Certains analystes de la scène politique avaient pronostiqué un remaniement ministériel pour la fin de l’année 2015. Ils n’ont pas été exaucés par le Président de la République qui a semblé prendre son temps avant de renouveler sa confiance au Premier Ministre, objet depuis quelques temps de nombreuses attaques personnelles. Le Président aurait refusé sa démission et ne pouvait raisonnablement le maintenir en fonction sans écarter les ministres soupçonnés d’avoir monté la cabale contre lui. Exit donc les mis en cause frappés par l’ire présidentielle ! Cependant, en fait de remaniement, on a plutôt assisté à un réaménagement technique du gouvernement, les changements importants ne devant intervenir qu’après le Congrès du RPM prévu au mois de mars 2016. Les Princes c’est connu, aiment les feintes et les contre pieds déroutants, à condition que ce ne soit pas à leur détriment.
Modibo Kéita est incontestablement un homme affable, soucieux du respect des normes et de l’honneur. Il a un parcours professionnel et politique impressionnant qui force l’admiration et jamais, son dévouement et son sens du bien public n’ont été mis en cause. C’est pourquoi, on l’a vu meurtri ces derniers temps, les traits visiblement marqués par la virulence des attaques. En effet, comment peut-il supporter qu’au soir de sa vie, après une retraite bien méritée, alors qu’il ne nourrit plus aucune ambition politique, qu’il n’est revenu aux devants de la scène qu’à la demande insistante du Président de la République, on s’en prenne à lui de la sorte? Ainsi va le jeu politique avec sa logique, ses armes et qui ne surfe que sur des courants partisans, souvent assez violents. En tout état de cause, même si Modibo Kéita force l’admiration et le respect par son parcours, on l’imagine mal à la tête d’un gouvernement de combat chargé de faire réélire le Président de la république.
C’est pourquoi, il ne faut pas se fier aux apparences du moment. Les alliances politiques étant ce qu’elles sont au Mali, le RPM reste la seule force politique captive sur laquelle IBK pourra compter en toutes circonstances. Si l’on considère qu’il devra régler deux questions essentielles au cours des mois à venir, il ne peut s’offrir le luxe d’une crise ouverte avec le RPM. D’une part, il y a la nécessité d’organiser et de renforcer le camp de la majorité présidentielle face à une opposition bien requinquée qui lève de plus en plus le ton. D’autre part, il faut résoudre la question lancinante de la participation au gouvernement d’éléments des anciens mouvements armés du nord, dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord de paix. Le congrès de mars pourrait donc bien être pour les tisserands celui de la vérité et de la réconciliation, congrès au cours duquel sera mise en route une machine politique de combat au service d’IBK qui en quittera la présidence avec l’assurance qu’il continue de garder la main. Alors, un nouveau gouvernement sera constitué pour s’attaquer à deux missions essentielles : consolider la paix et la relance économique, préparer les futures batailles électorales.
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Mahamadou CAMARA