Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Mali    Publicité
aBamako.com NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article
Société

Seconde grève de l’ORTM en un mois : Pourquoi sevrer le bon peuple !
Publié le vendredi 29 janvier 2016  |  Le Tjikan
Conférence
© aBamako.com par FS
Conférence de presse d`avant match Stade malien-Etoile du Sahel
La conférence de presse avant le match Stade malien-Etoile du Sahel tenue au Stade Modibo Keita le Samedi 22 Août 2015. Photo Car ORTM




C’est à minuit ce soir que la grève de 72 heures déclenchée, le mercredi dernier, par le comité syndical des travailleurs de l’Office de Radiodiffusion Télévision du Mali (ORTM) doit prendre fin. C’est la 2ème fois consécutive en l’espace de quelques semaines que le peuple du Mali est privé de sa grosse boîte à image et de son. Cette fois-ci, il n’est pas exagéré de dire que le sevrage a atteint le comble de l’insouciance, car les grévistes ont mis la barre très haut en rallongeant leur délais de boycott, mais aussi en coupant les signaux audio et télévisuels des chaînes internationales, comme RFI, BBC, TV5, Africable et Malivision, qui transitent par les stations hertziennes de Souleymanebougou et Kati. L’opération de démonstration de force a donc débordé, même si elle n’a produit que l’effet d’un âne mort après le jour de marché.
La soudaine montée d’adrénaline à Bozola se justifie par la détermination des syndicalistes à obtenir l’abrogation de la nouvelle loi qui régit la nouvelle société SMTD (chargée de la diffusion des programmes de l’ORTM). Abdramane H. Touré et ses camarades peuvent maintenant se bomber la torse d’avoir pris en otage en l’espace de 35 jours, cinq jours durant, la télé et la radio nationales d’un pays pauvre comme le nôtre, à cause de leur cahier de doléances, qui s’articule autour de 8 points de revendications (CF l’encadré), dont le point culminant est la demande d’abrogation de la nouvelle loi. Aux dernières nouvelles, à défaut d’abroger la loi, le syndicat exige l’attribution à la nouvelle société de même statut que celui de l’ORTM. Ce qui remet totalement en cause la réforme. Mais, cette piste de réflexion nous intéresse moins que l’analyse de la procédure d’élaboration de la loi. Est-il besoin de rappeler que tous les textes de loi et règlements passent par un système de filtrage, connu de tout le monde, en tout cas de ceux qui sont intéressés par le processus normal d’un texte de loi au Mali.
Une chaine, exempte de tout reproche !
Mais, il n’en demeure pas moins qu’on passe en revue la procédure qui comprend plusieurs étapes : d’abord, la Commission restreinte de réflexion, constituée des techniciens du service concerné par la réforme proposée. Celle-ci a pour mission d’élaborer les termes de références devant à être soumis à un consultant. Qui a pour rôle de collecter des informations afférentes à la réforme en fonction desquelles, il propose les différentes options soutenues chacune par des arguments solides qui justifient le choix à opérer. Ce premier travail de débroussaillage est partout nécessaire à toutes les opérations de réforme. Le rapport émanant du consultant est soumis à une autre Commission de réflexion. Cette fois-ci élargie aux techniciens d’autres départements ministériels en vue de la prise en charge des préoccupations de tous les acteurs concernés. Cette commission pluridisciplinaire se penche sur les différentes options proposées par le consultant pour examen et adoption comme proposition de textes. L’opération consiste à étudier les options, point par point, sur toutes les facettes pour ne retenir que les plus essentielles qui seront soumises à l’examen minutieux des techniciens les plus compétents du cabinet du ministre sectoriel concerné, qui repassent à la loupe les options retenues et affinent les arguments en vue de permettre aux techniciens du département de mieux défendre leur projet de texte à la Réunion interministérielle au Secrétariat Général du Gouvernement pour davantage améliorer le dit projet et affiner davantage l’argumentaire pour convaincre les autres collègues de la pertinence du projet. Celle-ci réunit autour du sujet, les Conseillers techniques et/ou les Chargés de mission de tous les Départements ministériels dont le profil correspond au sujet à débattre. La boucle de réflexion est bouclée par la Réunion des Secrétaires généraux des Départements ministériels. C’est la dernière phase d’examen du dossier avant son introduction en Conseil de cabinet, puis en Conseil des Ministres, d’où il sort sous forme de Projet de Loi, Ordonnance ou Décret d’application d’une Loi ou une Ordonnance. Le cycle d’une procédure devant subir un texte de loi ou règlementaire peut prendre des années.
Se prévaloir de sa propre turpitude !
Pour ce qui concerne la loi sur la création de deux nouvelles sociétés qui doivent prendre la place à l’ORTM : celle de l’édition et celle de la Diffusion, son processus d’élaboration a duré plus de cinq (5) ans. La Commission sur la transition numérique a été créée en 2011. Elle était constituée outre, des représentants des Départements ministériels que des agents de l’ORTM, principaux concernés par la réforme. Selon nos sources, les représentants de l’ORTM étaient des cadres de très haut niveau: des ingénieurs des télécom, des financiers et des cadres des ressources humaines. Où étaient donc ces cadres quand le projet de texte était à l’examen ? Qu’ont-ils apporté comme arguments à la discussion, qui aurait permis à leurs collègues syndicalistes de faire économie de cette grève ? Certainement rien. Sinon, des traces de leur protestation allaient être relevées dans les Procès verbaux des différentes réunions. Il serait donc plus équitable de diviser la poire en deux et non faire porter tout le tord au seul gouvernement. Les représentants de l’ORTM aussi dans les différentes commissions de travail ont manqué à leur mission.
Notons qu’au Mali, les Commissions de travail ne fonctionnent qu’en temps partiel. Les membres participent rarement aux réunions de travail ou s’y présentent les mains vides. En d’autres termes, rares sont ceux ou celles qui s’y consacrent s’ils ne sentent pas d’émoluments y afférents. Là aussi, ils assistent les bouches fermées à la réunion sans faire des propositions. N’est-ce pas le cas des agents de l’ORTM, désignés pour défendre leurs intérêts collectifs ?
Selon un ancien membre de la Commission, qui y représentait le Ministère du Travail de la Fonction et des Réformes de l’Etat, qui a témoigné sous le couvert de l’anonymat, en son temps, il avait vu le danger venir. Aussi, avait-il proposé le modèle du géant du textile malien (CMDT) qui a réussi sa mutation institutionnelle dans la douceur. L’entreprise est passée du statut d’entreprise centralisée en Holding avec des filiales : Kita, Fana, Koutiala, Sikasso et Bougouni. Ce sont les anciennes régions de la CMDT qui ont été transformées filiales, chapeautées par la Holding. Juridiquement, chaque filiale est une entreprise autonome qui a un lien fonctionnel bien réglementé avec la Direction Générale qui est dirigée par un Président Directeur Général. Qui est en même temps président du Conseil d’Administration. La prise en compte de cette proposition, enrichie par des idées nouvelles, pouvait aider les acteurs à faire économie de ce gaspillage d’énergie inutile.
Comme dirait l’autre, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Les parties peuvent toujours discuter pour améliorer la loi. D’ailleurs cela est déjà le cas, car à l’issue des pourparlers, il fut proposé d’évaluer ensemble l’évolution de la nouvelle société dans deux ans. Un point d’accord que le syndicat ferme les yeux là-dessus, pour s’accrocher sur le statut identique entre la nouvelle société et l’ORTM. Une option, qui n’est pas la meilleure solution, sinon la réforme n’aura servi à rien. Il ne s’agira plus de faire deux sociétés complémentaires, mais concurrentes. Dans ce cas de figure, forcement l’une aura raison de l’autre. A ce rythme, l’ORTM soufflera au même rythme cardiaque que l’Agence Nationale pour la Communication du Développement (ANCD), ex-CESPA. Qui végète aujourd’hui à cause de l’immixtion des agences de communication privées sur son champ de compétence. C’est dire qu’en érigeant une structure concurrente à l’ORTM sans un statut différente, quelque soit la mission à lui confiée, elle n’ira pas loin. Pour éviter que cela arrive, il est nécessaire de tirer tous les enseignements de la dégringolade actuelle de l’ANCD.
En tout état de cause, cette énième grève du comité syndical de l’ORTM en constitue une de trop, car la grève est une arme de dernière chance pour tout groupement syndical digne de ce nom, mais jamais une arme de distraction, sinon de coupure de signaux abusifs. Le sait-on ?

M. A. Diakité
Commentaires