Le RPM vit un drame silencieux car, voici un parti politique dont le président est élu à la magistrature suprême du pays et qui n’est pas du tout à la fête ! C’est une situation à la fois inédite et paradoxale. Ni l’US-RDA, le CMLN puis l’UDPM, l’ADEMA, le Mouvement Citoyen n’ont offert un tel spectacle de désolation au peuple malien. La même apathie semble avoir gagné la coordination des partis de la majorité présidentielle dont on a entendu le président terminer sa présentation de vœux du Nouvel An en invitant IBK à accorder un peu plus d’égard aux partis de la majorité présidentielle. Qui l’eût cru ? Les responsables d’associations de la société civile, y compris des religieux qui avaient appelé massivement à soutenir IBK entre 2012 et 2013 ne sont pas mieux lotis. Savoir valoriser ses partisans est important parce que l’exercice solitaire du pouvoir expose à des risques importants pour quelqu’un qui doit revenir vers son électorat. Autant le détenteur du savoir se bonifie en dispensant le savoir, autant la maîtrise de l’art du partage du pouvoir et de la richesse est une source indéniable de sécurité. A défaut, le détenteur se transforme en une forteresse à prendre.
Sitôt son congrès annoncé pour le mois de mars 2016, le Secrétaire général du parti présidentiel est extrait bruyamment du gouvernement dans un climat suffisamment lourd pour laisser la place à toutes sortes de supputations. On chercherait à réduire son influence politique pour les uns alors que pour d’autres, son apparente infortune ne serait qu’un coup de sang visant à contenter le grand frère et le maintenir quelque temps encore à la tête du gouvernement.
La vérité pourrait être beaucoup plus simple et toutes ces rumeurs ne font aucun bien à la république. Le résultat pour le moment est que la victimisation de Tréta lui apporte un fort courant de sympathie dans son parti et bien au-delà. L’histoire serait-elle en train de se répéter ? La question n’est pas superflue d’autant plus que depuis son installation à Koulouba, IBK a pris un soin particulier à limiter l’influence du RPM autour de lui. A défaut de la Primature, on s’attendait à voir un cadre du parti nommé Directeur de Cabinet ou Secrétaire Général de la Présidence. Rien de tout cela et personne ne sait ni quand ni comment cela pourrait s’arrêter. C’est le sens de la grande déprime actuelle dans les rangs des tisserands. L’explication pourrait être qu’IBK n’est pas un homme de parti, un véritable animal politique doté de l’instinct du tueur, donc un spécialiste des intrigues et coups tordus qui font tout le charme de la politique. C’est un grand solitaire qui s’est convaincu que Dieu l’a mis en mission pour le Mali et qui, plutôt que de compter sur le soutien de ses partisans, a la faiblesse de croire que Dieu le guidera dans le dédale du maquis politique. A son crédit, il a une très haute idée de sa charge, mais attention au réveil qui pourrait être brutal. En politique, c’est toujours une équipe qui gagne. Le chef tire sa force et le respect de la consistance et de la cohésion de son équipe. Le féticheur qui n’arrive pas à assurer la promotion et la notoriété de son propre fétiche ne sera jamais un grand féticheur. En désacralisant et en banalisant son propre fétiche qui est le RPM, IBK s’expose dangereusement. Le sait- il ? Enfin, un candidat qui sollicite tout le monde au moment des suffrages et qui, une fois élu affirme qu’il ne doit rien à personne doit savoir qu’il doit tout à tout le monde parce qu’on n’est rien par soi-même. Un responsable politique a dit qu’IBK travaille pour les opposants. Il pourrait bien lui donner raison s’il continue de se couper de sa base, de toutes ses bases.
Mahamadou CAMARA