Concernant le remaniement du vendredi 15 janvier dernier, le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, a fait montre de rigueur, de respect de la discipline institutionnelle et de restauration de l’autorité de l’Etat en enlevant les chevaux boiteux de l’attelage. Par la même occasion, le chef de l’Etat impulse du sang neuf aux secteurs aussi vitaux et prioritaires que les finances, l’agriculture, les mines et la recherche scientifique, en misant sur des technocrates. Objectif : booster l’économie malienne et améliorer les performances dans tous les domaines de la vie nationale.
Le dernier remaniement ministériel a fait couler beaucoup d’encre et de salive. Toute la semaine durant, les médias nationaux et étrangers en ont fait leurs choux gras. Les causeries de la rue ont longtemps tourné autour du sujet. Et pour cause : l’éviction des ministres du Développement rural, Bokary Tréta (deuxième personnalité du gouvernement sortant et tout puissant secrétaire général du RPM, parti présidentiel) ; et de l’Economie et des finances, Mamadou Igor Diarra (qui avait commencé à s’imposer, de force, comme un homme incontournable du régime).
En analysant les différents commentaires et points de vue, on s’aperçoit que les Maliens semblent approuver cet acte du Président. Ses compatriotes retrouvent, enfin, cet homme de rigueur et de poigne qu’ils ont connu aux heures chaudes de la démocratie ; celui qui avait accepté de prendre les rênes de la Primature quand des Premiers ministres démissionnaient sous la pression du front social et estudiantin ; celui qui avait restauré l’autorité de l’Etat entre 1994 et 2000, bref, le IBK qui avait sauvé le régime du président Alpha Oumar Konaré et la démocratie malienne. Pour les Maliens, Treta et Igor, qui guettaient tous les deux le fauteuil de Premier ministre, avaient pourri l’atmosphère au sein du gouvernement et mis à mal la solidarité gouvernementale. Il fallait donc sévir. Et IBK l’a fait. Ce raisonnement n’est pas tout à fait différent des motifs officiels du limogeage des deux ministres. Par rapport à Tréta, le pouvoir lui était trop monté à la tête. Il était quasiment aveuglé par l’envie d’occuper le poste de Premier ministre qui, selon lui, revenait d’office à un cadre du RPM. Et il était prêt à tous les coups bas pour y parvenir. Donc, le secrétaire général du parti présidentiel fait les frais de son ambition personnelle démesurée. Ensuite, dans sa quête de monter en grade, Bokary Treta n’avait aucun respect pour le Premier ministre Modibo Kéïta car il se voyait déjà chef du gouvernement à la place de l’actuel locataire de la Primature. Enfin, Treta serait celui qui avait propagé la nouvelle sur la mort d’IBK en Turquie.
En ce qui concerne Mamadou Igor Diarra, il aurait outrageusement menti par rapport à la dette extérieure du Mali. Dans une communication, Igor a laissé entendre que la dette extérieure du Mali est intégralement épongée, alors qu’il n’en est rien après vérification.
En outre, en plus de ces faits suffisamment graves contre les deux ministres, plusieurs sources concordantes confirment que Treta et Igor sont à la base de la vaste campagne médiatique de dénigrement du Premier ministre Modibo Kéïta sur les logements sociaux. IBK se devait alors de nettoyer la famille gouvernementale où la discipline et surtout la solidarité sont les maîtres-mots.
Sur un tout autre plan, le président IBK semble prôner l’excellence et l’atteinte des objectifs de performance dans le remaniement du 15 janvier qui accouche aussi d’un gouvernement réaménagé. Dans les secteurs vitaux de l’économie, lui et son Premier ministre ont placé ” les hommes qu’il faut “. En effet, en confiant le Département de l’Economie et des finances à Boubou Cissé, il mise non seulement sur un économiste hors pair, mais IBK parie aussi sur un grand bosseur et un ministre “ propre “ de tout scandale. L’agriculture, dont le président a porté le budget à 15% au vu de sa place dans son programme, retrouve un homme ” du sérail “, en l’occurrence Kassoum Denon. Véritable spécialiste du domaine agricole, Denon a occupé et fait ses preuves, en qualité de président directeur général, à l’Office riz de Ségou et à l’Office du Niger. Deux références sous régionales en matière d’agriculture.
Cheickna Seydi Ahamady Diawara au Département des Mines : un come-back après seize ans
Dorénavant, le locataire du bâtiment des Mines à la Cité administrative se nomme Cheickna Seydi Ahamady Diawara qui fait en réalité un come-back après seize ans. L’ancien Haut-commissaire de l’Omvh avait en effet occupé sous le président Konaré et sous le règne d’IBK le poste de ministre des Mines, de l’énergie et de l’hydraulique. C’est lui qui a révolutionné le secteur minier au Mali. Homme de confiance et ami d’IBK, il saura sans doute concrétiser l’objectif édicté dans son adresse à la nation du nouvel an 2016 d’augmenter la quantité de tonnes d’or produite par an par les sociétés minières opérant au Mali.
Un autre ministre qui revient dans un domaine déjà occupé : c’est Dr Nango Dembélé, ministre de l’Elevage et de la pêche. Dans le premier gouvernement d’IBK, celui formé par Oumar Tatam Ly en septembre 2013, l’ancien Commissaire à la sécurité alimentaire figurait comme ministre délégué auprès du ministre du Développement rural chargé de l’Elevage, de la Pêche et de la Sécurité alimentaire. Le secteur devient dès lors pour lui un domaine de prédilection.
Que dire de Pr Assétou Founé Samaké Migan ? Sinon qu’IBK a tapé dans le mille. La vie de nouvelle ministre de la Recherche scientifique est intimement liée à cette matière. Et son discours historique à l’occasion de la dernière rentrée universitaire a séduit plus d’un dont le chef de l’Etat.
IBK vient de restaurer l’autorité du Premier ministre Modibo Kéïta
Enfin, dernier pari gagné d’IBK, c’est le choix de Konimba Sidibé pour gérer le Département de la Promotion de l’Investissement et du secteur privé. Ce promoteur du cabinet d’études, de conseils et d’assistance “Koni Expertise ” et ancien ministre chargé du Contrôle général d’Etat ne sera nullement dépaysé.
En somme, le président IBK, légaliste jusqu’au-boutiste, vient de restaurer l’autorité du Premier ministre Modibo Kéïta sur les autres membres du gouvernement et de placer ” l’homme qu’il faut à la place qu’il faut “.
Alou B HAÏDARA