Au lendemain du remaniement gouvernemental, qui aura vu le départ de trois ministres et l’entrée de quatre autres, les différentes chapelles politiques y vont de leur commentaire. Au sein de la majorité, à peu d’exception près, on se réjouit de ce remaniement. Normal. Du côté de l’opposition, on note un changement superficiel. C’est aussi normal. Mais au-delà des convenances et du «politiquement correct», chacun devrait s’interroger sur la portée réelle du remaniement gouvernemental. C’est peut-être un temps de «tumultes» qui demandait un réajustement du gouvernail pour maintenir le cap. Libre à chacun de l’analyser à sa guise.
Partir, c’est partir !
Certains en sont encore à analyser, à comprendre et à justifier le départ de deux désormais ministres de la République. Mamadou Igor Diarra et Bocari Tréta. Il faut dire que ces messiers occupaient des postes importants dans le gouvernement II de Modibo Kéïta. Le premier était ministre de l’Economie et des Finances, le second, celui du Développement rural, qui plus est N°2 du même gouvernement. C’est aussi connu, il est un compagnon de lutte de longue date du président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta. Ces ex-ministres, à travers leur entregent médiatique, cherchent à «positiver» leur départ. C’est compréhensible. C’est par ailleurs humain, tout ça. Mais quand on est parti, c’est qu’on est vraiment parti. Et rien d’autre !
Le Rpm très fâché
IBK a toujours dit qu’il n’a pas été élu par le Rassemblement pour le Mali (Rpm). Mais par les Maliens. Retournés dans les sens, ces propos ne sont point faux. Même s’il ne faut ignorer la contribution de ce parti politique à l’élection du président IBK. C’est peut-être en vertu de cela que le Rpm a toujours revendiqué, comme de droit, la Primature. À presque mi-mandat du président de la République, il ne l’a toujours pas obtenu. Pis, le secrétaire général du parti vient d’être débarqué du gouvernement. Ça fait mal ! Alors, le Rpm dit «prend acte de la reconduction de Monsieur Modibo KEITA comme Premier ministre, Chef du Gouvernement et de la mise en place du nouveau Gouvernement suivant Décret N°2016-0022/P-RM du 15 janvier 2016 portant nomination des membres du Gouvernement». Ce qui trahit un peu les règles de bienséance chez les Tisserands, ce sont ces termes : «Le Bureau Politique National du Rassemblement Pour le Mali (BPN/RPM) invite les militantes et militants, sympathisants du RPM à rester vigilants, soudés et mobilisés autour du projet de société et du programme du Parti». À la poubelle, le projet de société d’IBK.
Modibo Kéïta, seul maître à bord
Il semble bien que le début d’année ait poussé le président de la République à prendre certaines résolutions, notamment celle d’avoir un gouvernement dont le chef d’équipe garde toute son autorité. Hormis le fait d’avoir renvoyé tous les ministres au Premier ministre pour connaître leur sort, à la faveur du remaniement annoncé, IBK maintient cette dynamique. Il vient de le réitérer à un ministre du gouvernement qui se définit comme la tête de Turc de la presse malienne, et qui avait voulu passé par-dessus la tête du Premier ministre. Ce ministre, connu pour son activisme populiste, souhaitait présenter au chef de l’Etat une de ses activités populistes. IBK ne s’y oppose pas, mais l’a renvoyé au respect de la hiérarchie. Comme quoi, Modibo Kéïta demeure le seul maître à bord du bateau gouvernement.
«Trous dans la raquette»
Face aux armées et polices sous-équipées et sous-entraînées dans les villes sahéliennes, et à des soldats français (Barkhane) qui ne sortent de leurs bases qu’en force, pour des missions ou des patrouilles forcément limitées, les nombreux groupes jihadistes de la région ont appris à contourner l’ennemi, ce qui est un jeu d’enfant sur un terrain pareil, et à se dissimuler jusqu’au moment de frapper. «Des trous dans la raquette sécuritaire, il peut en exister», admet une source militaire française de haut rang, qui préfère ne pas être identifiée. «Les jihadistes sont dans une relation du faible au fort, ils cherchent à nous contourner (…) Nous sommes face à une menace durable. Les vulnérabilités qui sont les nôtres sont partagées par d’autres pays : qui demanderait au gouvernement burkinabè d’en faire davantage ?» À bon entendeur, salut !