’étaient ralliés le PDES (17 députés), le PSP (2 députés) et bien d’autres.IBK a donc des raisons de penser et de dire qu’il doit son élection à d’autres forces que le RPM et qu’il ne court aucun risque à s’affranchir de la tutelle de cette formation. D’ailleurs, autour de lui gravitent une multitude d’autres partis et de personnalités dont beaucoup ont volé au secours de sa victoire dans les derniers mois de la campagne électorale: au sein de cette galaxie, on récense une infinité d’experts alors que le RPM souffre d’un déficit de cadres. Si le chef de l’Etat préfère Oumar Tatam Ly à Téréta pour occuper la primature, c’est aussi parce que le premier, peu politique, n’est pas susceptible de lui faire de l’ombre. Banquier émérite, Ly s’y connaît, de surcroît, en chiffres: en lui, le FMI et la Banque Mondiale trouvent à qui parler.

Téréta prend son mal en patience. Evitant toute bataille frontale, il manoeuvre en coulisses. Il apporte ainsi au Premier Ministre une longue liste de cadres du RPM qu’il souhaite voir nommer aux hauts postes de l’administration. Refus catégorique d’Oumar Tatam Ly qui lui fait part de son intention de soumettre lesdits postes à un appel à candidatures afin de sélectionner les prétendants les plus méritants. En clair, les cadres du RPM sont désormais promis au plus noir avenir: dans une compétition transparente, ils ne supporteraient pas la comparaison avec les technocrates bédonnants de diplômes qui peuplent l’échiquier politico-administratif.

Téréta tient-il à manifester en haut lieu sa mauvaise humeur ?

Toujours est-il qu’informé du projet de Koulouba de confier la présidence de l’Assemblée nationale à Abdramane Niang, il joue des pieds et des mains pour écarter celui-ci de la liste présentée par le RPM aux législatives de Téninkou.Il faudra toute l’obstination de la 1ère vice-présidente du parti, Kéita Rokiatou Ndiaye, pour que Niang soit maintenu dans la course : à la requête de la dame, la Cour Constitutionnelle invalide la liste RPM qui ne comporte pas le nom de Niang. Téréta manque d’en venir aux mains avec la vice-présidente. Il rumine sa revanche. Il a plus d’un tour dans son sac comme il prouvera lors de la désignation du président du parlement. Après les législatives, IBK envoie, en effet, le Premier Ministre Ly dire aux députés du RPM que son choix pour le perchoir est Abdramane Niang. Téréta entre aussitôt en scène: il mobilise le ban et l’arrière-ban du parti pour faire élire au perchoir Issaka Sidibé. Pour réaliser cet exploit, Téréta s’est appuyé sur Karim Kéita, fils du chef de l’Etat, député de la commune 2 de Bamako et…gendre d’Issaka Sidibé. Karim, que l’on perçoit souvent comme porteur officieux de la parole présidentielle, partage d’ailleurs avec Téréta une forte hostilité envers Ly: il n’aurait pas supporté que le Premier Ministre lui ait conseillé de se tenir en marge du scrutin législatif et de se faire plus discret pour ne pas nuire à l’image de son père…En fin de compte, la providence sert Téréta. Ulcéré par le refus d’IBK de chasser certains poids lourds du gouvernement, Oumar Tatam Ly rend le tablier.

La tête de Mara

Le Secrétaire Général du RPM n’en hérite pas pour autant de la primature. Cette fois, IBK la confie, non à un technocrate comme Ly, mais à un an cien adversaire politique: Moussa Mara, président du parti “Yelema”. Malgré les efforts de Mara pour complaire au parti présidentiel, Téréta et ses compagnons le regardent de haut et l’écartent brutalement d’un poste qu’il convoite : la présidence de la Coalition de la Mouvance Présidentielle (CMP). Le RPM ne rate plus une occasion de dénigrer le Premier Ministre. A en croire ses détracteurs, Mara n’aurait été nommé à la primature que sur un coup de tête d’IBK après que celui-ci eut reçu la lettre de démission de Ly. Les mêmes contempteurs chantent sur les toits que Mara courtise les leaders religieux, électorat naturel d’IBK, et qu’il provoque des visites officielles à l’intérieur du pays à seule fin d’occuper, avec les moyens de l’Etat, le terrain électoral aux dépens d’IBK. La campagne produit-elle des effets ? On ne sait. On sait, en revanche, que le séjour mouvementé de Moussa Mara à Kidal et la triste débâcle militaire malienne qui s’ensuit, le 24 mai 2014, ne sont pas du tout étrangères au limogeage du Premier Ministre.

Modibo Kéita dans le collimateur

Nommé chef du gouvernement, Modibo Kéita, vieux commis de l’Etat et homme d’expérience, juge utile de lever les préventions du parti majoritaire contre sa personne. Rendant visite à Téréta et consorts, il leur assure être là pour “juste 12 mois”. Sans tenir compte de l’ordre solennellement adressé par IBK aux ministres de respecter Modibo, on se met, au RPM, à compter les semaines et les jours qui séparent le Premier Ministre de sa date de départ annoncée. On croit toucher au but quand, contre toute attente, IBK confie à l’hebdomadaire Jeune Afrique n° 2866 du 19 décembre 2015 que le Premier Ministre, qu’une insistante rumeur disait fatigué et demandeur de repos, ne bougera pas de son poste. “Modibo est un homme estimable à tous égards, que le peuple malien et tous nos partenaires apprécient. Il n’était pas demandeur, il est venu et il restera”, martèle le chef de l’Etat. Il n’en faut pas plus pour déchaîner contre le vieux chef du gouvernement une campagne outrancière de déstabilisation. La presse foisonne soudain d’articles remettant en cause l’intégrité de Modibo Kéita, accusé d’avoir distribué à ses enfants 5 logements sociaux, ce qui reviendrait à détourner “la part des pauvres”. Les articles sont longuement relayés par les sites WEB et les radios. Si personne ne peut prouver que Téréta soit l’inspirateur de cette cabale, nul ne peut nier, par contre, qu’elle a un lien direct avec l’annonce présidentielle du maintien de Modibo Kéita. Nul ne peut nier non plus que la campagne profite au RPM dont l’appétit pour la primature est notoire. Le cas de Téréta s’aggrave quand, mardi 12 janvier 2016, une foule de jeunes du RPM inondent la rue qui fait face à la résidence du chef de l’Etat à Sébénicoro. Les jeunes gens scandent le nom de Téréta; ils brandissent des pancartes portant la mention: “Téréta Premier Minstre”.

La colère d’IBK atteint des niveaux stratosphériques.

Le lendemain, mercredi 13 janvier 2016, il prend la parole en conseil des ministres pour dénoncer vertement “ceux qui manipulent les jeunes et la presse” à des fins personnelles. “N’est pas Premier Ministre qui veut”, lance le président sans citer de noms. IBK ajoute que la campagne de dénigrement initiée contre son Premier Ministre ne réussira pas. Puis, s’adressant à Modibo Kéita, il tonne: “Monsieur le Premier Ministre, vous avez toute ma confiance et je vous demande de poursuivre, en toute sérénité, la tâche que je vous ai confiée, sans vous laisser distraire par des personnes de mauvaise foi!”. IBK, en guise de défi, émet même l’idée de rattacher dorénavant la commission de distribution des logements sociaux à la primature (sous-entendu: le Premier Ministre n’aura qu’à distribuer les logements – et pas seulement 5 – à qui bon lui semblera). Le chef de l’Etat finit par souligner, comme son habitude, qu’il ne doit son élection à aucun parti. Cette dernière phrase a le don de faire sortir Téréta de sa réserve. D’un ton plutôt vif, le ministre du Développement Rural se plaint qu’à tout bout de champ, le président humilie le RPM. “Certes, vous n’êtes pas l’élu du RPM, mais ce parti a bel et bien contribué à votre victoire”, fait valoir Téréta. Le président lui enjoint de se taire, lui demandant de quel droit il lui réplique. Au sortir du conseil, le sort du ministre est scellé: l’hôte de Koulouba, encore furieux, demande à Modibo Kéita de lui proposer une nouvelle équipe gouvernementale où Téréta ne figurerait pas. Recevant, jeudi 14 janvier 2016, les voeux de nouvel an du gouvernement, le président revient à la charge. “Monsieur le Premier Ministre, je vous réitère mon entière confiance”, assure IBK. Avant de mettre fin, le lendemain, aux fonctions ministérielles du Secrétaire général du RPM.

En vérité, IBK ne s’attache pas pour rien à la personne de Modibo Kéita. Déjà Premier Ministre sous Alpha Oumar Konaré, ce vieux routier qui en impose par son âge, sa haute taille et sa fine connaissance des arcanes étatiques, a redonné à l’activité du gouvernementale la sérénité qui lui manquait: il a interdit, par exemple, que les ministres polémiquent sur les projets de décisions soumis au conseil des ministres, leur faisant savoir que “le conseil est un lieu de décision et non d’élaboration des décision”. En outre, Modibo a évité à son président de cadet une funeste épreuve lorsqu’après les caricatures du Prophète (paix et salut sur lui) par Charlie Hebdo, en janvier 2015, les musulmans projettent une marche de protestation à Bamako: le Premier Ministre, concient des risques d’affrontement, lève l’interdiction de la marche imprudemment prononcée par le gouverneur. Enfin, il est difficile de qualifier le Premier Ministre de corrompu: son nom n’est cité dans aucune scabreuse affaire; quant aux logements sociaux qu’il aurait reçus, le reproche est sans doute léger: c’est, depuis ATT, une vieille tradition pour les hautes personnalités publiques de recevoir un lot de logements…

Que peut le RPM ?

Que Téréta se soit battu avec la dernière énergie pour obtenir la primature ne constitue pas une faute en soi: Secrétaire Général d’un parti au pouvoir, il a le droit d’avoir de hautes ambitions. Par contre, il aurait tort de croire qu’après avoir perdu la manche, il remporterait une quelconque guérilla politique contre le président de la République. Jamais, dans l’histoire, un parti malien n’a vaincu un chef d’Etat en exercice. La raison ? Le vrai pouvoir réside à Koulouba et à Koulouba seul: les contre-pouvoirs constitutionnels et les militants ne sont que des mirages. Téréta rebondira peut-être un jour si, dans l’infortune qui le frappe, il se tient clos et coi; mais il sera proprement chassé du parti s’il engage un nouveau bras de fer. Exactement comme Mohamed Lamine Traoré et IBK lui-même lorsque, du haut de la présidence et forts du soutien du Comité Exécutif du parti ADEMA, ils avaient cru possible d’affronter la machine politici-administrative conduite par le président Alpha Oumar Konaré.



Tiékorobani
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