Une dizaine de mines industrielles est en activité au Mali, faisant du pays le troisième producteur d’or en Afrique après l’Afrique du sud et le Ghana. L’activité contribue pour plus de 200 milliards de F Cfa aux recettes de l’Etat et constitue le plus grand pourvoyeur de l’économie, bien avant le coton qui le précédait autrefois. Mais l’avenir du Mali est-il dans les mines ? Que deviendraient les zones minières, une fois que l’exploitation aura cessé ? Ces questions commencent déjà à inquiéter décideurs et responsables de communes concernées par la production minière. Et les sociétés d’industrie minière ne sont pas en reste dans ce débat.
« L’or est une denrée périssable. Nous sommes en train d’apprendre à des jeunes les techniques de production des produits les plus recherchés » dans le cercle de Kéniéba. C’est au milieu d’une ferme de cinq hectares que Youssouf Ongoïba, responsable de développement communautaire à la Société des mines de Loulou (Somilo-SA), nous apprend les ambitions de ladite société pour le développement du secteur agricole. « Le Centre agro-business de Sakola » est un projet test d’une volonté de large incubation de techniques agricoles porteuses dans le cercle de Kéniéba.
Il s’agit d’un périmètre de cinq hectares – clôturé – comprenant des parcelles ensemencées de pomme de terre, de tomate, d’aubergine, de salade, de pastèque, de choux, de choux fleur, de piment, de poivron, de carotte, de haricot, de gombo, de betterave, de courgette, de melon, de brocoli, entre autres. Outre cette zone horticole, l’espace renferme des poulaillers pour l’élevage de volailles (les poulets de chair notamment), un enclos de vaches de races locales et améliorées. En somme, c’est l’élevage, l’aviculture, l’horticulture, l’arboriculture et bientôt la pisciculture qui font ce Centre, également équipé d’abattoirs et d’un système d’alimentation d’eau. Ici, ils sont près d’une centaine de personne à apprendre l’agrobusiness.
« La création de ce centre est pour nous un honneur. Il permet de lutter contre les difficultés qui assaillent nos populations », confesse Fassala Keïta, un ancien orpailleur, en phase de reconversion dans le Centre. Le centre comprend également des salles de classes et des habitats pour héberger les pensionnaires. Les formateurs sont des anciens cadres avec une large expérience dans la gestion de projets agro-pastoraux. Si l’initiative est entièrement financée par la Somilo-SA, le processus de recrutement des formateurs, de même que celui des étudiants a été assuré par les services techniques de l’Etat au niveau de la région de Kayes. Histoire de pouvoir assurer la transparence et se tenir à l’écart de présumés contingences politico-sociales. La première promotion suivra une formation pratique d’une année. La deuxième année, la centaine de stagiaires sera répartie sur 5 autres champs d’incubation de 5 hectares chacun. Là-bas, les apprenants seront divisés en unité de production. Et à terme, les bénéficiaires seront assistés à avoir accès au crédit pour créer leur propre ferme. Ladite assistance pourrait consister en la création d’un fonds de garantie pour soutenir les emprunts financiers que les bénéficiaires seront amenés à contracter auprès des établissements financiers.
"Fixer" les jeunes dans leurs localités
« Tout cela pour nous assurer que même si nous ne sommes plus là, les communautés puissent se prendre en charge », a souligné dans un entretien à la presse Mark Bristrow, Président directeur général de Randgold Resources, multinationale dont dépend la Somilo-SA. C’était en marge du premier conseil d’administration de cette société, le 28 janvier dernier, tenu à Loulou dans le cercle de Kéniéba.
Dans une note explicative du projet, la Somilo-SA dit avoir « la conviction qu’une partie des valeurs créées [de l’extraction minière, Ndlr] doit être investie dans le développement d’activités économiques durables pour [les] communautés hôtes ». « Le filtre de développement durable de la compagnie couvre 5 domaines : eau potable, éducation de base, santé primaire, sécurité alimentaire et le développement économique local », précise le texte.
Il n’y a pas de distinction de niveau d’étude dans les critères de sélections des apprenants. Le seul critère discriminatoire est celui d’être un ressortissant de la localité. Une discrimination positive, diraient certains, puisque l’objectif du projet est de "fixer" les jeunes dans leurs localités après l’exploitation minière.
Seydou Coulibaly
© AFRIBONE
Le 1er Février 2016