Le texte intégral du message du président de la République par intérim
« Officiers généraux, officiers supérieurs, officiers subalternes, sous officiers, militaires du rang des Forces armées, de sécurité et paramilitaires,
Le 52ème anniversaire de notre grande armée intervient à un moment où le Mali est en guerre. Le Mali est en guerre ! Le Mali est en guerre à son corps défendant. Le Mali est en guerre parce que des aventuriers de l’Internationale islamiste nous l’imposent. Le Mali est en guerre parce que des djihadistes partisans d’une idéologie moyenâgeuse veulent soumettre notre Peuple.
Le Mali est en guerre parce que le terrorisme et le crime organisé transnational veulent sanctuariser notre pays pour menacer la paix et la sécurité universelle et pour déstabiliser le monde libre.
Le Mali est en guerre parce que les Maliennes et les Maliens n’ont pas pour vocation de renoncer à la liberté, à la démocratie, à l’intégrité de leur territoire ni à la forme républicaine et laïque de leur pays.
Le Mali est en guerre parce que le peuple malien est conscient de ses obligations sous régionales, régionales et internationales.
Notre pays est donc en guerre ; une guerre qui sera sans doute coûteuse et épuisante. Mais nous ne faisons pas la guerre par plaisir ; nous la faisons par devoir et par nécessité.
Le 11 janvier dernier, je le répétais dans mon adresse à la Nation : « La guerre n’est pas notre choix. Notre choix, c’est la paix, encore la paix et toujours la paix. Mais, si on nous impose la guerre, nous la ferons et nous porterons une riposte cinglante et massive à nos ennemis ».
C’est ce que nous faisons, avec l’appui de nos amis, en particulier la France, qui a été prompte à réagir quand nos positions ont été attaquées par l’adversaire dans le secteur de Konna. Les troupes françaises se battent à nos côtés dans les airs et sur terre ; elles se battent à nos côtés pour la liberté, pour la démocratie et par solidarité avec notre peuple meurtri.
En ces moments particulièrement graves, je veux remercier, en votre nom à tous le président François Hollande, le gouvernement français et l’ensemble du peuple français. Le Mali n’oubliera jamais cette grande marque d’amitié ainsi que cette fraternité de sang et d’armes qui ouvrent de nouvelles pages des relations franco-maliennes, et des relations entre la France et l’Afrique.
En ces heures tragiques qui coïncident avec la commémoration du 52ème anniversaire de la création de notre Armée nationale, j’ai une pensée particulièrement émue pour ce jeune officier français, pilote d’hélicoptère, tombé sur le théâtre des opérations. A sa famille, à ses compagnons ainsi qu’aux autorités françaises, je voudrais dire ceci : « Le sacrifice du Lieutenant Damien Boiteux ne sera pas vain.
Il est tombé pour le Mali ; il est mort pour la France ; il est mort en défendant la liberté, la démocratie, il est mort en défendant le monde civilisé. L’idéal pour lequel le Lieutenant Damien Boiteux a consenti le sacrifice ultime continuera d’être une source pour abreuver notre détermination à mettre hors d’état de nuire, les ennemis de la liberté ».
Lieutenant Damien Boiteux, sachez que des dizaines de petits Damien Boiteux ont vu le jour au Mali depuis votre tragique disparition et ces petits Damien qui vont se multiplier en progression arithmétique perpétueront votre nom à travers l’espace et à travers le temps jusqu’à la fin des jours.
Par la même occasion, je voudrais m’incliner devant la mémoire de tous les soldats maliens morts au combat et présenter mes très sincères condoléances à leurs familles. Ils sont tombés au champ d’honneur ; ils sont tombés pour le Mali ; ils sont tombés pour la Mère-Patrie qui leur sera à jamais reconnaissante.
Aux blessés de guerre qui sont dans nos différentes formations hospitalières, je souhaite un prompt rétablissement. J’exprime la compassion de la Nation face aux souffrances des populations victimes collatérales des opérations militaires en cours.
Notre Armée nationale est engagée sur plusieurs fronts pour contenir, pourchasser et écraser définitivement les djihadistes obscurantistes qui veulent nous ramener dans les ténèbres de l’Histoire. Nous nous battrons avec opiniâtreté pour faire échec à ce dessein maléfique. Mais nous ne sommes pas seuls au combat. Outre la France qui s’est portée à notre secours aux premières heures de la nouvelle agression que nous avons subie, toute la Communauté internationale est à nos côtés.
La liste est particulièrement longue des pays qui s’engagent à nous fournir qui des troupes, qui de la logistique, qui du renseignement et d’autres types de soutien. Depuis deux jours nous avons commencé à accueillir les premiers contingents de la Mission Internationale de Soutien au Mali (MISMA) à qui je souhaite la plus fraternelle des bienvenues en terre africaine du Mali.
Je veux exprimer la gratitude de mon pays à la CEDEAO, à l’Union Africaine, à l’Union Européenne, aux Nations Unies, aux partenaires bilatéraux et multilatéraux pour leur engagement ferme et combien rassurant à nos côtés. Que l’ensemble des pays engagés dans la large coalition internationale contre Al-Qaïda et la nébuleuse criminelle qu’il satellise trouvent ici l’expression de notre profonde gratitude ainsi que notre reconnaissance sans bornes.
Chaque pays qui envoie des troupes au Mali, de la logistique ou quelque autre moyen que ce soit, tout en contribuant à dessiner les contours d’une victoire rapide, participe à l’avènement d’un espace sahélo-saharien débarrassé du terrorisme, du narcotrafic et du crime organisé.
Les évènements de ces derniers mois ont montré à quel point il est indispensable de se doter d’une armée performante, républicaine et moderne. Avec courage et abnégation, nous avons engagé des réformes afin que nos Forces de défense et de sécurité puissent jouer pleinement leurs missions régaliennes. C’est dans cet esprit qu’ont été adoptées de nombreuses mesures législatives et réglementaires. Ainsi, l’Assemblée Nationale a voté plusieurs textes dont la Loi portant création du Comité Militaire de Suivi des Réformes des Forces de Défense et de Sécurité.
Pour mieux renforcer notre outil de défense, le Gouvernement envisage cette année 2013 l’adoption d’une loi portant Orientation et Programmation militaire prenant en compte les besoins de formation d’organisation et d’équipement de l’Armée
Dans la même dynamique, et soucieux de doter nos Forces de Défense et de Sécurité de moyens adéquats leur permettant d’assurer pleinement leurs missions naturelles, le Gouvernement a inscrit dans la Loi des finances 2013 une hausse appréciable du budget ordinaire consacré à la Défense. De même, une dotation spéciale est mise en place pour l’effort de guerre.
Le rééquipement et le réarmement moral passeront par les reformes appropriées des différents compartiments de nos forces armées. L’importante réforme que nous envisageons à partir de 2013 visera à moderniser et à accroitre l’efficacité opérationnelle de nos Forces de Défense. Cette réforme est appelée à se poursuivre, avec comme axes majeurs la professionnalisation des effectifs, la modernisation des équipements et l’amélioration des conditions de vie et de travail des hommes.
A ce propos, je voudrais saluer la générosité spontanée de nos compatriotes qu’ils soient opérateurs économiques, cadres et agents des administrations d’Etat, des sociétés et entreprises publiques, parapubliques et privées, qui ont compris qu’en aidant l’Armée nationale, c’est le pays tout entier qu’ils aident.
J’encourage toutes les initiatives citoyennes qui sont de nature à accompagner la montée en puissance de nos Forces Armées et de Défense, qu’elles prennent la forme du don du sang, des dons en nature et en espèces ou même sous forme d’expression artistique, culturelle ou sportive.
Mes chers compatriotes,
Nos forces armées ont besoin de nous. Elles ont besoin de nous sentir à chaque instant à leurs côtés, elles ont besoin de notre soutien permanent et de notre solidarité sans faille. Cette union sacrée que je ne cesse d’appeler de mes vœux, nous la leur devons. Nous la leur devons parce que nous sommes des patriotes, nous la leur devons parce que eux ont choisi de donner leur vie pour nous tous.
Unissons-nous comme un seul homme autour de nos vaillants soldats. Aidons les, aidons les par tous les moyens. Et pendant la reconquête du Nord quand le hasard des combats les conduiront dans vos villages ou dans vos villes donnez–leur à boire, donnez–leur à manger car pour vous libérer ils n’auront pas eu parfois le loisir de boire suffisamment ou de manger à leur faim.
Nos forces engagées au front ont besoin de nos prières et de nos bénédictions ; elles ont besoin de nous savoir unis et soudés dans l’épreuve pour remplir convenablement leur mission hautement patriotique.
Je ne doute pas un seul instant, que chaque Malienne, chaque Malien, jouera sa partition pour la grande symphonie de la victoire.
Mes chers compatriotes,
Le Gouvernement de la République a été amené par la gravité des périls et des menaces, à décréter l’Etat d’urgence. Il s’agit d’une mesure qui n’a pas pour objectif de restreindre délibérément les libertés mais de protéger les citoyens maliens et leurs hôtes contre le terrorisme dont chacun d’entre nous connait les méthodes.
Je vous demande d’accepter les petits désagréments pouvant résulter de l’application de cette mesure. Nous veillerons à ce que tout se passe dans le strict respect de la loi.
Officiers généraux, officiers supérieurs, officiers subalternes, sous-officiers, soldats, du Mali, d’Afrique et du monde,
Demain (Ndlr : dimanche) nous commémorons le 52ème anniversaire de la grande armée malienne. Puisse ce jour marquer le début d’une épopée glorieuse pendant laquelle vous écrivez quelques unes des plus belles pages de l’histoire universelle.
Cette guerre vous la gagnerez. Nous la gagnerons ensemble au nom de la civilisation et de la démocratie. Tous ensembles vers Gao, Tombouctou et Kidal !