Les déclarations mensongères en politique sont monnaie courante dans l’arène politique, surtout dans les pays où le peuple est analphabète dans sa majorité. Tel semble être le cas au Mali désormais. Le politologue Abdou Latif Coulibaly a fait le constat suivant au Sénégal : « L’observance de l’éthique par tout le corps politique depuis l’arrivée d’IBK au pouvoir pourrait mettre notre jeune démocratie à l’abri d’une dérive autoritaire. Ce problème qui hante la République est une contradiction d’essence ; il est irréductible (…). En effet, l’éthique républicaine tient sa vérité dans le renoncement de soi-même au profit de l’intérêt général. Ce don de soi est certes difficile, mais demeure la condition expresse de la réussite de toute entreprise démocratique ». Ce constat est valable aussi pour le Mali. Dès lors, posons-nous des questions sur certains discours de nos hommes politiques. Ces discours qui résonnent parfois très fort dans les oreilles des citoyens par la profondeur des reniements qu’ils charrient, déroutent en même temps par leur caractère mensonger.
Ces discours mensongers se déroulent en dehors de toute morale ou éthique. Plus le projet de société est personnalisé, plus le politique tente de faire croire qu’il se soucie du devenir du peuple. Il cultive l’illusion et promet de travailler au redressement des torts qui sont portés au peuple. Cette supercherie participe des moyens déployés pour masquer la vacuité des comportements et le manque de sens moral et éthique de la plus grande partie de nos élites dirigeantes.
Certains éléments de cette classe politique mensongère symbolisent plus que d’autres, à travers leurs comportements et leur discours, le niveau de perversion morale de notre espace politique.
En suivant certains parcours tortueux, en écoutant les discours, mais en observant surtout le comportement de certains, comme IBK et Moussa Mara qui sont ceux qui ont le plus ‘’bluffé’’ les maliens, on comprend mieux l’indigence morale qui caractérise les actes posés et le manque de cohérence dans les discours tenus, selon les moments et les intérêts en jeu. Certes ces deux personnages ne sont pas les seuls en cause, mais ils sont assez symboliques de la déliquescence éthique et morale dénoncée par les populations. Ils demeurent les cas les plus saisissants, quand on tente de comprendre le phénomène en cause. Etalons donc au grand jour ce que chacun a pu dire au peuple malien à un moment ou à un autre dans leurs discours ou selon ou leurs comportements.
Ibrahim Boubacar KEITA Président de la République:
Il a sillonné tout le vaste territoire du Mali pendant la campagne électorale présidentielle pour dire au peuple qu’il est candidat pour le bonheur et l’honneur des maliens. Qu’il est candidat pour le Mali d’abord. Il a demandé le suffrage des Maliennes et des Maliens pour libérer en trois mois Kidal des mains des rebelles Touaregs, des terroristes et des djihadistes.
Il a promis à l’Armée de l’équiper à hauteur de mission pour assurer la sécurité sur l’ensemble du territoire du Mali. Il a rassuré le peuple que la sécurité sur un cm2 du Mali ne l’échappera. C’est pourquoi il a refusé de négocier avec les hommes armés. Pour accepter de négocier avec eux, sa condition préalable est de déposer les armes et d’accepter d’être cantonnés.
Le peuple malien et ses différentes couches sociales ont vu en lui le sauveur d’un Mali un et indivisible pour le porter à la tête de l’Etat en août 2013. Deux ans et demi après son investiture à la magistrature suprême, faisons l’inventaire des promesses. C’est avec les événements des 17 et 21 mai 2014 à Kidal que l’on a constaté une retournée acrobatique à 180° du Président IBK qui, en l’espace de 8 mois de gestion du pays, a fait un revirement spectaculaire dans ses propos concernant la résolution de la crise du nord.
Dans ses discours désormais, on a noté que sa logique de règlement du conflit au nord du Mali a été toujours le dialogue, rien que le dialogue. En plus, il a fléchi son discours et a prêché la bonne parole en nommant les rebelles ‘’des frères maliens’’ tout en les rassurant qu’ils seront réinsérés dans l’Armée, dans la police, la gendarmerie et la garde nationale. En somme, ce volte-face cache bien de choses car c’est le même IBK qui disait que les déserteurs Touaregs n’avaient pas leur place dans l’Armée malienne.
Aujourd’hui, à la faveur de la signature d’un accord imposé au Mali, il leur offre cette réintégration sur un plateau d’or. Est-ce la honte subie suite à la défaite des FAMA à Kidal le 21 mai 2014 ou la volonté de sauver son régime, même si le Mali n’est pas sauvé ?
Autre revirement de l’homme, c’est la position au départ du gouvernement vis-à-vis de la médiation algérienne. Qui ne se souvient pas des reproches faits à l’Accord d’Alger du 4 juillet 2006 par IBK sous le régime d’ATT ?
IBK en tant que premier pourfendeur de cet accord disait entre autres que ‘’le Mali a été vendu’’ à l’Algérie. En tout cas, l’histoire s’est répétée lorsque nos autorités ont pris à contre-pied le peuple malien en sollicitant les autorités algériennes afin que les négociations se tiennent à Alger. C’était un autre mensonge, car on a toujours fait croire qu’Alger a été choisie pour abriter uniquement les pourparlers exploratoires. C’était du vent. Contrairement à l’Accord de 2006, le Mali est parti très affaibli à Alger pour les négociations de 2014. Ces langages de nos gouvernants qui changent au gré des événements sans explications claires au peuple jouent désormais sur leur crédibilité.
Concernant la lutte contre la corruption, beaucoup de promesses ont été faites pendant la campagne et dans son discours d’investiture le 4 septembre 2013 au CICB devant le peuple malien. En moins de six mois, cette lutte a été sacrifiée, enterrée au cimetière des promesses non tenues. Ses proches parents dans le gouvernement se sont donnés à cœur joie à la délinquance financière lors de l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires, sans être inquiétés. Il a fallu la pression du FMI et de la Banque Mondiale pour limoger les responsables. Ensuite vinrent les histoires des engrains frelatés et des 1000 tracteurs. En lieu et place de la lutte contre la corruption, les deux premières années de son quinquennat ont donné une carte blanche à la corruption jusque sur la colline de Koulouba.
Moussa Mara et l’Avion Présidentiel lors des débats sur la déclaration de Politique Générale
Interpellé au cours des débats sur la déclaration de politique générale sur l’acquisition d’un nouvel avion présidentiel à 17 milliards de F CFA alors que l’ancien est cloué au sol pour des raisons inconnues, le Premier ministre s’est employé à apporter des précisions. Le nouvel avion présidentiel jusque-là n’a pas dévoilé son prix réel. Selon le Ministre Soumeylou B. MAIGA de la Défense, l’avion a coûté presque 7 milliards de F CFA, 18 milliards selon IBK et 17 milliards selon Moussa Mara. Mais, selon le Ministre des finances, il a coûté 21 milliards y compris l’acquisition du certificat de vol.
Il ajoute que cette acquisition, faite ‘’aux meilleures conditions du marché’’, a été rendue indispensable par le fait que l’avion qu’utilisaient ATT, puis Dioncounda Traoré sous la transition, n’était valide ‘’ni sur le plan juridique ni sur le plan technique’’. Qui plus est, son acquisition a été faite au nom du Ministère de la défense mais son dossier est resté introuvable à ce niveau. « Faux », nous a indiqué une source proche du dossier, indignée par les propos du Premier ministre qui, selon elle, relèvent de l’absurde et de la mauvaise foi. ‘’L’avion a volé douze ans d’affilée. Dix sous ATT, deux ou presque sous la transition. Pas une seule fois il n’a fait l’objet d’un refus d’atterrissage dans un aéroport en Afrique, en Asie, en Europe ou en Amérique (Canada) pour cause d’insuffisances qui aurait mis en danger la vie d’ATT, de Dioncounda, de Cheick Modibo Diarra ou de Diango Cissoko. Son certificat de fiabilité court jusqu’en 2015 au moins’’.
Autant dire que d’autres motivations ont prévalu, qui n’ont pas été dévoilées par le Premier ministre. Pour le reste, ajoute notre source, le dossier de l’avion en question est déposé à l’état-major de l’armée de l’air. Moussa Mara n’a pas cherché de ce côté avant de se livrer à son show parlementaire qui n’avait qu’une apparence de cohésion.
Soumeylou Boubèye MAIGA
Ministre de la défense
Le 3 mai 2014, soit dix-huit jours avant la débâcle des FAMA à Kidal, le Ministre de la défense Soumeylou B MAIGA a tenu une conférence dont le thème était ‘’Situation au nord du Mali, rôle de l’Algérie dans la résolution de la crise au nord du Mali et l’Accord de défense avec la France’’.
Lors de cette conférence, il a magnifié le traité de coopération devant être signé bientôt entre la France et le Mali. Il a expliqué que le traité vise une coopération militaire afin de concourir à une paix et une sécurité durable sur nos territoires. A cet accord devrait être intégré l’opération Barkhane ayant les mêmes objectifs que le traité de coopération, mais à caractère régional couvrant la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Burkina et le Tchad. Si l’objectif, de ces deux accords est de défendre la sécurité de notre territoire pourquoi le camp de Tessalit est interdit à l’armée malienne ?
Et pourquoi les armes des FAMA, saisies par la MINUSMA après la défaite de Kidal sont-elles encore confisquées par celle-ci?
De nombreuses sources révèlent que la France est en train d’exploiter nos ressources à Tessalit (eau, or, diamant, etc.) sans l’accord du gouvernement malien et en son absence.
Toutes ces mauvaises pratiques contre l’état malien sont-elles contenues dans les accords de coopération signés entre le Mali et la France ?
Nos hommes politiques semblent avoir deux langues, celle d’avant élection pour avoir la confiance du peuple et celle une fois élu qui, en général, trahit le peuple.
L’indigence morale du discours politique, quand tu nous tiens !
Moussa DIAKITE