Le président malien est en grande partie sous contrôle français. Et rien n’est entrepris afin de l’extirper de ce contexte qui risque de lui conférer l’image d’un piètre chef d’Etat.
Pour stopper l’avancée des djihadistes qui menaçaient de prendre le contrôle de la capitale, Dupont a volé au secours du Mali. Délogés des principaux centres urbains, ils ont transformé leur repli en conquête de l’arrière pays, ce qui laisse planer des incertitudes sur la sécurité des personnes et des biens dans bien d’endroits.
Le président français François Hollande est ravi de l’opération militaire. En baisse dans les sondages d’opinion, il se torturait la cervelle pour créer un événement salutaire. Le voilà submergé de messages de félicitations émanant du monde civilisé. Puis, la France s’est investie beaucoup au Conseil de sécurité afin que l’Organisation des Nations-Unies dépêche une mission de paix au Mali. Sous les regards approbateurs des populations qui y voyaient un sérieux coup de pouce. Toutefois, elles ont vite déchanté.
Elles n’accordent à présent aux casques bleus qu’une confiance limitée. Consécutive au refus manifeste de croiser le fer avec les djihadistes couplé aux velléités de déclarer la guerre au mouvement patriotique GATIA dans sa quête de protection des populations victimes d’exactions de groupes armés. L’annonce de l’érection d’un périmètre de sécurité autour de la ville de Kidal sous contrôle rebelle participait de cette stratégie d’offrir au Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) un parapluie.
Ce parti pris a agacé au plus haut point le président malien Ibrahim Boubacar Keïta. Ses récriminations ont été un coup d’épée dans l’eau. Etats-Unis, Royaume Uni ont épousé le point de vue français. Assorti d’importantes pressions diplomatiques sous le poids desquelles intervient la maladroite injonction d’IBK au GATIA de regagner ses positions antérieures, donc d’abandonner Anéfis (haut lieu de transit de la drogue) à la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) qui avait suspendu sa participation au Comité de suivi de l’Accord d’ Alger. De toute évidence, le numéro un malien a visiblement quelque peine à rester constant. Après avoir vertement tancé la MINUSMA, il l’a couvert quelques semaines plus tard d’éloges à New York, siège de l’organisation.
Demain, l’OEI peut-être !
En outre, il semble avoir fait bon cœur contre mauvaise fortune : l’absence de l’Etat à Kidal. Récemment, il déclarait en réplique à d’aucuns désireux de lui voir en visite dans cette région qu’une telle démarche serait contreproductive. Encore sur ce terrain, il a changé le fusil d’épaule. On se rappelle, Moussa Mara, alors Premier ministre, avait foulé le sol kidalois, soldé par un carnage au sein des Forces armées.
Or, on ne peut soupçonner ce dernier de faire cavalier seul. Peut-être, IBK voulait ainsi sondé à nouveau les intentions de son ami François Hollande. Selon les enquêtes balistiques, les balles ont été tirées d’armes de fabrication française. D’aucuns soupçonnent les soldats français d’avoir prêté main forte aux rebelles. En vue de dissuader notre gouvernement d’y exercer l’autorité de l’Etat, conformément aux consignes données par Hollande.
Puisque la nature a horreur du vide, le Septentrion est devenu une plaque tournante du trafic de toute sorte : armes, drogue, marchandises, humain. Et les groupes armés rançonnent ce trafic. A vrai dire, les trafiquants sont devenus des multinationales. Et comme toute multinationale, ils secrètent des profits. Qui sont recyclés dans l’économie formelle : achat ou construction d’immeubles dans les grandes villes du Mali et dans le reste du monde, création d’entreprises, entre autres.
En définitive, tout le Mali voire la sous-région sont affectés par l’absence de l’administration à Kidal devenu le temple des organisations maffieuses et terroristes. Sous le nez et à la barbe de Barkane, plutôt dans les airs et réduit à quelques opérations terrestres, pas suffisantes pour les décourager. Sur d’immense étendue de sable naissent et grandissent des groupes qui donnent du fil à retordre aux forces armées et de sécurité dans d’autres contrées du pays. Alors qu’elles peinent à obtenir les équipements indispensables. Un fait imputé à l’activisme français qui vient embrouiller une situation déjà passablement complexe.
De l’aveu d’IBK, alors en tournée dans la région de Sikasso, des puissances empêchent le Mali d’être tel qu’il l’entend, et de se conduire comme il veut. Bamako désirait se procurer des véhicules de combat et des BMP (engins blindés de transport de troupes) de marque russe, des hélicoptères de combat. En vérité, selon nos sources, la place de plus en plus prépondérante de la Russie et de la Chine dans le commerce avec le Mali n’est pas du goût de Paris, attaché à son rôle de puissance colonisatrice. Demain, ce serait l’Organisation de l’Etat islamique qui pourrait profiter du chaos actuel pour étendre ses tentacules au Mali, avant ou après une intervention militaire jugée très probable visant à la déloger de la Libye. Un tel scénario n’est pas à écarter quand on sait que toutes les rébellions touaregs sont parties de là.
Georges François Traoré
Source: L'Informateur