Les retrouvailles entre la CMA et la Plateforme à Kidal n’ont pas dissipé tous les malentendus autour de la sécurité de la ville. L’accord, noué, entre les deux parties, stipulant l’allègement du dispositif militaire du Gatia et impliquant une cogestion de la ville, doit être renforcé pour présenter toutes les garanties de sécurité et de paix. Une réunion de la dernière chance est programmée à la fin de ce mois de février pour aplanir tous les problèmes, liés à la gestion sécuritaire de la ville de Kidal. L’Etat serait-il représenté, tel qu’il est souhaité par les populations ?
Kidal, en dépit du calme qui y règne entre la CMA et la Plateforme dont un fort contingent a pénétré, il y a quelques jours, est dans l’attente d’une réunion de concertation, celle annoncée comme l’ultime occasion, à l’issue de laquelle les divergences nées, çà et là, entre les deux protagonistes devront être discutés et aplanis. Cette réunion, dont tout le monde s’accorde, ici, à dire qu’elle sera décisive pour l’avenir de Kidal, selon des sources proches des deux principaux protagonistes, est prévue pour le 23 février prochain, et devra réunir en premier lieu les responsables politiques et militaires de la CMA et de la Plateforme, les représentants des communautés, les autorités traditionnelles et plusieurs autres acteurs, concernés par le processus de paix au Mali.
En fait, le weekend dernier, les deux protagonistes, à savoir la CMA et la Plateforme ont scellé une entente sur la cogestion de la sécurité dans la ville de Kidal. Les deux nouveaux alliés y sont parvenus à une telle entente, nouée in extremis, pour éviter d’en arriver aux mains, suite à l’arrivée d’un impressionnant contingent du Gatia, membre de la Plateforme, dans la ville de Kidal. En effet, l’arrivée du contingent du Gatia, loin d’être un fait de guerre, comme on en a bien l’habitude dans cette partie du Mali, était au contraire un deal entre les deux parties qui en étaient d’accord sur les termes. Mais seulement voilà, l’entrée massive du contingent du Gatia avait irrité certains responsables de la CMA, lesquels avaient aussitôt exigé son retrait de la ville de Kidal, en attendant que des cadres de concertation ne désignent les limites et les modalités d’un tel retour au bercail.
Les deux protagonistes ont donc noué une entente de cogestion pour assurer la sécurité de Kidal. Les termes de cet accord prévoyaient clairement que le Gatia puisse alléger son dispositif sécuritaire et militaire dans la ville. La cogestion sécuritaire, admise entre les deux parties, supposait également que les différends nés de cette nouvelle cohabitation entre les deux protagonistes soient réglés par le dialogue.
Si l’accalmie règne dans la ville de Kidal, en dépit de l’arrivée du contingent de la plateforme, ce n’est pas pourtant qu’il n’y a pas de problèmes de cohabitation.
Bien au contraire ! Au sein du Gatia, on exprime une certaine gêne face à l’exigence de la CMA d’autant que cette présence n’avait pas initialement été conditionnée à aucun facteur lié ni au nombre des combattants admis dans la ville, ni à un quelconque délai. Certes, du côté de la CMA, on reconnait une telle entente sur la cogestion de la ville de Kidal, mais l’on dit de manière ferme que la manière dont le Gatia y a envoyé ses hommes (on parle d’une bonne centaine de combattants et autant de véhicules), n’était pas la plus appropriée. Voilà pourquoi les deux parties, pour désamorcer la crise, ont décidé de s’accorder plus rapidement sur les termes de la nouvelle cogestion de la ville qui ont permis de maintenir dans la zone une relative accalmie.
Face à cet accord entre la CMA et la Plateforme, ils ont été nombreux les Maliens à voir là une sorte de déviance vis-à-vis de l’Etat qui était manifestement le plus grand perdant de ce nouveau scénario sécuritaire qui se dessinait dans la ville de Kidal, du moins apparemment, en ce sens que ni l’Etat, en tant que tel, ni aucun de ses démembrements n’ont pris part à ces discussions, à l’issue desquelles, on le voit plus nettement, les deux protagonistes ont bien l’intention de se partager la responsabilité dans la gestion sécuritaire de Kidal. L’opinion publique y était d’autant plus perplexe que les deux parties ne se fondent pas textuellement sur l’accord de paix d’Alger, pour cimenter la nouvelle entente autour de la sécurité de Kidal, mais bien un accord, dit d’Anéfis, qui n’engage que les deux bords, car signé et adoptés, en son temps, rien que par eux dans la perspective de sceller entre eux la paix des braves.
C’est pour toutes ces faiblesses constatées sur l’accord de cogestion entre la CMA et la Plateforme, autour de la sécurité de Kidal, et d’autres difficultés liées à l’implication réelle des populations, qu’il est apparu nécessaire qu’une ultime réunion de concertation soit rapidement convoquée pour empêcher Kidal de connaitre la déchirure. Cette réunion de la dernière chance, telle qu’elle a été annoncée permettra non seulement d’aplanir les divergences entre les deux bords, notamment de fixer le nombre exact des combattants, admis dans la ville, et également les lignes de démarcation dans la couverture sécuritaire. Mais également, la réunion, à en croire les informations, donnera l’occasion à tous les acteurs de prendre leurs responsabilités dans la sécurité de la ville de Kidal. Outre les populations concernées, les représentants de la mission onusienne, également actifs dans la zone, on s’attend que l’Etat puisse annoncer son grand retour, à la suite de cette réunion du 23 février prochain, dans le but non seulement de calmer l’attente des populations, mais aussi de pouvoir discuter et obtenir les conditions d’une présence plus accrue de l’administration.
On imagine, au sein de la population active, plus soucieuse de voir l’Etat joué sa partition pour le retour définitif de Kidal dans le giron national, qu’à partir du 23 février prochain, de nouvelles lueurs d’espoir se profileront à l’horizon.
Sékouba Samaké